Comme nombre de secteurs, celui des musiques actuelles a souffert de la pandémie et du confinement. Aujourd’hui, six salles de spectacles des Pays de la Loire créent un fonds de dotation et lancent un appel aux mécènes…
Salles de concerts fermées, festivals annulés, musiciens mais aussi producteurs, labels, studios d’enregistrement… à l’arrêt, c’est toute la filière musicale régionale qui a souffert de la pandémie depuis le mois de mars, et s’attend à souffrir encore quelques temps avec un été largement privé de décibels.
Mais qui se cache derrière ces formes géométriques ? Un nouveau groupe dont on connaît pour l’instant le nom, Rouquine, mais absolument pas les visages. Il vient de sortir son premier single, une rêverie électro-pop baptisée Cyborg, et en promet un nouveau tous les mois à partir de septembre…
J’aurais pu en introduction vous donner le pédigré des musiciens qui composent ce nouveau groupe mais on se limitera à dire qu’il s’agit d’un duo issu d’un groupe qui a marqué la scène ligérienne et au-delà, un duo qui aime James Blake et Orelsan, Alt-J et Son Lux, Boris Vian et la poésie, l’électro et le rap, la chanson française et la pop urbaine.
Pour le reste, nos mystérieux musiciens, peut-être de vrais cyborgs, nous expliquent le comment du pourquoi de ce premier titre…
« On ne savait pas où on allait et c’est comme ça qu’on a créé Cyborg. C’est le premier de la liste. D’autres vont suivre, une fois par mois. Toute une galerie de personnages qui viennent de ce qu’on a vu, entendu et vécu. Des bandes originales, des films dont on se fait les images ».
Si on ne se touche pas, est-ce qu’on se fera moins mal, tous en bluetooth et tout sera normal
« Cyborg, ça parle de l’amour qu’on se déclare les yeux rivés sur une lumière bleue, d’un date trouvé dans le big data, du technologique qui à la fois nous relie, nous sépare et nous transforme peu à peu, nous, les humains, en autre chose. Alors, à l’heure du sans contact généralisé, on peut dire que Cyborg résonne ».
Propos recueillis par Eric Guillaud le 19 juin 2020
Quand il y a un peu plus que du Daria, un peu plus que du Thugs, c’est qu’il y a du LANE dans l’air. Le groupe angevin vient de sortir son deuxième album, du rock taillé dans l’urgence à grands coups de riffs acérés. Branchez les guitares…
L’avantage avec LANE, c’est qu’on est rapidement mis au parfum. Dès les premières mesures, le groupe rappelle si besoin qu’il n’est pas là pour nous jouer une berceuse mais pour nous balancer du rock, du rock à sa façon, aussi puissant que mélodique.
Petit retour en arrière, LANE est la contraction de Love and Noise Experiment, un peu de douceur, beaucoup de fureur. LANE, c’est aussi la réunion de cinq musiciens issus pour quatre d’entre-eux de groupes qui ont marqué la scène angevine et au-delà, Pierre-Yves et Eric Sourice des Thugs, Etienne et Camille Belin de Daria. Et un petit jeune au centre, Félix Sourice, fils de Pierre-Yves qui les a rejoint comme guitariste. Une belle réunion de famille !
Fondé en 2017, un EP en 2018, un premier album en 2019, un second en 2020 baptisé Pictures of a Century, près de 80 concerts… ça va très vite pour LANE, aussi vite que sa musique, mais aucun risque que ses musiciens se brûlent les ailes, nous confie le batteur Camille : « Il y a des gens expérimentés dans l’équipe, on fait des choix, on prend des décisions, les partenaires avec qui on bosse sont des gens sencés, on sait d’où ils viennent, ils savent d’où on vient, tout fonctionne avec bon sens ». Interview…
Ils sont ligériens, ont fait l’actualité de ces derniers mois ou ne vont pas tarder à la faire malgré la crise sanitaire, vingt groupes ou artistes que nous avons aimés et suivis. Une sélection totalement subjective mais largement assumée à consommer frais avec des glaçons. Et vive la musique!
On commence avec Mou. Le chanteur nantais vient de sortir son premier album, un bijou très justement baptisé Bijoux d’amour. Onze titres qui nous parlent de ce qu’il aime, de Sophie Marceau, du cha-cha, des croissants ou de la Ford Fiesta, avec une certaine nonchalance, certes, mais, une nonchalance qui galvanise. Et le tube de l’été ? Il est là, Océan bleu, de quoi se déconfiner définitivement…(retrouvez notre interview de Mou ici)
Regarde les Hommes Tomber devait se produire au Hellfest le 21 juin prochain, il donnera finalement un concert sans public dans le cadre du Hellfest from Home le 18 juin. L’occasion tout de même de découvrir en live son nouvel album Ascension sorti quelques jours avant le confinement. Interview…
Le Hellfest, ils connaissent et ils adorent. Alors, bien sûr, les cinq musiciens du combo de black metal nantais se faisaient une joie d’y retourner jouer une troisième fois et communier avec les fans autour de leur nouvel album que d’aucuns considèrent comme le plus puissant de leur discographie, peut-être un tournant dans une « carrière » déjà bien engagée.
Mais voilà, un satané virus en a décidé tout autrement, reléguant le célèbre festival de métal à 2021 et leur projet de tournée à la rentrée. Tony le guitariste du groupe, nous parle de tout ça et de bien plus encore…
Reporté à 2021 pour cause de pandémie, le festival des musiques extrêmes de Clisson nous invite à patienter avec une édition en mode pantoufles. Sortez les chips et les boissons, le Hellfest s’occupe du reste…
Bien sûr, ça n’aura rien à voir. Bien sûr, il nous manquera l’énergie, la folie, la démesure, la foule, la chaleur ou la pluie, la poussière ou la boue, les longues files d’attente devant les sanitaires ou le Merchandising, le contact, les wall of death et autres circle pit, les nuits courtes, les journées sans fin, les errances nocturnes dans le camping à la recherche d’un duvet accueillant…
Déconfinés et prêts à vous croquer les Dust lovers ! Du moins si l’on en croit leur nouveau clip à l’esprit draculien et ce troisième album au guitares acérées baptisé Fangs, crocs en bon français. Montez le son et sortez les gousses d’ail…
Vous les avez peut-être connus sous le nom de The Texas Chainsaw Dust Lovers. Bonne nouvelle, le groupe a opté pour une formule plus directe sans changer ou si peu son style, incisif.
Huit ans d’existence, deux albums au compteur, un passage mémorable au Hellfest en 2018, un changement de line-up en 2020 et les revoilà, prêts à nous replonger dans cette atmosphère cinématographique qu’ils affectionnent tant, avec un clip entièrement tourné à Nantes et alentours. Son nom, Goldie…
Un clip mais aussi un album à paraitre le 15 juin, Fangs, 11 titres dont la moitié, et c’est une nouveauté, composée au piano et non à la guitare. Alors, forcément, les aficionados de la première heure distingueront sûrement une évolution. Pour les autres, ça reste du rock, du bon rock qui déménage et vous enlace jusqu’à l’aube. Attention à la morsure !
Si Stereolux a retrouvé du son, ce n’est pas encore pour un concert mais pour une résidence. Quatre jours durant, le groupe nantais DBStraße a peaufiné le spectacle qui accompagne son nouvel EP Amours fauvessorti début mars. Rencontre…
Nous les avions interviewés en 2017à l’occasion de la sortie de leur premier EP,Initial, nous les retrouvons aujourd’hui pour le deuxième,Amours fauves, sorti quelques jours avant le confinement.
Nous les retrouvons aussi sur une scène, oui, la micro de Stereolux à Nantes où ils ont élu domicile durant quatre jours. Une résidence, une des toutes premières résidences proposées par Stereolux depuis plusieurs mois, peut-être un début de commencement de retour vers la normale pour cet espace de création et de diffusion dédié aux musiques actuelles et une belle opportunité pour le groupe. DBStraße a pu travailler sur le prochain spectacle qui accompagnera la tournée d’Amours fauvesdès la rentrée, un spectacle qui fait appel à la musique mais aussi au texte et à la vidéo.
Pensé et créé à Berlin, DBStraße est un projet d’élecro-pop intimiste emmené à l’origine par Doris Abéla et Benjamin Durand, rejoints depuis par la violoncelliste Suzanne Fischer, le guitariste Julien Vinçonneau et la vidéaste Annabelle Durand. En attendant de les retrouver en concert, Benjamin évoque avec nous cette résidence, le nouveau spectacle, l’EP, Berlin, Nantes… et l’avenir du groupe.
Il y a du rêve dans la pop de Kiss Doom Fate, du rêve et de l’innocence, de celle qui apporte un peu de légèreté, et c’est plutôt bienvenue en ces temps de pandémie, de celle aussi qui contribue à explorer sans craintes de nouveaux territoires. Innocence, c’est aussi le nom du nouveau single du duo angevin. Il sort aujourd’hui. Interview…
Le duo Kiss Doom Fate, KDF pour les intimes et les gens pressés, est né au début de l’année 2018 du côté de la capitale angevine. Vous l’avez peut-être déjà aperçu sur une scène ici ou là, notamment en ouverture du festival Tempo Rives en 2019, et remarqué son univers singulier.
Aux machines et à la basse, Yves-Pol. Au chant, Mathilda. Le premier vient du rock, la seconde du folk. À eux deux, ils proposent aujourd’hui une musique à l’esthétique ciselée, un doux mélange des genres et d’expérimentations sonores, une pop onirique et sensuelle emmenée par la voix puissante de Mathilda.
Le duo vient de sortir un nouveau single, Innocence, l’occasion de le rencontrer et, peut-être pour vous, de le découvrir…
Bonjour Kiss Doom Fate. Comment allez-vous en ces temps étranges?
Yves-Pol. Avec le confinement, nos plans ont été complètement renversés, difficile de savoir de quoi demain sera fait. En revanche, ça n’est pas parce que les concerts live ne sont plus possibles qu’on ne peut plus proposer notre musique aux gens. Je pense que les gens ont tout autant besoin de musique qu’avant, et on fait de notre mieux avec ce qu’on sait faire !
Mathilda. C’est un temps de montagnes russes. Mais, il y a beaucoup de bonté et d’intelligence chez les gens et on a la capacité d’améliorer les choses. Et puis, la musique est là, et c’est une des choses principales auxquelles je m’accroche. Je suis attirée par l’idée que de la destruction surgit la transformation, la nouveauté. Je suis convaincu qu’il y aura plein d’opportunités à l’avenir. Il faut être prêt à les accueillir et à prendre des risques !
Kiss Doom Fate, c’est qui c’est quoi au juste ?
Yves-Pol. Ce sont deux voisins qui sont devenus amis puis partenaires de musique ! On avait des projets solo mais on a rapidement accroché et commencé à partager des idées. On a d’ailleurs fait notre tout premier concert dans l’appartement de Mathilda, avec des amis. Parfois on repense à tous les hasards qui nous ont mené jusqu’ici et on se dit qu’on aurait jamais pu prévoir ce qui allait nous arriver !
Mathilda. La scène qui me vient en tête quand je pense à nos séances de création : le son de liquides qui bouillent, des tubes aux formes étranges et de la fumée couleur néon vert et rose ! Pour moi, quand une chanson naît de notre collaboration, c’est comme une potion magique. On pourrait pourtant imaginer que travailler ensemble serait impossible. À première vue, tout nous oppose. Yves-Pol, lui, c’est les musiques électroniques, tout ce qui est gear & technique, maximaliste, frénétique. Il est très au courant des nouveautés. Je tends vers la musique folk et classique, plutôt mélodieuse, une esthétique naturelle, et un penchant pour tout ce qui est lié au Slow Movement et Deep Time (processus géologiques, par exemple). Finalement, on se complète bien !
Pourquoi ce nom ?
Mathilda. Ça vient d’une phrase d’une de nos premières chansons “spin the bottle / kiss doomed fate / send our messages over the waves”
Vous dites être un duo de fever dream pop, c’est quoi au juste la fever dream pop ?
Yves-Pol. C’est une association de mots qui nous plait : la dream-pop est un style dans lequel on nous catégorisait souvent à nos débuts. Ça ne correspondait pas trop au niveau de l’esthétique, mais on aimait beaucoup la partie “rêve”. Du coup on se l’est réapproprié en ajoutant fever dream, le rêve fiévreux.
Mathilda. La fièvre c’est inquiétant, ça cristallise les sensations, ça nous fait peur car ça indique un autre problème… on aime explorer ça.
Question incontournable, quelles sont vos influences ?
Yves-Pol.Je suis très influencé par la mouvance cyberpunk, de BladeRunner à Ghost In The Shell en passant par des œuvres moins connues comme Serial Experiment Lain. Si je dois citer des noms de musiciens qui nous inspirent, ça peut aller de Doja Cat à Grimes, Nicky Minaj, Travis Scott et bien sur des classiques du type Massive Attack, Radiohead ou MIA.
Mathilda. À l’origine de mon approche des paroles, on trouve les traditions de storytelling et de poésie de la folk traditionnelle et des années 60’s. J’aime l’écriture flux de conscience, un concept qui est aussi lié à mes intérêts pour le bouddhisme et la psychologie. Par rapport à la voix, je suis inspirée par les artistes qui explorent les multiples facettes de leur timbre et identité vocale, tout en gardant un fil conducteur, je pense notamment à Bob Dylan et Doja Cat.
Innocence est votre nouveau single à sortir le 5 juin. Fébriles ?
Yves-Pol. Toujours un peu ! C’est bizarre de sortir un single car avec tous les délais liés à la sortie, il y a un décalage entre qui on était au moment de l’écriture du morceau et qui on est maintenant. On se retrouve à promouvoir un projet qu’on aime, mais on a déjà la tête dans de nouvelles idées… C’est particulièrement vrai pour nous car, bien qu’on travaille de plus en plus en équipe avec des pros, on a fondamentalement une approche DIY, que ça soit sur la création, la production et aussi la promotion.
Mathilda. J’aime ce que nous avons concocté et j’ai hâte de le partager. De manière générale, je préfère le processus de création au produit final. C’est un long chemin qui est exaltant et parfois pénible. Ce tourbillon m’apporte beaucoup. Je garde d’ailleurs des vieilles versions de nos chansons et de nos conversations, car pour moi c’est là où je me rappelle des moments de vie les plus croustillants !
Que raconte Innocence, que racontent vos textes en général ?
Mathilda. Souvent, je tourne vite la tête quand il y a une introduction dans un livre, ou un teaser pour un film car je ne veux pas être influencée. C’est pour cela que je préfère ne pas expliquer mes paroles pour laisser la place à l’interprétation.
Un mot tout de même sur l’innocence ? Que représente-t-elle pour vous ?
Mathilda. L’innocence c’est une qualité en nous qui est sauvage et souvent secrète – un mélange de légèreté, d’énergie, et de malice. Quand elle surgit, ça donne des frissons, on perçoit le temps différemment. J’ai l’impression que peu de personnes voient nos moments d’innocence car ces derniers exigent chaleur, vulnérabilité et confiance. Notre société ne favorise pas d’être à vif comme ça. C’est à oublier, à refouler. Je commence à comprendre que c’est une qualité qui peut se cultiver, tout en sachant qu’elle restera fugace.
Yves-Pol. Pour moi, l’innocence c’est presque une forme d’ignorance nécessaire. C’est quelque chose qui est fait pour être perdu à un moment du voyage, l’innocence est brève. Mais c’est dans l’ordre des choses, pas besoin de se sentir coupable : au contraire il faut l’accepter.
KDF fait pour la scène ou le studio ?
Yves-Pol. On produit tout depuis nos home studio respectifs, et j’ai un amour particulier du travail en studio. Le fait de pouvoir expérimenter, d’apprendre toujours de nouvelles choses, d’enregistrer un son puis d’en faire quelque chose qui n’a rien à voir… On a construit notre set live autour de notre album studio avec un objectif : s’éclater sur scène.
Mathilda. Les deux ! On travaille minutieusement le soundscape, les paroles et l’atmosphère de nos chansons. C’est pour ça que je recommande de les écouter dans le noir avec un bon casque afin de pouvoir s’immerger – notamment avec Old Wing, qui, pour moi, est une chanson à écouter en toute intimité. Ce que je trouve intéressant sur scène, c’est le mélange d’énergie et d’adrénaline entre le public et nous. Descendre dans la foule : c’est une sensation complètement unique.
Quel album tourne en boucle actuellement sur votre platine ?
Yves-Pol. “Nothing is true & Everything is Possible” du groupe Enter Shikari, qui mélange métal, pop et musique électronique. Ils arrivent a faire une musique unique et raffinée à partir d’une recette franchement dangereuse !
Mathilda. Je me laisse emporter par une playlist d’artistes variés. Par exemple, “L.O.V.E” de Kendrick Lamar (feat. Zacari), une des meilleures chansons que j’ai entendues depuis longtemps, grâce à l’émotion exprimée, le flow, et la production. J’écoute aussi “Apocalypse” de Cigarettes After Sex, une chanson avec un grain agréable et une atmosphère intime, et “One Step Ahead of Heartache” une chanson parfaite par la diva éternelle, Aretha Franklin.
Un single et demain, à quoi risque de ressembler votre futur proche ?
Yves-Pol. On veut continuer à explorer de nouvelles sonorités, textures, grains, à travailler ensemble et à proposer des sons avec le plus d’intensité possible. Je m’intéresse à la synthèse granulaire en ce moment qui me permet de transformer des sons banals en hurlements d’un autre monde : ça fait un cocktail redoutable avec le chant de Mathilda. Vraiment y aller à fond et faire une musique qu’on ne peut ignorer.
Mathilda. Pendant ces prochains mois, on va se focaliser sur le prochain single et pousser toujours plus loin notre esthétique en vidéo-collage. Et justement cette prochaine sortie est une composition pleine d’espoir qu’on a hâte de partager.
Merci Mathilda et Yves-Pol, merci Kiss Doom Fate. Propos recueillis le 29 mai 2020 par Eric Guillaud