Les Tunisiens faisaient jusque-là partie des migrants qui empruntaient la route libyenne pour se rendre en Europe. Ce passage étant dorénavant plus difficile, les départs de Tunisie se sont multipliés ces derniers mois. Exceptionnellement, nous avons pu monter à bord d’un navire de Frontex qui patrouille ente la Tunisie et l’Italie.
Pour rejoindre les côtes siciliennes, non pas des bateaux gonflables mais des embarcations en bois. A leur bord ce sont presque uniquement des hommes, souvent jeunes. Tous sont tunisiens. A la différence des migrants subsahariens, ce sont des migrants économiques fuyant le chômage endémique dans leur pays.
Selon le Forum tunisien pour les droits économiques et sociaux (FTDES), près de 8000 migrants tunisiens ont réussi à entrer irrégulièrement sur le territoire italien, plus de la moitié durant les deux mois de septembre et d’octobre 2017, où le nombre a atteint son pic. En octobre 2017 il y a eu presque 20 fois plus d’arrivées de migrants tunisiens par rapport à l’année précédente.
Certains d’entre eux ont passé plus de 24 heures sur des barques vétustes. Ils sont souvent déshydratés, affamés, souffrent du mal de mer. A visage caché, un migrant tout juste rescapé raconte : « Dans le bateau il y a l’eau qui rentre, le moteur qui ne marche pas bien, on ne sait pas où on va aller, on est en pleine mer. Heureusement que vous êtes là, sinon on est tous morts ».
Parmi eux il y aurait-il des repris de justice, voire des terroristes islamistes ? Difficile de répondre à ces questions car aucun d’entre eux n’a de papiers.
L’homme interviewé assure en tout cas « on n’a rien à voir avec ces trucs de terroriste. On n’est pas des méchants ! On est des gens normaux. On est là pour travailler. Les gens ils ne trouvent pas à manger là-bas. On est là pour vivre, c’est tout. »
Certains des migrants tunisiens ont déjà tenté plusieurs fois de rejoindre les côtes italiennes dans l’espoir de vivre en Italie et plus souvent encore en France.
Au cours des quatre sauvetages que nous avons suivi, seule une fois se trouvaient des femmes à bord, deux adolescentes et leur mère. « La France me plaît beaucoup. Là-bas le niveau scolaire est bon », raconte pleine d’espoir une des jeunes filles. « J’aimerais beaucoup vivre en France le plus longtemps possible, c’est mon rêve ! Faire des études pour choisir un bon métier ».
Une fois arrivés sur les côtes siciliennes, ils sont confiés aux autorités italiennes. Depuis le début de l’année, seul un tunisien sur quatre arrivé illégalement a été renvoyé dans son pays. En moyenne 80 migrants sont expulsés de l’Italie par semaine.