Les collaborateurs parlementaires, ce sont ces petites mains qui aident au quotidien leur député. Mais saviez-vous qu’un collaborateur peut être en même temps médecin, professeur ou chef d’entreprise ? Travaillent-ils vraiment, et dans quelles conditions ?
L’Assemblée nationale a publié la liste des 2 070 collaborateurs parlementaires.
Comme la loi l’autorise, ils sont nombreux à avoir d’autres activités. Le député Jean-Marie Sermier a embauché son épouse Patricia Sermier. Viticultrice jusqu’à la fin de l’année dernière, elle est collaboratrice parlementaire mais aussi comédienne.
Elle explique ce double emploi : "Mon mari ne s’est jamais caché de me salarier. Je viens tous les matins, je repars tous les soirs. Il n'y a rien de fictif, il y a du travail au quotidien."
Le député Yves Jégo a lui embauché son épouse Ann-Katryn Jégo. Elle cumule beaucoup d’activités. Elle est conseillère en communication. Elle est aussi conseillère de Paris et siège au conseil d’administration de la Tour Eiffel, de l’office de tourisme, de la commission de contrôle de l’électricité. Elle est aussi bénévole pour des associations et... collaboratrice parlementaire. Elle travaille 25h par semaine pour environ 3 400 euros nets. Un cumul et un salaire qu'elle assume : "Moi je ne travaille pas à plein temps à l’Assemblée. Quand on fait de la politique, on travaille le week-end et le soir souvent, c’est une organisation de vie. On peut me reprocher d’être hyperactive. Oui je le suis, j’ai toujours beaucoup travaillé."
Collaboratrice parlementaire … en arrêt maladie
Ce cumul peut-il mener à des dérives ? A Avignon, la députée s’appelle Michèle Fournier-Armand. Elle a embauché sa nièce, Valérie Franco. Dans un article du Dauphiné, elle précise le travail de son assistante : "2h31 par semaine payé 281 euros pour tenir la permanence, taper quelques lettres de temps en temps, me mener quelque part en rendez-vous. Elle a même fait le ménage à la permanence."
Pourtant, dans l’entourage professionnel de la députée, on dit ne l’avoir vu qu’une seule fois, "et je ne l’ai plus revue de ma vie. Quant à la permanence, je ne l’ai jamais vue tenir quoi que ce soit, en plus de ça elle n’est même pas au fait. Si vous l’interrogez sur le travail parlementaire, elle ne sait rien."
La nièce de la députée a aussi un autre emploi à temps-plein, à l’office HLM. Son président, en poste depuis plus d’un an, affirme ne pas avoir été au courant de cette double activité : "Quand M. Bartolone a décidé de son propre chef de mettre en ligne la liste de tous les collaborateurs parlementaires de France, on a découvert que Mme Franco était dans cette liste, quel n’a pas été notre étonnement !"
Passé l’étonnement, le président lance une enquête administrative. Il découvre que cette employée est en arrêt maladie depuis le 1er juillet 2015. Comment alors expliquer qu’elle ait travaillé pour la députée ? Nous avons sollicité Michèle Fournier-Armand. Elle refuse une interview mais accepte de nous rencontrer. Elle affirme que tout a été fait dans les règles : "Ma nièce a travaillé le temps où elle n’avait pas d’arrêt de travail (...) je ne peux pas vous dire précisément les dates de tête." Selon nos informations, la député aurait versé à sa nièce, en plus de son salaire, une prime en octobre 2015. A cette date, elle était en arrêt maladie. Nous l’avons sollicité… Pas de réponse.
Un fils collaborateur parlementaire et employé à la MSA
La députée a également embauché son fils, David Fournier. Il est employé à temps plein à la Mutualité sociale agricole, adjoint à la mairie d’Avignon. En plus d’autres mandats, il est collaborateur parlementaire. Pour quel travail ? La députée précise : "Ce sont des rendez-vous à la permanence, des représentations, il m’emmenait quand il y avait des dépôts de gerbes."
Un contrat de 10h par semaine, rémunéré 1200 euros bruts. Sans compter plusieurs primes, dont celle-ci, versée en juin 2016, une somme de 2500 euros. Dans l’entourage de la député, on s’étonne : "Il travaille où ? Jamais je me suis posé avec lui sur un sujet parlementaire. Jamais, jamais, jamais." Nous avons rencontré David Fournier. Il affirme que son travail d’assistant parlementaire est bien réel.
Après avoir publié la liste de tous les collaborateurs des députés, le président de l’Assemblée nationale assure réfléchir à un contrôle de toutes leurs activités. Cette réforme verra-t-elle le jour ? L’oeil du 20h vous le dira !