Ce post a pour objectif de vous présenter brièvement la thérapie d'acceptation et d'engagement (ACT, Acceptance and Commitment Therapy en anglais). L'ACT (prononcez "ACTE") est une thérapie relativement récente connue comme appartenant à la "3ème vague" des thérapies cognitives et comportementales. L'une des particularités de l'ACT est son caractère contre-intuitif, rendant sa pratique originale et inattendue…
L'ACT, un modèle thérapeutique contre-intuitif
Lorsque vous êtes confrontés à un problème, vous tentez de le résoudre. Après tout, vous êtes humain, il est donc normal que vous cherchiez à vous débarrasser de vos problèmes. Face à une difficulté psychologique, comme l'anxiété par exemple, votre réaction est du même ordre : vous tentez de la faire disparaître. Et si vous n'y parvenez pas, la plupart d'entre vous finissent par consulter un psy…
"Docteur, débarrassez-moi de mon anxiété !"
Les patients pensent souvent qu'ils ne pourront reprendre une vie "normale" que lorsqu'ils ne seront plus envahis par leurs émotions douloureuses (colère, anxiété, tristesse) ou leurs pensées difficiles (mauvais souvenirs, autocritiques, ruminations). Dans une approche thérapeutique classique, ces évènements psychologiques difficiles sont considérés comme les symptômes dont la diminution devient la cible principale. Mais dans l'ACT, il n'est au contraire plus question de chercher à diminuer les évènements psychologiques gênants. C'est ce caractère contre-intuitif de l'ACT qui en fait son originalité.
Quels sont les symptômes ciblés par l'ACT ?
Mais alors, quel est l'intérêt de consulter un psy s'il ne vous aide pas à vous débarrasser de ces symptômes ? En réalité, l'ACT considère que le véritable problème n'est pas l'évènement psychologique douloureux en lui-même, mais plutôt les comportements que vous mettez en place de façon rigide pour tenter d'échapper à ces évènements chroniques ou de les éviter. Ces comportements, nommés évitements expérientiels, sont en effet susceptibles de présenter au moins 3 inconvénients :
- Ils ne sont pas toujours efficaces sur la durée et vous mettent donc en situation d'échec : la plupart du temps, échapper à des situations anxiogènes chroniques soulage votre anxiété uniquement à court terme ;
- ils peuvent prendre une place considérable dans votre vie, vous empêchant de mener à bien des actions qui en valent la peine : éviter les situations anxiogènes, en restant chez vous par exemple, diminue grandement vos opportunités de découvrir des expériences plus positives. Vous vous engagez moins dans des actions qui donnent du sens à votre existence, des actions guidées par ce qui compte réellement pour vous, comme l'amitié, la famille, ou la citoyenneté par exemple, ce que l'ACT appelle les valeurs.
- ils peuvent paradoxalement amplifier les évènements psychologiques contre lesquels vous tentez de lutter : lorsque vous échappez à une situation anxiogène, vous renforcez la lutte et devenez alors plus "compétent" pour anticiper le moindre élément déclencheur de votre anxiété. De plus, les évitements expérientiels peuvent vous faire culpabiliser, surtout s'ils vont à l'encontre de vos valeurs.
Remarque : l'évitement expérientiel n'est pas mauvais en soi. Il devient un problème uniquement lorsqu'il est trop systématique*, qu'il est inutile (c'est-à-dire inefficace à long terme) et qu'il nuit à votre qualité de vie (c'est-à-dire quand il va à l'encontre de vos valeurs).
En définitive, ce n'est pas la douleur psychologique chronique qui est à l'origine de votre souffrance, mais plutôt les effets délétères d'une lutte perpétuellement renouvelée contre cette douleur. Dans ce cas, on parle de rigidité psychologique, et c'est cette rigidité qui constitue le symptôme dans l'ACT.
La thérapie se donne alors pour objectif de vous aider à diminuer l'utilisation permanente de l'évitement si celui-ci interfère avec vos valeurs. Plutôt que de chercher à lutter contre vos évènements internes douloureux et d'essayer de les contrôler (ces évènements sont de toute façon inhérents à la condition humaine !), l'idée est de vous apprendre à modifier votre relation à ces évènements psychologiques pour mieux les gérer et vous rendre ainsi plus autonome face à eux (c'est la partie "acceptation" de l'ACT). Il vous deviendra alors plus facile d'augmenter la variété de vos réactions face à ces évènements, notamment en agissant en direction de vos valeurs (c'est la partie "engagement" de l'ACT). Cette cible thérapeutique, qui consiste à augmenter votre répertoire comportemental quelle que soit votre expérience intérieure, est définie dans l'ACT comme relevant de la flexibilité psychologique.
* La tendance systématique à recourir à l'évitement expérientiel peut être expliquée à l'aide des mécanismes d'apprentissage répondant, opérant et relationnel, mécanismes qui seront développés plus en détail dans un prochain post.
Si vous souhaitez en savoir plus sur l'ACT, je vous suggère la lecture de cet ouvrage très accessible et proposant de nombreux exercices pratiques : "Le Piège du Bonheur" (Russ Harris, 2009).
Voir également les pages françaises du site de l'ACBS (Association for Contextual Behavioral Science).
Voir aussi Monestès, J. L., & Villatte, M. (2011). La thérapie d’acceptation et d’engagement ACT. Issy-les-Moulineaux: Elsevier Masson.