La fin de la sieste

@Emma Defaud

"-Rha, la sieste des enfants, ce bonheur. C'est le seul moment où je peux faire quelque chose pour moi dans la journée", m'a confié une copine.

C'est vrai ça, je pourrais lire, prendre un bain moussant ou, soyons fous, faire l'amour. Mais moi, j'ai un peu honte de l'avouer, le week-end, entre 13 et 15 heures, je dors. Pour tous les matins où ma fille se glisse dans notre lit, toutes les nuits où mon fils tousse, toutes les soirées où on n'a pas été "raisonnables", c'est-à-dire qu'on a osé se coucher après 23 heures. C'est un peu la lueur du phare que je ne quitte pas des yeux lors de la tempête matinale - parc par tous les temps, cris, caprices, déjeuner "mange-tes-légumes", "t'accroche pas aux rideaux", "n'éborgne pas ton frère", etc. Je regarde l'heure avec une impatience que je n'ai ressentie à aucun rencard amoureux ni à la fin d'une journée de boulot. Passées 13 heures, je peux décemment les foutre au lit, m'écrouler en toute élégance et baver sur mon oreiller.

Le problème de la sieste, c'est qu'un jour, elle prend fin. Et tout ce que je viens de raconter, je peux désormais le mettre au passé.

Il y a toute une période où on ne veut pas y croire. On se dit que c'est passager. L'excitation, le printemps, la nounou qui la fait trop dormir. Mais non. Alors que mon fils de 5 ans était encore capable d'écraser au moins un jour dans le week-end, la pépette de 26 mois (pour ce genre de détails, on compte en mois) avait déjà tourné la page.

Dalva, elle est née avec une catégorie de piles dont Energizer et consorts cherchent désespérément la formule. Certains craignent les pédophiles ou les enlèvements pour rançon. Moi, la seule chose que je redoute, c'est qu'on kidnappe ma fille pour percer le secret de sa batterie inusable.

Et désormais, me voila en haute mer avec mon lapin Duracell.