Dix mois après sa victoire à l'élection présidentielle, François Hollande déçoit deux Français sur trois ! Parmi les électeurs qui ont voté pour lui au second tour, une petite majorité (55%) se montre satisfaite du président de la République, selon un récent sondage BVA pour Le Parisien.
Jamais, sous la Ve République, un chef de l'Etat n'a eu à affronter un tel désamour aussi peu de temps après son entrée à l'Elysée. Car il en va de même pour sa cote de confiance qui n'est pas en meilleur état : elle atteint 30% dans la dernière enquête TNS-Sofres pour Le Figaro Magazine.
Depuis que la confiance - ou la défiance, selon l'endroit où on se situe - envers le président est mesurée par la Sofres, c'est-à-dire octobre 1978, aucun d'entre eux, avant Hollande, n'a subi une dégringolade aussi rapide. Peut-il tirer réconfort de l'ampleur d'une chute moindre que celle de Sarkozy sur une période à peine plus longue ?
Sarkozy n'a jamais réussi à redresser la barre
Elu avec une cote de confiance de 63% en juin 2007, le précédent chef de l'Etat s'était retrouvé à 32% en mai 2008, soit un recul de 31 points en 11 mois. Arrivé, pour sa part, avec un potentiel de confiance de 55% en juin 2012, son successeur est à 30% en mars 2013, soit une perte de 25 points en 9 mois.
Avant eux, Chirac - 64% en juillet 1995 - était tombé à 32% en novembre 1996; Mitterrand, qui avait débuté son second mandat à 57% de confiance en mai 1988, avait pointé à 31%... en décembre 1991 et lors de son premier septennat, lancé en fanfare à 74% en juin 1981, il avait touché le fond, à 36%... en décembre 1984. Quant à Giscard, il n'était jamais passé en dessous de 41% et encore à la fin de son mandat.
Lesté de tels mauvais indicateurs, le locataire actuel de l'Elysée peut-il remonter la pente ? L'examen de la courbe de popularité de son prédécesseur dans les lieux permet d'en douter. A partir du moment où l'inversion de tendance s'est produite - plus de défiance que de confiance -, au tout début de l'année 2008, Sarkozy n'a jamais réussi à redresser la barre.
Certes, sa cote de confiance est remontée deux fois en 2009, de façon éphémère, au niveau de 41% mais à part cela, elle n'a cessé de dégringoler pour se fixer à 37% en mai 2012, au moment du tour ultime de la présidentielle. La défiance à son égard était alors à 60% : elle est aujourd'hui à 66% pour Hollande !
Grâce à la cohabitation, Mitterrand y est parvenu
Remonter la pente, c'est possible. Mitterrand l'a montré pendant son second mandat. Au plus bas en décembre 1984, on l'a vu, avec une cote d'impopularité de 60%, il parvient à résorber l'écart confiance/défiance à l'approche des élections législatives de mars 1986. Et juste après c'est l'embellie : jusqu'à 61% de confiance en octobre 1986 et en septembre 1987.
Que s'est-il donc passé ? Tout simplement la cohabitation. Gagnante des législatives, la droite devient majoritaire à l'Assemblée. Mais au jeu du chat et de la souris, Chirac, premier ministre, se fait ballader par Mitterrand, président de la République. De plus, l'application du programme économique de la nouvelle majorité ne passe pas dans l'opinion publique.
La cohabitation - inenvisageable sérieusement avec le quinquennat, sauf dans l'esprit de Patrick Buisson - serait-elle donc une garantie de redressement pour un chef de l'Etat en mal de popularité ? Pas le moins du monde. Mitterrand en a fait aussi la démonstration entre 1993 et 1995.
Plombée depuis octobre 1991, la cote de confiance du premier président de la République de gauche de la Ve République n'est jamais revenu dans le positif jusqu'à la fin de son second mandat, en mai 1995. Même pas avec l'arrivée de Balladur à Matignon, après la nouvelle victoire de la droite aux législatives de mars 1993. Enseigné par l'expérience Chirac, Balladur ménagea Mitterrand qui achevait son parcours politique.
Seule compte vraiment la courbe du chômage
Pour Hollande, président dont l'impopularité n'est pas tout à fait de même nature que celle de Sarkozy, on l'a déjà vu, 2013 est une année périlleuse. Les cartes à sa disposition pour restaurer son image dans l'opinion sont peu nombreuses. Et il ne peut guère tabler que sur la politique intérieure pour opérer ce redressement aléatoire.
Le décryptage de la légère amélioration de son image enregistrée lors du lancement de l'intervention militaire française au Mali montre que cette embellie est courte et fragile. En effet, même si elle reste majoritaire, la proportion de Français soutenant l'opération Serval est en voie d'effritement.
Seul des résultats tangibles - libération des otages, élimination ou rédition des chefs terroristes, absence de pertes militaires importantes - pourraient, éventuellement, stopper ou ralentir la chute de cote de confiance de Hollande.
Mais, à l'évidence, c'est sur le front intérieur que se fera, ou ne se fera pas, ce redressement. Ecrasée par le poids de la crise qui ne lui donne aucune perspective, l'opinion publique attend des signaux positifs sur le front de l'emploi. Mais comme soeur Anne, elle ne voit rien venir.
Avec les prévisions de croissance qui sont maintenant dans les tuyaux et les économies sur les dépenses de l'Etat qui vont être encore annoncées, il est déjà écrit que la situation du chômage ne s'améliorera pas cette année. Il risque bien d'en être de même de la cote de confiance du président de la République qui, dit-on, ne gouverne pas en fonction des sondages. Comme disait aussi l'entourage de son prédécesseur !