Ce n’est pas en 140 signes accompagnés du désormais fameux hashtag balancetonporc que Manon Tanguy a décidé de contribuer à la libération de la parole des femmes harcelées ou agressées. Non, c’est en chanson qu’elle le fait, une chanson écrite en 2015, inspirée par un fait réel et aujourd’hui mise en images par la la réalisatrice-peintre Gabrielle Vigneault-Gendron…
Parmi ses influences, Manon Tanguy, aujourd’hui trio, cite volontiers Camille, Bertrand Belin, Katerine ou encore Mansfield Tya avec qui elle partage assurément un amour des mots et une écriture contemporaine qui raconte la vie, l’amour, la confusion des sentiments…
Plus de 200 concerts à son actif, de nombreuses distinctions et premières parties, notamment de Laurent Voulzy, Dominique A, Sansévérino, Romain Humeau ou encore Rover, deux albums dont le dernier, Parmi les Crocodiles, est sorti en février 2017… Manon Tanguy a développé au fil du temps et des rencontres un univers bien à elle, poétique et sensuel.
Avec La Taille de sa jupe, extrait du deuxième album, Manon Tanguy aborde les violences faites aux femmes et notamment le harcèlement de rue dont on parle beaucoup en ce moment. Le clip, lui, vient de sortir. Elle nous en parle, elle revient aussi sur l’origine de cette chanson, son écriture, sa rencontre avec la réalisatrice Gabrielle Vigneault-Gendron…
« J’ai écrit le texte de cette chanson en 2015, suite à l’agression d’un homme sur la poitrine d’une amie. La scène était assez violente. Un copain est resté blême, elle a baissé les yeux et moi j’ai interpellé ce type comme si j’attendais des réponses ou moins qu’il ressente de la honte. Le tableau était tristement classique… Je suis rentrée chez moi et j’ai écrit ce texte. Je l’ai fait lire à une autre amie qui m’a guidée vers sa forme finale ».
« La taille de sa jupe t’invite pourtant à la danse, toutes des salopes qui te font perdre la tête (refrain de La Taille de sa jupe) »
« C’est un refrain cynique qui vient pointer du doigt la désinvolture et l’insolence de ces hommes qui n’y voient qu’une danse dont il ne se sentent pas même à l’initiative. Harcèlements, coups, viols, la femme est toujours remise face à un statut ambiguë de victime-coupable. Moi même, je m’aperçois que j’ai pu dire des choses déplacées, qu’aujourd’hui je n’imaginerais pas pouvoir sortir de ma bouche ! Il faut du temps pour déconstruire tout ça, mais puisque la parole semble se libérer, je suis persuadée qu’il y a de l’espoir pour aller vers plus de liberté, d’égalité et de fraternité! Tiens ça me rappelle quelque chose… haha ».
« Bref, en décembre 2015, j’ai rencontré la réalisatrice-peintre Gabrielle Vigneault-Gendron à Montréal. Elles réalisait déjà des courts-métrages très beaux et très sensibles sur les rapports hommes-femmes ou encore sur les troubles féminins. En France, une fois la chanson enregistrée, je l’ai recontactée pour savoir si ça la branchait de mettre cette chanson en image. C’est donc en bravant les tempêtes de l’atlantique grâce à l’ADSL que ce clip est né. Enfin, surtout grâce à l’oeil très fin et la créativité débordante de cette nana incroyable ! ».
Propos recueillis par Eric Guillaud le 29 octobre 2017