Entre la prise de Paris et Waterloo, il est une bataille que Napoléon n’a pas perdue : celle de la conquête d’une île – celle de son exil. Ou du moins celle du cœur de ses habitants, les Elbois. Déchu depuis un mois, celui d'avril 1814, l’empereur corse a au moins pu choisir le lieu de ses peines ; d’Elbe ou de Corfou, il a préféré celui d’où il verra son île natale.
Depuis les rochers qui surplombent les quais de Portoferraio, il prend ses aises dix mois durant dans une agréable villa qu’il modèlera à son image… tout comme l’île d’Elbe, au fur et à mesure. Prisonnier des Anglais mais aussi prince régnant du havre de paix toscan, il noircit des pages de documents. En conséquence, routes et fontaines seront créées un peu partout ; et son désir de contrôle à lui, assouvi.
Puis vient l’heure du vol de l’aigle. En février 1815, Bonaparte quitte l’île. Depuis lors, les habitants n’ont eu de cesse de raviver les mémoires impériales de son court séjour. Du coruscant monarque, on garde les effets personnels (l’ancienne villa est visitable), mais on revêt aussi chaque année des costumes d’époque lors d’une messe célébrée en sa mémoire. Alban Mikoczy, Florence Crimon et Claudia Billi sont allés voir.
L’info en + : le passage de Napoléon hante l’île d’Elbe autant qu’il la sert d’un point de vue touristique. Dès 1851, le prince russe Anatoly Demidov (qui épousa la nièce de l’empereur) fit construire une galerie ornée d’aigles et de « N » à Portoferraio. Il offrit également à Elbe une réplique du tombeau du souverain, son masque mortuaire, fait de bronze et un moulage de sa main. Une plage porte par ailleurs le nom de Pauline, en hommage à la sœur de Napoléon.
Anne Donadini