Cumul des mandats, les présidents de région ont-ils tenu leurs promesses ?


Pendant les élections régionales, Valérie Pécresse, Xavier Bertrand, Christian Estrosi et Hervé Morin avaient un point en commun : ils promettaient tous de démissionner de leur mandat de député en cas de victoire à la tête de la région. Alors, promesse tenue? Pas pour tous.

La présidente de la région Île-de-France, Valérie Pécresse a bien démissionné, tout comme son homologue, Xavier Bertrand élu à la tête de la nouvelle grande région Hauts-de-France issue de la fusion de la Picardie et du Nord-Pas-de-Calais.

Pour Christian Estrosi, la promesse est aussi tenue mais avec une petite astuce. Le président de la région PACA est devenu le suppléant de celle qui lui a succédé à l’Assemblée Nationale. S'agit-il d'un calcul pour ne pas trop s’éloigner de son ancien mandat ? Pas du tout selon ce dernier : "Vous savez, un suppléant n’est rien du tout."

Hervé Morin, 75% d'absence à l'Assemblée nationale

Quant au député de l'Eure et président de la grande région Normandie, Hervé Morin n'a pas démissionné de son mandat de député malgré sa promesse de décembre dernier.

S’il n’a pas démissionné de son mandat de député, c’est parce qu’un recours a été déposé contre son élection à la présidence de la région Normandie nous assure-t-il. Mais il y a une autre raison : "Je ne voulais pas de législatives partielles". Avec toutes ces responsabilités, le député arrive-t-il à remplir correctement ses obligations ? Nous avons fait les comptes. En commission à l’Assemblée Nationale, le taux d’absence d’Hervé Morin s’élève à 75% depuis le début de son mandat.

Pour tenir sa promesse de campagne, Hervé Morin devra en tout cas démissionner avant le 20 juin prochain. Passée cette date, il restera moins d’un an avant les prochaines législatives, or la règle est stricte, aucun scrutin partiel n’est possible dans les douze mois qui précèdent les élections.

Nombre de conseillers ministériels, le gouvernement a-t-il tenu sa promesse ?


Au début du quinquennat, l'ancienne porte-parole du gouvernement Najat Vallaud-Belkacem avait énoncé une règle précise : "les ministres disposeront désormais de 15 collaborateurs et les ministres délégués de 10 collaborateurs". La règle a-t-elle été respectée ?

Quatre ans plus tard la ministre de l'Education, Najat Vallaud-Belkacem ne respecte pas la règle qu'elle a elle-même énoncée. Son cabinet comporte officiellement 21 conseillers, mais elle en partage certains avec ses collègues du gouvernement. Il ne faut donc en compter que 18, soit trois de plus que la limite fixée. La ministre de l'Education n'est certes pas la seule. Selon nos calculs, 15 membres du gouvernement dépassent la limite. Tous le reconnaissent sauf le cabinet de Myriam El Khomri qui mélange son équipe avec celle de sa secrétaire d’Etat.

"La question est de savoir si nous sommes efficaces"

Parmi ceux qui ont beaucoup de conseillers figure le ministre des Sports, Patrick Kanner. "C'est un très gros ministère, nous a-t-il répondu, la question n'est pas de savoir s'il y un conseiller en plus ou en moins, mais si nous sommes efficaces". Sans compter les chargés de mission, ministres et secrétaires d’Etat ont embauché 27 conseillers de trop selon nos calculs. Que pense Matignon de ces quelques entorses au règlement ? Le cabinet de Manuel Valls ne nous a pas répondu.

 

Dans les coulisses du lobbying de Veolia


Au Salon des maires, les élus sont là pour faire affaire. Et après les emplettes, que se passe-t-il ? Les affaires continuent pardi, mais en coulisses. Le numéro un mondial pour l'eau, Veolia a prévu le coup en invitant une soixantaine d'élus à une soirée privée dans un musée. Ambiance.

L'adresse, c'est le Palais de la découverte, célèbre musée scientifique parisien à deux pas des Champs-Elysées. Veolia a privatisé le lieu pour la soirée. Les soixante maires, présidents d'intercommunalités et conseillers municipaux ont droit à une exposition sur les dinosaures. Puis, détour par le planétarium pour une petite leçon d'astronomie. Après la visite, place au cocktail et au repas. Coût de l'opération selon nos calculs : 450 euros par élu.

"Voir comment ça se présente, qui tire les ficelles"

A chacune des 19 tables, les élus côtoient leur interlocuteur régional de Veolia. L'un d'entre eux se montre justement très clair sur l'objectif de la soirée : "l'intérêt c'est de tisser des liens, on va dire extraprofessionnels (...) c'est déjà de voir comment ça se présente, qui sera le prochain, voir qui tire les ficelles."

Les élus ont-ils le droit d’accepter ce genre de cadeaux ou avantages ? Nous avons regardé les textes, pas d’interdiction ferme dans la charte de l’élu local. Mais certaines communes vont plus loin, avec des chartes de déontologie comme celle de Châlons-en-Champagne où la rubrique impartialité stipule que "les invitations et cadeaux à l’intention d’agents publics sont interdits quel qu’en soit le montant (...) la notion d’agents publics doit être comprise au sens large. Il s’agit de tout bénéficiaire d’un mandat électif, de tout fonctionnaire (...) pouvant influer sur une décision d’utilisation de fonds publics".

Nous avons reçu cette réponse du service de presse de l’entreprise : elle assume son opération de relation client qui respecte en tous points la législation française. Quant au coût de la soirée, Veolia contredit nos calculs, estimant à 308 euros et 22 centimes le coût de l’invitation. 

Pour en savoir plus sur les relations entre Veolia et ses clients, nous avons trouvé ce document sur le site du groupe.

ERDF, un changement de nom qui coûte cher


Choisir un bon logo, ce n’est pas facile mais c’est essentiel. Pour une très grande entreprise, une erreur peut se chiffrer en millions d’euros dépensés pour rien. L'entreprise publique chargée de l'électricité, ERDF a justement changé de nom pour Enedis. Coût de l'opération : 25 millions d'euros.

Ce n'est pourtant pas la première fois qu’ERDF change de logo. En juin 2015, ERDF était repeint en toutes lettres sur les casques, les uniformes et sur les engins de l’entreprise. L’entreprise publique a donc changé de logo deux fois en moins d’un an pour une facture avoisinant les 30 millions d’euros.

Pourquoi ce changement d'identité ? Parce que le gendarme de l’énergie le demandait à ERDF... depuis 2007 pour éviter toute confusion avec celui de sa maison-mère EDF.

Outreau, l'histoire de la réforme jamais appliquée


C’est l’histoire d’une réforme qui devait tout changer, mais qui s’est heurtée à un principe de réalité, celui des moyens de la justice en France. L’Oeil du 20h vous raconte une des promesses oubliées de l’après Outreau.

A la suite du procès Outreau, une loi est votée en 2007 pour qu'un juge d'instruction ne puisse plus prendre de décision seul mais en "formation collégiale de trois juges". Pour appliquer cette réforme ambitieuse, il est prévu de recruter 314 juges d'instruction. Or, entre 2008 et 2012 le nombre de postes de juges d'instruction a diminué. Il en résulte l'impossibilité d'appliquer le principe de collégialité, la mesure est reportée jusqu'en 2014.

Reporté jusqu'en 2017, puis abrogé

Sous l'ancienne Garde des Sceaux, Christiane Taubira, un nouveau report de la mesure est voté jusqu'en 2017, même si le nombre de postes de juges d'instruction est reparti à la hausse. Alors il y a deux semaines, à l’Assemblée nationale, les députés ont décidé d’arrêter de donner du temps au temps.

Finie la collégialité, cette inapplicable mesure de l’après Outreau est abrogée, neuf ans après son adoption. Les magistrats instructeurs dénoncent un recul. Le ministère de la Justice se défend en pointant un autre texte, voté bien avant l’affaire d’Outreau. Le texte en question permet de saisir plusieurs magistrats quand il s’agit de dossiers compliqués. Dans l’émotion de l’après Outreau, aurait-on voté une loi pour rien ?

Le chantage de la CGT pour faire passer sa tribune dans la presse


Ce matin en kiosque, vous l’avez sans doute constaté, un seul titre de presse nationale était disponible : L’Humanité. Et en page 5, un des événements du jour, c’est cette tribune du secrétaire général de la CGT, Philippe Martinez, qui dit dans une pleine page tout le mal qu’il pense de la loi El Khomri. Ce texte, la CGT voulait le voir publié dans toute la presse quotidienne nationale : Le Monde, Le Figaro, Libération, Aujourd’hui Le Parisien, Les Echos, La Croix, bref partout.

Pour parvenir à leurs fins, les représentants CGT ont mis entre les mains des patrons de presse un drôle de marché : publier la tribune ou ne pas paraître dans les kiosques. Quand un syndicat veut contraindre la presse à publier une tribune sous peine de bloquer la parution des journaux, peut-on parler de chantage ? "Les salariés de la CGT du livre se sont mis en grève" nous a répondu Philippe Martinez.

Faut-il croire qu’à la CGT, grève et chantage peuvent parfois être synonymes ? A la prochaine grève, on essaiera de reposer la question à Philippe Martinez.

Quand François Hollande et Manuel Valls dénonçaient le manque de dialogue social en France


Face au blocage dénoncé par le gouvernement, la fermeté a comme un air de déjà-vu. On a cherché dans nos archives et six ans plus tôt, les rôles entre l'opposition et la majorité étaient inversés.

En 2010, le Premier ministre s'appelle François Fillon et il défend la réforme des retraites avec... fermeté. "L'intimidation, le blocage et la violence sont la négation de la démocratie et du pacte républicain", déclare-t-il dans l'hémicycle. En 2016, Manuel Valls dénonce le blocage du pays avec les mêmes termes : "Prendre ainsi en otage le consommateur, notre économie, notre industrie, ça n'est pas démocratique".

Revenons six ans en arrière quand Manuel Valls reprochait "l'absence de dialogue social", tout comme François Hollande. Quant aux ministres du gouvernement actuel, leur credo à l’époque c‘était de ne pas passer en force : "Vous êtes irresponsables, lorsqu'à force de mépris et de dédain vis à vis des Français, vous les poussez dans la rue", s'écriait Marisol Touraine, actuelle ministre de la Santé. 

Six années se sont écoulées, c’est fou comme le temps passe. Mais après tout, il n’est pas interdit de changer d’avis, surtout quand on a changé de point de vue.

 

Pots de départs en série à l'Elysée


Des pots de départ, la Présidence de la République en a organisé un certain nombre ces derniers temps. Quatre rien que la semaine dernière. Peut-on pour autant parler de d'un "sauve-qui-peut général" à l'Elysée à un an de la présidentielle ?

Pour répondre à cette question, nous avons épluché quatre années du Journal officiel. Au total, il y a eu 46 départs et autant d'arrivées entre mai 2012 et avril 2016. Le turn-over peut paraître élevé, il est comparable avec celui de l'ère Nicolas Sarkozy qui totalisait 49 départs en quatre ans.

Trois anciens conseillers rebondissent dans le secteur public

Mais à un an de la présidentielle, le cabinet de François Hollande semble traverser une zone de turbulences. Départs en série, recasages à tous les étages, la presse vient d’annoncer la fuite de 8 conseillers supplémentaires depuis avril, quatre nous ont été confirmés par l’Elysée. Et apparemment, tout est prévu pour qu’ils profitent d’un atterrissage en douceur. Trois anciens conseillers rebondissent dans le secteur public, avec pour l’un d’entre eux, Philippe Vinçon, un poste de directeur général au ministère de l'Agriculture.

Une autre ancienne conseillère, Marie-Hélène Aubert, vient d'être nommée au poste d’inspectrice général de l’administration du développement durable. Quant à Jean-Jacques Barbéris, le jeune conseiller économique qui incarnait la jeune garde du président à la Une de l'Obs, il rejoindra dans quelques semaines la banque française Amundi.

N’est-il pas gênant que le conseiller affaires financières parte faire carrière dans les affaires financières ? Réponse laconique de l’Elysée : "Jean-Jacques Barbéris est passé en Commission nationale de déontologie de la fonction publique, comme c'est la règle." Quant aux autres départs des conseillers du Président, l'Elysée trouve "naturel qu'au bout de deux ou trois ans au sein d'un cabinet, les gens aient envie de changer. Souvent à l'approche de l'été, il y a du mouvement." Les échéances électorales pour les conseillers, ça se prépare aussi en soignant sa sortie.

L'UEFA a-t-elle choisi un sponsor hors-jeu pour l'Euro 2016 ?


Entre l’UEFA et les 16 partenaires officiels de l’Euro 2016, ce n’est pas qu’une question d’argent, c’est aussi une question de valeurs. "Le Pacte mondial invite les entreprises à adopter, soutenir et appliquer dans leur sphère d'influence un ensemble de valeurs fondamentales, dans les domaines des droits de l'homme, des normes de travail et de l'environnement", peut-on lire sur le site de l'UEFA.

Voilà pour les principes. Mais sur le terrain, dans sa recherche de partenaires, l’UEFA a trouvé des marchands d’articles de sports, de sodas et de hamburgers mais aussi du pétrole, celui de Socar, une entreprise d’Etat de l’Azerbaidjan.

Dans le dernier classement de reporters sans frontières sur la liberté de la presse, ce petit pays de 10 millions d'habitants occupe la 163e place sur la 180e, juste devant la Libye. L’UEFA a donc pris comme partenaire officiel une entreprise d’Etat d’un pays qui ne respecte pas les droits de l’Homme, mais l’UEFA ne voit aucune contradiction. Contacté à plusieurs reprises, le service de presse de la Socar ne nous a pas répondu.

Quand François Hollande s'arrange avec les chiffres du chômage


"Sous mon prédécesseur, le chômage a augmenté d'un million" a déclaré François Hollande à propos de Nicolas Sarkozy. Selon le Président, le nombre de demandeurs d'emploi aurait davantage augmenté durant le quinquennat précédent que durant ses quatre années à la tête du pays (608 200 nouveaux demandeurs d'emploi). Nous avons voulu vérifier.

Entre 2007 et 2012, il y a eu 753 400 demandeurs d'emploi supplémentaires. C’est beaucoup, mais ça ne fait pas un million. En outre, ce chiffre est calculé sur les 5 ans du mandat de Nicolas Sarkozy. Or, les 600 000 chômeurs de plus sous François Hollande sont calculés sur 4 ans.

Comment l’actuel président de la République est-il arrivé à ce chiffre de 1 million pour son prédécesseur ? Tout simplement en ajoutant aux chômeurs de catégorie A ceux des catégories B et C ayant une activité réduite. Pour Nicolas Sarkozy, les trois catégories totalisent 1 088 000 demandeurs d’emploi supplémentaires. Pour François Hollande, il y a eu 1 096 200 chômeurs supplémentaires entre mai 2012 et mars 2016.

Pourquoi François Hollande a-t-il comparé des chiffres incomparables ? Contacté à plusieurs reprises, le service de presse de l’Elysée ne nous a pas répondu. L’inversion de la courbe du chômage, voilà décidément un sujet bien sensible.