Le retour des salaires XXL à Wall Street

À Wall Street, les traders ont gagné en moyenne un peu plus de 367 000 euros de salaire et de bonus en 2017, soit une hausse de 13%.

Plus riches aujourd'hui qu'avant la crise de 2008. À la bourse de New-York, les salaires des traders, des gérants de fortune et des banquiers d'affaires n'ont jamais été aussi élevés. Pour ces professions, l'année dernière, le revenu moyen, salaire et bonus compris, a dépassé celui d'il y a dix ans. De 400 000 dollars en 2007, il est passé à 422 500 dollars en 2017, soit 367 400 euros.

Les bonus ont progressé de 17 %

Ces revenus en hausse sont liés aux excellents profits de la bourse américaine. L'économie, la croissance, se portent très bien ; le chômage est à son plus bas niveau historique. À Wall Street, ce sont les bonus qui ont augmenté le plus. Ils représentent 40% de la rémunération totale des financiers. En 2017, ils ont progressé de 17%, la plus forte hausse depuis dix ans. "Après la crise de 2008, la politique des bonus avait été encadrée par Barack Obama, Donald Trump a tout dérégulé. Il n'y a aujourd'hui plus aucune limite à Wall Street", conclut Agnès Vahramian, en direct de Washington.

Reportage d'Agnès Vahramian, Fabien Fougère, Arielle Monange et Constance Longobardi

"Trump est imprévisible car il n'écoute que ses impulsions"

Après avoir vécu plusieurs années à Washington, Laurence Nardon dirige le programme Amérique du Nord de l'Ifri (Institut français des relations internationales). Dans son livre Les États-Unis de Trump en 100 questions, à paraître le 18 octobre, la chercheuse décrypte les évolutions récentes du pays et la politique du Président. Entretien.

Le nom de Donald Trump revient fréquemment dans la presse, sur les réseaux sociaux ou dans les discussions. Comment l'expliquez-vous ?

L.N : La personnalité de Trump est hors-norme. Les experts disent de lui qu'il présente des troubles de la personnalité d'ordre narcissique. C'est quelqu'un qui n'a pas vraiment dépassé le stade de l'enfance dans lequel on pense que tout tourne autour de soi. Trump est donc extrêmement impulsif et agressif. Il n'a pas de filtres sociaux. Il est aussi susceptible et veut être aimé. C'est pour cette raison qu'il est toujours très séducteur et aimable avec les chefs d'État étrangers qui le rencontrent même si, la veille ou le lendemain, il envoie des tweets insultants à leur égard. Au final, il est fondamentalement imprévisible car il n'écoute que ses impulsions.

Comment, avec cette personnalité, a-t-il pu arriver à la Maison-Blanche ?

L.N : Cela ne l'empêche pas d'être malin et intelligent. Son passé de promoteur immobilier à New York l'a armé pour faire des coups, être tactique et savoir négocier de manière assez brutale. Au-delà de sa personnalité, il y a aussi ses idées politiques. Il ne faut pas se leurrer : en France, on dirait qu'elles sont d'extrême-droite. Trump est pour la fermeture des frontières à l'immigration et au libre-échange. Sa politique étrangère est également un peu musclée.

Des idées politiques qui ont trouvé un écho...

L.N : Entre les élites et les minorités ethniques très pauvres, les classes moyennes se sentent trahies et abandonnées depuis des décennies. Leurs usines ont fermé à causes des accords de libre-échange, la crise de 2007 est passée par là, etc. Quant à la classe moyenne blanche, elle s'inquiète d'une évolution démographique qui va faire d'elle une minorité d'ici 2040. Ces personnes ont donc véritablement vu Trump comme un sauveur.

Après deux ans, son électorat reste-t-il satisfait ?

L.N : À la veille des élections de novembre, Trump s'est montré très efficace vis-à-vis de son électorat. Pour les populistes, il a tenu sa promesse anti-immigration avec le mur en construction à la frontière du Mexique et le Muslim Ban [NDLR: un décret qui suspend l'entrée sur le territoire des citoyens de sept pays à majorité musulmane]. Il a également renégocié les accords de libre-échange avec le Mexique et le Canada. Le Président a aussi tenu ses promesses envers une autre partie de son électorat : les conservateurs chrétiens, extrêmement rétrogrades sur les questions de moeurs. Ces derniers ont voté pour Trump car il s'est engagé à nommer des juges très conservateurs à tous les étages de la pyramide judiciaire. Il a effectivement fait nommer Brett Kavanaugh et Neil Gorsuch à la Cour suprême.

Son électorat pourrait pourtant se détacher de lui à cause de ses impulsions et ses affaires...

L.N : Que Trump soit un monstre, ce n'est pas grave pour les conservateurs tant qu'il tient ses promesses. Les  populistes ont un autre raisonnement. À chaque fois que Trump dit une horreur, cet électorat n'en est que plus persuadé qu'il est de leur côté. Pour eux, ce sont des transgressions des codes. 

Peut-on envisager la réélection de Trump en 2020 ?

L.N : Absolument, d'autant plus que côté démocrates, il ne se passe pas grand chose... Ce parti est divisé entre les centristes modérés — portés par Hillary Clinton en 2016 — qui proposent une politique économique libérale et un autre courant — porté par Bernie Sanders en 2016 — qui propose des réformes beaucoup plus à gauche et très radicales pour les États-Unis. Le parti n'est pas prêt pour porter un seul candidat en 2020.

Quid des élections de mi-mandat ?

L.N : Les démocrates prédissent un raz-de-marrée en leur faveur. Mais je n'en suis pas si sûre... Il est probable qu'ils gagnent la majorité à la Chambre des Représentants; au Sénat, sans doute pas.

Propos recueillis par C.L

En bref

L'arrivée d'un populiste à la Maison-Blanche n'est pas un accident, mais le résultat d'années de creusement des inégalités sociales et de transformations de la société américaine. Républicains et démocrates ont encouragé une libéralisation économique et financière excessive, tandis que les élites progressistes se sont concentrées sur les minorités, négligeant les inquiétudes d'une Amérique blanche vouée à devenir minoritaire. En conséquence, Donald Trump est devenu son champion. Son style imprévisible et transgressif tout comme son projet américano-centré bouleversent les règles des relations internationales. De Paris à Téhéran, en passant par Pyongyang, Moscou et Jérusalem, l'ensemble du monde est affecté par cette présidence hors-norme. Après Trump, une autre Amérique peut-elle émerger ? Laurence Nardon décrypte en 100 clés essentielles les évolutions politiques, sociales et culturelles récentes des États-Unis et interroge le rôle et l'avenir de la puissance américaine.

Les États-Unis de Trump en 100 questions, Tallandier, 16,50 €

Lumière sur la croisade anti-avortement menée en Californie

Aux États-Unis, c'est une véritable croisade anti-avortement qui s'est mise en place ces dernières années. Reportage.

Aujourd'hui, en Californie (États-Unis), les mouvements anti-avortement sont en position de force. Pourquoi ? Et avec quelle méthode exactement ? Près de Los Angeles, dans ce qu'on appelle un centre de crise pour femmes enceintes, des bénévoles chrétiens offrent tout le nécessaire pour les grossesses et les nouveau-nés. Officiellement, ce centre médical dispense de l'aide et de l'information neutre.

Des vidéos-chocs et de fausses informations

En réalité, il s'adresse avant tout aux femmes dont la grossesse n'était pas programmée et fait tout pour les dissuader d'avorter. L'infirmière n'hésite pas à leur montrer des fœtus en plastique et leur offre la première échographie. Pour dissuader les femmes d'avorter, le centre à une autre pièce maîtresse: une vidéo. Le film décrit un avortement à 11 semaines. Scientifiquement, rien d'inexact, mais les mots sont choisis pour effrayer. Toutefois, certains centres n'hésitent pas à avancer des affirmations qui n'ont jamais été scientifiquement prouvées, faisant notamment le rapprochement entre l'alcoolisme, la toxicomanie ou encore le risque de cancer du sein et l'avortement.

Pour obliger ces centres à donner une information neutre, la loi leur demandait jusque-là d'afficher un texte dans la salle d'attente : quelques lignes pour rappeler que l'avortement est légal et gratuit en Californie. Depuis le 26 juin dernier, ce n'est plus obligatoire. Un échec pour les militants pro-avortement. Dans l'ouest du pays, plusieurs dizaines de ces cliniques ont ouvert souvent à proximité de lycées.

Reportage d'Agnès Vahramian, Thomas Donzel et Andreane Williams

Mouvement #MeToo : les changements, un an après l'affaire Weinstein

Il y a tout juste un an, en octobre 2017, le producteur américain Harvey Wenstein était accusé de harcèlement sexuel sur plusieurs femmes. Cela avait débouché sur un mouvement féministe d'une ampleur mondiale avec #MeToo. Où en sommes-nous ? 

L'onde de choc du mouvement #MeToo continue de secouer et de transformer les Américains, choqués par les affaires Harvey Weinstein par lequel le scandale est arrivé, puis Kevin Spacey et Charlie Rose. Depuis, il y a eu des changements. Dans des chambres d'hôtels de Chicago, les employées femmes sont dorénavant équipées d'un boîtier d'alarme contre le harcèlement. "Il y a un GPS à l'intérieur, comme ça ils savent exactement où l'on est. Des filles se sont fait coincées dans des chambres elles ont du sauter par-dessus les lits", déclare l'une de ces femmes de chambre, l'air soulagé. Dans les universités, des femmes interviennent pour montrer des vidéos afin d'expliquer et enseigner le consentement.

La parole libérée

Dans ces universités, l'impact n'est pas seulement sur les femmes. Un étudiant déclare : "Je suis maintenant beaucoup plus réactif face à des gens qui autour de moi faisaient depuis longtemps des choses que je n'appréciais pas." La fin de cette culture du secret s'étend dans les entreprises, comme Microsoft. Avant, dans le contrat des salariés il était stipulé qu'il fallait se taire en cas de harcèlement. Le géant a mis fin à cette pratique et pour les employés "la peur a changé de camp". Les employés des fast-food sont pour la première fois descendus dans la rue pour dénoncer le silence dans les affaires de harcèlement dans leur industrie.

Reportage d'Agnès Vahramian, Thomas Donzel, Arielle Monange, Charlotte Mattout et Constance Longobardi

Immobilier : le réchauffement climatique impacte les prix en Floride

Depuis quelques années, la Floride (États-Unis) mesure les effets du réchauffement climatique. À tel point que les habitants de la côte s'enfoncent dans les terres vers les zones hors de danger.

À Miami (États-Unis), le décor est celui d'une série télévisée américaine. Les canaux de Miami, leurs villas de grand luxe avec piscines, palmiers et pontons privés. Roman Wunderlich fait partie de ces propriétaires privilégiés. Et pourtant, il va partir. "Le problème c'est qu'on voit bien à l’œil nu le niveau de l'eau monter d'année en année", raconte-t-il. Hausse du niveau de la mer, ouragans plus fréquents suivis d'inondations... Le réchauffement climatique commence à faire perdre de la valeur à ce coin de paradis. La maison de Roman valait un million d'euros, mais plus aujourd'hui.

Une gentrification climatique

Ironiquement, le changement climatique va pousser les foyers aisés à déménager là où ils n'auraient jamais imaginé s'installer. Quelques kilomètres plus loin, dans le quartier de Little Haïti, une zone plutôt défavorisée de Miami, les terrains prennent de la valeur. "Lors de l'ouragan Irma, la plage et le centre-ville de Miami étaient complètement inondés et ce quartier était au sec", explique Fabiola Fleuranvil, investisseuse en immobilier. Pour les scientifiques, ce processus s'appelle la gentrification climatique : l'embourgeoisement de certains quartiers à cause du changement climatique.

Ce transfert de la richesse s'effectue à l'intérieur des terres, dans de nouveaux lotissements spécialement étudiés. Dans le sud des États-Unis, plusieurs promoteurs imaginent les constructions du futur face aux changements climatiques. Des maisons surélevées et rondes pour mieux affronter les ouragans. Ou encore des maisons flottantes qui montent en fonction de l’élévation des eaux.

Reportage de Loïc de la Mornais, Thomas Donzel et Rebecca Suner

Normands expatriés : un couple de voyageurs s'intéresse à vous

En juin dernier, Hélène et Valentin ont tout quitté pour parcourir les Etats-Unis pendant six mois. Leur projet ? Dresser le portrait de Normands expatriés. A mi-parcours, ils dressent un premier bilan. 

21 000 kilomètres, 125 jours de road trip, 24 états traversés. Hélène et Valentin tiennent avec précision les chiffres clés de leur voyage. Depuis le 1er juin, ces deux trentenaires sillonnent les routes américaines. Avec un fil rouge: rencontrer des Normands expatriés. Eux-mêmes sont originaires de cette région.

En quatre mois, le couple a fait la connaissance de 14 Normands. Et s'il ne fallait retenir qu'une seule rencontre ? Difficile de choisir. "Dans le Colorado, il y a Martine et John. Nous avons fait plusieurs kilomètres de pistes pour arriver jusqu'à leur maison. Lui est un homme des montagnes. A première vue, c'est un ours. Mais il nous a énormément appris !", raconte Hélène. "Il y aussi Josette Leblond, qui fait du pâté, s'exclame Valentin. Elle est passée d'un business familial à Conches-en-Ouche (Eure) à des show télévisés à Las Vegas." 

Où qu'ils aillent, Hélène et Valentin restent impressionnés par l'hospitalité unique de leurs interlocuteurs. "Nous sommes vraiment dans le partage. Ils nous ouvrent leurs portes, nous préparent des plats typiques, nous servent de guides", détaille Hélène.

Le couple est toujours à la recherche de Normands en Louisiane et dans le Tennessee. Mais au-delà de ces portraits, Hélène et Valentin aspirent aussi à s'immerger dans la culture américaine. "Nous voulons faire découvrir les différentes facettes des Etats-Unis, des plus touristiques aux moins connues", précisent-ils. Avant de reprendre la route vers une nouvelle destination.

C.L

Retrouvez les portraits réalisés par Hélène et Valentin sur leur blog.

Aux Etats-Unis, Charles Aznavour était le "Sinatra français"

Il était un géant de la chanson française. Charles Aznavour s'est éteint, le 1er octobre 2018, à l'âge de 94 ans. En plus de soixante-dix ans de carrière, il a enregistré 1 200 chansons dans six langues différentes et vendu 180 millions de disques. Il était apprécié jusqu'aux Etats-Unis, où il était surnommé le "Sinatra français". Trois choses à savoir.

1Une longue conquête des Etats-Unis

En 1946, le jeune Aznavour accompagne Edith Piaf dans sa tournée en Amérique du nord. Il est alors son secrétaire particulier. Parallèlement, il se produit sur de modestes scènes, sans rencontrer le succès. Il lui faut attendre 1963 pour faire salle comble. Cette année-là, il donne une représentation au Carnegie Hall de New York, dont il finance lui-même la location. Par la suite, il se produit régulièrement aux Etats-Unis. En 1999, un sondage du Time et de la chaîne CNN fait de lui le "chanteur de variété le plus important du XXe siècle", devant Bob Dylan, Frank Sinatra ou encore Elvis Presley.

"She" est l'un des plus grands tubes en anglais de Charles Aznavour.

2Un "mentor, un ami et un amour"

Liza Minelli n'est encore qu'une adolescente quand elle croise la route de Charles Aznavour. "Elle était venue me voir à Broadway, raconte le chanteur au magazine Télé Star. Deux jours après, il y avait un cocktail en mon honneur. Elle était là, dans un coin, timide. Elle m'a dit: "Je voudrais chanter comme vous." " L'artiste confie avoir vécu un an avec l'Américaine. Au fil des décennies, tous deux se sont retrouvés plusieurs fois sur scène. "Charles était mon mentor, mon ami, mon amour. Il me manquera pour toujours", réagit Liza Minelli dans un communiqué.

3Une étoile sur Hollywood Boulevard

C'est la 2618e étoile du Walk of Fame. Depuis août 2017, le nom de Charles Aznavour brille en lettres dorées sur la prestigieuse promenade d'Hollywood. "Je peux dire que je suis aussi un peu californien", avait alors indiqué le chanteur dont la fille et les petits-enfants vivent aux Etats-Unis. En octobre 2016, il avait déjà reçu une étoile honorifique remise par la communauté arménienne de Los Angeles.

En 2017, Charles Aznavour a reçu une étoile sur le Walk of Fame. Photo: Frederic J.Brown/AFP

C.L

Michelle Obama : le recours des démocrates ?

L'affaire Brett Kavanaugh est une affaire de plus sous la présidence de Donald Trump. Toutefois, à cinq semaines des élections de mi-mandat, la confiance est assez relative côté démocrates. De son côté, Michelle Obama est en tournée pour inciter les Américains à voter.

L'inquiétude est palpable du côté de l'opposition américaine. Barack Obama l'a affirmé encore au Danemark, vendredi 28 septembre, imitée par l'ex-First Lady, Michelle Obama. Entend-elle motiver les Américains ? "Aujourd'hui, il n'y a pas, au sein du Parti démocrate, d'étoile montante ou de personne ayant suffisamment d'envergure nationale pour incarner à elle seule l'opposition à Donald Trump. Alors, le Parti démocrate s'est tourné vers la légende vivante, celle dont la cote de popularité est toujours au firmament : Michelle Obama", explique le journaliste Loïc de La Mornais. "Elle est en tournée en ce moment aux États-Unis et est en train d'écrire un livre de confessions et de discussions avec les Américains", ajoute-t-il. A-t-elle quelque chose derrière la tête ?

L'incarnation de l'espoir démocrate

Elle arrive sur scène, tenue décontractée, voulant coller à son image de femme simple et accessible. Pourtant, la tournée de Michelle Obama a tout de celle d'une rockstar. Des dizaines de dates à travers le pays, des foules en délire. Officiellement, elle n'est plus rien, et pourtant, elle incarne un espoir. Michelle Obama est en mission commandée. Mobiliser l'Amérique silencieuse et surtout la jeunesse qui vote peu contre Donald Trump, même si elle ne prononce jamais son nom. Le public, jeune, largement acquis à sa cause, a bien reçu le message.

Une popularité gagnée à Washington, quand elle chantait du rap sur les pelouses de la Maison-Blanche pour inciter les jeunes à faire des études. Aussi à l'aise dans les shows télévisés qu'investie politiquement. De quoi se poser la question : et si c'était maintenant elle qui ambitionnait un destin présidentiel ? Michelle Obama a déjà dit publiquement qu'elle ne voudrait pas être candidate, mais elle sait qu'en politique, il ne faut jamais dire jamais.

Reportage de Loïc de la Mornais, Thomas Donzel, Arielle Monange, Charlotte Mattout et Constance Longobardi  

États-Unis: l'enfer des prêts étudiants

Aux États-Unis, le prix exorbitant des études entraîne de nombreux étudiants à contracter des prêts qui les suivront parfois pendant plusieurs dizaines d'années.

Tout sourire, une jeune femme vient de remporter un jeu télé. À la clé, pas de croisière de rêve, de voiture ou de maison, mais le remboursement de son prêt étudiant. Aux États-Unis, ce jeu fait un tabac et cela se comprend. Car, vu de France, le prix des études aux États-Unis dépasse l'entendement : 55 000 € par an pour le droit à Harvard, 54 000 € pour le journalisme à Columbia, 80 000 € pour le commerce en Pennsylvanie... La facture totale peut atteindre plusieurs centaines de milliers d'euros pour un cursus. Le remboursement commence légalement six mois après la fin de l'université et pèse sur les étudiants tout au long de leur vie.

Des années d'asphyxie économique

L'endettement étudiant devient une bombe à retardement pour la société américaine: un étudiant sur cinq ne peut pas rembourser son prêt. Dans un pays où le coût de la vie est déjà très élevé, les prêts étudiants endettent les Américains sur vingt ou vingt-cinq ans. Chelsea Tobe est diplômée en sciences de l'éducation mais a finalement trouvé un emploi comme chef de rayon dans un grand supermarché. Elle gagne mieux sa vie que si elle travaillait dans l'enseignement mais elle reste asphyxiée par sa dette étudiante : 700 € par mois pour un salaire net de 1 700 €. Comme Chelsa Tobe, de plus en plus d'Américains désespérés créent leur cagnotte sur internet, sollicitant amis et charitables inconnus. Ils sont souvent loin du compte.

Reportage de Loïc de la Mornais, Thomas Donzel, Fabien Fougère, Rebecca Suner et Andreane Williams

Brett Kavanaugh, un magistrat dans la tourmente

Sur le point d'accéder à la Cour suprême, le juge conservateur Brett Kavanaugh voit sa nomination plus que jamais mise en danger. Cinq réponses à vos questions.

Qu'est-ce que la Cour suprême ?

C'est la plus haute autorité judiciaire aux Etats-Unis. Elle examine des décisions, des textes de loi ou des décrets présidentiels, le plus souvent en dernier recours. Ses jugements sont sans appel. Neuf juges y sont nommés à vie. Ils modèlent donc la société américaine à long terme.

Qui est Brett Kavanaugh ?

Brett Kavanaugh, 53 ans, est un juge aux valeurs profondément conservatrices. Donald Trump l'a nommé à la Cour suprême, en juillet dernier, après l'annonce du départ d'Anthony Kennedy. Ce choix doit encore être confirmé par le Sénat.

Pourquoi le calendrier du vote inquiète-t-il les deux partis ?

Le vote doit avoir lieu avant les élections de mi-mandat, qui pourraient bouleverser le paysage politique. Si les Républicains perdent leur majorité au Congrès, ils auraient des difficultés à faire confirmer la nomination de Brett Kavanaugh. Ils espèrent ainsi que le vote ait bien lieu avant le 6 novembre prochain. Au contraire, les Démocrates, qui redoutent l'arrivée de ce juge conservateur et catholique, veulent ralentir la procédure.

Pourquoi les médias américains s'enflamment-ils ?

Depuis le mois de septembre, Brett Kavanaugh fait face à deux accusations d'inconduite sexuelle, qu'il dément vigoureusement. Dans un témoignage paru dans le Washington Post, Christine Blasey Ford, universitaire de 51 ans, explique que, dans les années 1980, Brett Kavanaugh et un ami, ivres, l'ont plaquée sur un lit et cherché à la déshabiller, avant qu'elle ne parvienne à s'enfuir. Elle avait 15 ans, Brett Kavanaugh 17. L'enseignante sera auditionnée jeudi 27 septembre par le Sénat.

Deborah Ramirez, 53 ans, s'est de son côté exprimée dans le New Yorker. Elle raconte que le magistrat, alors étudiant à Yale, a sorti son sexe devant elle, la contraignant à le toucher. "Les gens qui me connaissaient alors savent que cela ne s'est pas produit et l'ont dit. Ceci est du dénigrement pur et simple", a réagi Brett Kavanaugh dans un communiqué.

Et Trump alors ?

Pour le Président, les accusations contre Brett Kavanaugh son "totalement politiques". Sur Twitter, Donald Trump affirme son soutien au juge avant de s'attaquer à Christine Blasey Ford.

"Le juge Brett Kavanaugh est un homme bien, à la réputation impeccable, qui est agressé par les politiciens de l'extrême gauche qui ne veulent pas de réponses, ils veulent juste détruire et retarder. Les faits ne comptent pas. Je vis ça avec eux chaque jour à Washington D.C."

"Je n'ai aucun doute que, si l'agression du Dr Ford avait été aussi grave qu'elle le dit, une plainte aurait immédiatement été déposée auprès des Forces de l'Ordre Locales par elle ou ses parents aimants. Je demande à ce qu'elle présente ces documents pour que nous puissions avoir une date, une heure, et un lieu!"

En réaction, l'actrice Alyssa Milano a lancé le hashtag #WhyIDidntReport (Pourquoi je n'ai pas porté plainte), repris des milliers de fois. Les internautes détaillent les raisons qui les ont poussées à se taire alors qu'elles ont été victimes de violences sexuelles.

C.L