La fin de la sieste

@Emma Defaud

"-Rha, la sieste des enfants, ce bonheur. C'est le seul moment où je peux faire quelque chose pour moi dans la journée", m'a confié une copine.

C'est vrai ça, je pourrais lire, prendre un bain moussant ou, soyons fous, faire l'amour. Mais moi, j'ai un peu honte de l'avouer, le week-end, entre 13 et 15 heures, je dors. Pour tous les matins où ma fille se glisse dans notre lit, toutes les nuits où mon fils tousse, toutes les soirées où on n'a pas été "raisonnables", c'est-à-dire qu'on a osé se coucher après 23 heures. C'est un peu la lueur du phare que je ne quitte pas des yeux lors de la tempête matinale - parc par tous les temps, cris, caprices, déjeuner "mange-tes-légumes", "t'accroche pas aux rideaux", "n'éborgne pas ton frère", etc. Je regarde l'heure avec une impatience que je n'ai ressentie à aucun rencard amoureux ni à la fin d'une journée de boulot. Passées 13 heures, je peux décemment les foutre au lit, m'écrouler en toute élégance et baver sur mon oreiller.

Le problème de la sieste, c'est qu'un jour, elle prend fin. Et tout ce que je viens de raconter, je peux désormais le mettre au passé.

Il y a toute une période où on ne veut pas y croire. On se dit que c'est passager. L'excitation, le printemps, la nounou qui la fait trop dormir. Mais non. Alors que mon fils de 5 ans était encore capable d'écraser au moins un jour dans le week-end, la pépette de 26 mois (pour ce genre de détails, on compte en mois) avait déjà tourné la page.

Dalva, elle est née avec une catégorie de piles dont Energizer et consorts cherchent désespérément la formule. Certains craignent les pédophiles ou les enlèvements pour rançon. Moi, la seule chose que je redoute, c'est qu'on kidnappe ma fille pour percer le secret de sa batterie inusable.

Et désormais, me voila en haute mer avec mon lapin Duracell.

L’heure des parents - le stress de la mère indigne

Petit coup d’oeil sur l’horloge de l’ordinateur. j’ai encore le temps de faire un tour sur Facebook, finir mon article et écrire un ou deux mails pour préparer la journée de boulot de demain, ensuite zou, je vais chercher les gamins.
Cinq minutes plus tard, je vérifie l’heure et... c’est un quart d’heure qui s’est écoulé. Mon rythme cardiaque s’accélère brusquement, mon front se couvre d’une fine pellicule de transpiration. Putain, je vais être (encore) en retard à l’école.

Je saisis mon sac et mon manteau, je cours prendre le métro. A chaque station, je fixe intensément l’heure sur mon portable afin de ralentir de rythme des minutes. Je maugrée, je m’insulte, je gigote nerveusement. J’ai très envie de me mettre une tape derrière la tête mais mon comportement inquiète suffisamment mes voisins.

@Olibac / Flickr

J’arrive à l’école hors d’haleine, en claudiquant, avec des auréoles de transpiration sous les bras. Je me promets de jeter mes pompes à talons au feu et de ne plus acheter que des chaussures plates. La moitié de mes cheveux est collée au visage par la transpiration, l'autre follement dressée tout autour de ma tête. Pour un peu, la gardienne me chasserait en disant que la mendicité n'est pas autorisée dans l'enceinte de l'établissement.

Le pire, c'est encore d'arriver après un pot et d'expliquer, l'haleine empestant l'alcool, que ça vous était complètement sorti de la tête que c'était à vous d'aller chercher les enfants. Evidemment, on préférera raconter qu'il y a eu un grave accident de voyageurs sur la ligne de métro ou qu'on vient de sauver une vieille dame qui faisait un malaise, voire qu'on a été témoin d'un braquage et qu'on a dû faire une déposition au commissariat. Mais ce n'est pas à la directrice de l'école pour apprend des excuses bidons de parents. Surtout trois fois dans l'année.

Il y aura de toute façon, toujours un jour où la baby-sitter qui fait une partie des retours scolaires n'aura pas eu mon message ou sera malade. L'angoisse d'arriver devant l'école fermée, l'enfant introuvable et la batterie du portable à plat (Oui, ça m'est arrivé il y a quelques mois). Alors autant ne pas griller ses cartouches trop vite avec la directrice.

Maestria

Morris Louis, Saf, (1959) ©hragv/flickr

Ulysse (tout à trac, en plein dîner): - Morris Louis.

Moi (genre, je m'intéresse) - Maurice Louis ? C'est un nouveau garçon de ta classe? Dis donc, ça s'arrange pas, cette mode des vieux prénoms.

Ulysse (consterné) - Ben non, c'est un peintre.

Moi - Ah. C'est la maîtresse qui vous a appris ça?

Ulysse (qui est peintre, je vous le rappelle) : - Oui. Il s'est inspiré de Jackson Pollock (en vrai, il a dit "il s'est aspiré de Jamson Pollock"), mais ça ressemble plutôt à des fleurs.

Je savais bien que, s'il me traversait l'esprit d'aider mon fils à l'école, un jour arriverait où je ne serai plus en mesure de suivre son programme de maths avec des vecteurs et des équations à 3 inconnues. Mais je n'avais pas imaginé me faire sécher sur place en moyenne section de maternelle.