« Que serait le monde sans Nutella ? » À ce slogan inventé par le pape des pâtes à tartiner, les agriculteurs de toute l'Italie ont bien une réponse à proposer. Et pas sûr qu'elle plaise à Ferrero. Pour satisfaire la gourmandise de ses consommateurs, le géant industriel du chocolat, dont le siège se trouve à Alba (Piémont), se fournit en grande partie en Turquie.
Mais depuis peu, Ferrero a faim de nouvelles ambitions : recentrer sa production de noisettes en l’Italie, notamment en Toscane. L’objectif est clair ; il faut doubler la production à l'échelle régionale et nationale d’ici 5 ans. Pour ce faire, un contrat a été proposé par Ferrero à des agriculteurs de la province d’Arezzo. À la clef, un prix fixe de 2,50€ le kg, peu importe la qualité du produit. « Les noisettes parfaites seront utilisées dans les Ferrero-Rocher et les moins belles seront broyées pour faire le Nutella » détaille Gianluca Ghini, directeur de la Confagricolturra Arezzo. Un tarif et des conditions imbattables.
Le risque de la monoculture
Ainsi s'est divisé le monde des agriculteurs. D'un côté, certains signent et vantent les mérites du contrat de Ferrero. De l'autre, l’association Slow Food et les producteurs indépendants dénoncent des dangers pour la biodiversité. En plus de l’utilisation de traitements chimiques sur les champs, l’ombre de la monoculture plane sur les plaines toscanes. Car pour produire des « noisettes Ferrero », les noisetiers doivent remplacer les vignes et les céréales. « Dans les Pouilles, les oliviers sont là depuis des milliers d’années. Ce n’est pas le cas pour les noisettes en Toscane et c’est pour ça qu’on peut parler de monoculture », analyse Stefano Mantellini, producteur indépendant de noisettes bio. Comme lui, plusieurs propriétaires agricoles ont décidé de boycotter cet accord et de faire de la résistance contre le géant Ferrero. Reportage d'Alban Mikoczy, Florence Crimon, Laysa Ainouz et Arnaud Delayre.
L'info en + : Il faut environ 5 ans aux producteurs pour produire une noisette Ferrero, ronde et parfaite. Selon l’association Slow Food, le danger réside dans la création, à court terme, d’une variété unique de noisette, destinée seulement à Ferrero.
Arnaud Delayre