La fessée, j'ai arrêté

Il n'y a pas si longtemps, j'écrivais : "La fessée, j'arrêterai plus tard". Parce que, parfois, on ne voit pas comment formuler un ultimatum autrement qu'en promettant une claque sur la cuisse. Parce que c'est quand même différent d'une gifle en plein visage. Parce que ça fait du bien aussi d'exprimer sa propre colère.

J'y repense parce qu'une nouvelle campagne débute aujourd'hui, avec diffusion d'un spot et tout le tralala. Et l'on reparle d'une loi pour pousser les parents à modifier leurs pratiques.

Des claques (sur la cuisse, parce qu'avec la couche, la fessée perdait de son sens), j'en ai donné un paquet, moi qui n'en ai jamais reçu. Parfois par bouquets entiers : une parce qu'il ne m'obéit pas, une autre parce qu'il ne m'obéit toujours pas... Et ça peut durer tant ces petits sont butés. Mais au bout de la troisième, je veux que ça cesse. Je lis dans le regard de mon enfant sa colère noire et son sentiment d'injustice. C'est désormais sûr, je n'obtiendrai rien de positif. Comment sortir de cette situation par le haut sans avoir l'air de capituler ? Je vois la trace de cinq doigts rouges sur la cuisse de l'enfant, comme la marque de mon incompétence et de mon absence de maîtrise de moi-même. Ai-je tapé si fort ? Peut-être, j'ai encore mal à la main.

Cet écœurement de moi-même, ce sentiment d'impasse, je n'ai plus voulu les ressentir après le précédent post de blog. J'avais fanfaronné, j'étais fière de moi, mais je n'étais pas plus avancée.

Je crois que j'ai beaucoup été tentée par la fessée quand les enfants avaient entre 2 et 3 ans et faisaient leur crise d'autorité. C'est un âge dur où on a l'impression qu'on ne peut pas raisonner avec eux. Pourtant ma louloute de 4 ans mériterait bien plusieurs claques par jour à l'échelle de mes punitions de l'époque.

Mais nous avons réfléchi à d'autres punitions, moins violentes, mais plus efficaces. La plus puissante étant de ne plus adresser la parole à l'enfant et de refuser de lui faire un câlin le soir. Mais sinon, il y a "privé d'histoire" ou "reste dans ta chambre" qui fonctionnent honorablement, le dernier m'apportant la satisfaction de ne plus entendre les hurlements de ma furie.

Surtout, depuis janvier, mon grand a de l'argent de poche. Un euro par semaine. Consciencieusement, il économise en feuilletant son catalogue de Lego Star Wars. Et chaque dizaine de centimes en moins le fait plus hurler plus fort que quand Luke apprend que Dark Vador est son père. Depuis, on est assez tranquille. Reste la mini-princesse Leia, contre qui même la puissance de la Force ne semble rien pouvoir pour l'instant.

Ce que les enfants m'ont apporté

Okay, j'ai daubé en début de semaine en racontant à quel point être parent entraîne des sacrifices. Quelques malins m'ont demandé pourquoi en avoir fait (parce que je ne savais pas, et parce que, c'est comme Sega, c'est plus fort que toi) et d'autres m'ont dit qu'elles hésitaient encore plus à passer à l'acte. Plusieurs ont crié au scandale, sans comprendre que lister ce que je sacrifie ne signifie pas que je le reproche à mes enfants, ni même que je prétends me sacrifier.

Mais il ne serait pas complètement juste de ne pas faire un deuxième post à propos de toutes les choses que mes enfants m'ont apportées.

De la sérénité (eh oui...)

Quand je rentrais du taf avant, je pouvais avoir une insomnie à cause d'une faute laissée dans un titre (je suis journaliste). Aujourd'hui, ça m'angoisse, mais quand je suis à la maison, j'ai vraiment d'autres chats à fouetter. Bref, on relativise (un peu).

Des connaissances

Non, je ne parle pas de l'usage du mouche-bébé ou de l'anatomie de mon appareil reproductif. Vraiment, j'apprends plein de choses. Au travail, je suis la plus forte sur les dinosaures, et j'en connais un rayon sur les volcans, les animaux de la banquise ou l'espace.

Retourner en enfance

Je peux faire des constructions en Lego en toute impunité. Je regarde plein de dessins animés et de films pour enfants, et quand on est triste parce que Beethoven va se faire piquer, on se serre les uns contre les autres. On fait des grands coloriages, comme ceux du très chouette magazine Bonbek. On fait semblant de se battre sur le futon et on doit se délivrer de l'emprise de l'autre. Des fois, je fais même du toboggan.

© Emma Defaud

© Emma Defaud

De l'estime de soi

Certes, je suis arrivée au boulot avec de la morve sur l'épaule, mais quel bonheur d'être la plus forte parce qu'on a ouvert un bocal de confiture. Quel plaisir de s'apercevoir qu'on a fait des progrès en dessin depuis notre maternelle à nous. Savoir lire, ça paraît d'autant moins inné quand on a un fils qui s'arrache la bouche sur chaque syllabe. Leurs yeux plein d'émerveillement pour une simple cocotte en papier fait du bien à l'âme.

De l'amour et des rires

- Quand je pars le matin, ma fille me fonce dessus pour un dernier câlin avec tellement de force que je manque de tomber.

- Mon fils lit des histoires à sa petite sœur.

- Je fais plein de cookies, des lasagnes, des muffins le week-end.

- Je lis Harry Potter à voix haute à mon fils et je vois toutes ses émotions sur son visage.

- Quand ma fille est dans le siège bébé du vélo, elle chante Raiponce à tue-tête avec des paroles inventées et des accords approximatifs : "Et elle boiva la potion magique et mouraâââh." Tout le monde se retourne dans la rue.

- J'ai des milliers de câlins et de bisous (avec quelques coups de coude dans les cotes).