Comment réduire l'utilisation du SO2 dans les vins ?

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Les consommateurs sont de plus en plus méfiants sur le contenu de leur bol alimentaire. La médiatisation des risques inhérents aux intrants en général les inquiète, et parmi ceux-ci se trouve le SO2.

Qu'est-ce-que le SO2 ?

C'est le dioxyde de soufre ou anhydride sulfureux, appelé plus couramment soufre ou sulfites (terme indiqué sur les étiquettes).

C'est un additif alimentaire classé dans la catégorie des conservateurs, on le retrouve ainsi, en dehors du vin, dans beaucoup de préparations issues de l’agroalimentaire. Le problème qu'il pose aujourd'hui chez certaines personnes c'est son intolérance comme le sont le gluten et d'autres substances.

C'est l'intrant le plus utilisé en œnologie de la fin du 18ème siècle jusqu'au milieu du 20ème en raison de ses caractéristiques. C'est en effet un antioxydant et un antiseptique puissant, il a une grande facilité à se dissoudre et est d'un faible coût.

Le SO2 était utilisé comme agent blanchissant par les Égyptiens et comme désinfectant par les Grecs. Au 17ème siècle on a compris son utilité dans la stabilisation des vins alors qu'on ne soupçonnait pas l'existence des levures et des bactéries.

Le SO2 dans le vin

L'élaboration du vin est, entre autres, une histoire de fermentations et d'équilibres d'oxydo-réduction. La flore microbienne naturelle nécessite maîtrise et contrôles. Les oxydations doivent être proscrites un moment donné et le recours au SO2 pour gérer ces différentes phases n'a pas d'équivalent.

A ce jour, aucun produit ne cumule toutes les qualités du SO2 sans en avoir les inconvénients, sauf peut-être le glutathion, puissant antioxydant, qui donne des résultats très intéressants en expérimentation mais qui n'est pas autorisé par la législation actuelle de l'Union Européenne.

Quelles peuvent être les solutions ?

Ceux qui pensent naïvement qu'il suffit de supprimer le SO2 ont tort car cela n'est pas si simple, il faut une grande maîtrise et des compétences pour choisir telle ou telle technique de substitution. Rappelons qu'un vin sur lequel on n'intervient pas un minimum finit toujours en vinaigre. Alors entre la non intervention et la tentation d'aller au plus simple et au plus rapide, comme ce fut le cas dans l’œnologie d'après guerre, en utilisant le SO2 sans compter, les œnologues d'aujourd'hui estiment qu'il y a une place pour une œnologie intelligente, pragmatique et raisonnée qui s'est d'ailleurs manifestée à partir des années 70 par la diffusion de bonnes pratiques œnologiques après de nombreux travaux de recherches publiques et privées. Différentes réglementations ont ainsi vu le jour et ont abouti en 2005 à l'obligation d'inscrire la mention « contient des sulfites » sur les contenants destinés aux consommateurs, lorsque la concentration en SO2 total est supérieure à 10 milligrammes par litre. Le respect de ces bonnes pratiques a permis de réduire de 25 milligrammes par litre la teneur maximale autorisée en SO2 total pour les vins blancs, rouges et rosés.

Entre 2009 et 2013 de nombreux essais ont été réalisés sur des vins blancs, rosés, rouges et effervescents. Ces essais ont été menés en comparant trois itinéraires : le 1, qui a servi de référence, était basé sur la pratique traditionnelle dans le cadre de la réglementation autorisée. Dans le 2, l'objectif était la réduction de la teneur finale en sulfites de 50% par rapport à la référence et dans le 3, l'objectif était une teneur finale en sulfites inférieure à 10 milligrammes par litre. Les acteurs de ces essais ont décidé d'accepter une évolution du profil organoleptique des vins mais de n'accepter aucun défaut caractérisé.

Résultat des essais

  • Dans l'itinéraire 2, l'objectif a été atteint ou approché. Les composés aromatiques dosés sont peu affectés sauf les thiols variétaux (composés aromatiques principaux des sauvignons) qui diminuent de façon significative. Les populations de micro-organismes sont équivalentes à la référence dans les vins jeunes. Les différences sensorielles sont acceptables mais les caractéristiques aromatiques sont parfois affectées et la question de l'évolution et de la tenue de ces vins au cours de leur conservation se pose.

  • Dans l'itinéraire 3, la quasi absence d'emploi de sulfites a permis de produire des vins dont les caractéristiques analytiques demeurent dans les normes marchandes mais la couleur des blancs et rosés est plus intense avec des nuances jaunes plus prononcées. L'acidité volatile est plus élevée, on constate une baisse des teneurs en polyphénols et anthocyanes dans les vins rouges et les populations de micro-organismes sont plus élevées à tous les stades. Du point de vue organoleptique un défaut d'oxydation est systématiquement décelé dans les vins blancs et rosés et souvent dans les vins rouges. Les arômes fruités ont disparus au profit d'autres jugés négatifs.

Cela confirme que n'effectuer aucun apport de sulfites durant l'itinéraire d'élaboration d'un vin reste encore une pratique hasardeuse. Cela n'exclut pas des initiatives individuelles sur des marchés dits de « niche ».

Prescrire ou proscrire le SO2 ? La réponse n'est pas simplement oui ou non. Prescrire avec modération est la réponse du technicien, mais est-ce à lui de répondre ? Cela dépend surtout de la demande du producteur en fonction de son objectif de vin et du marché visé.

Sans SO2 rajouté, ou très peu, reste très compliqué et très risqué. Cela dépend aussi du choix du consommateur, certains privilégient la doctrine au goût.