G7, Episode #4 et fin : la vie reprend ses droits

La vie reprend ses droits à Biarritz - Anne-Claire Ruel

Pendant toute la durée du G7, Anne-Claire Ruel, notre blogueuse spécialiste de communication se trouve à Biarritz. Elle nous décrit l'envers du décor de ce sommet, côté habitants : des formalités d'obtention du sésame pour circuler à l'arrivée des premières délégations, voici le récit, en plusieurs épisodes, de cette petite épopée. 

EPISODE 4

Lundi 26 août, 16h.

Dernier jour de garnison. Le G7 s'achèvera ce soir. Nous sommes lundi et cette fois la plupart des commerces sont vraiment fermés. C'est une ville fantôme qui s'offre à nous. Quelques personnes s'agglutinent près des barrières en face du passage permettant d'accéder à l'Espace Belleville. Certains attendent mais ne savent pas pourquoi. Un CRS goguenard interpelle un passant : "C'est le premier ministre japonais qui doit partir. Vous connaissez son nom ? Alors circulez !". Réfléchissons. Comment faire pour tenter d'apercevoir les chefs d'État avant qu'ils ne regagnent tous leurs contrées étrangères ? Je détourne les talons, direction la pâtisserie Miremont qui a un accès direct sur l'Espace Bellevue. À l'intérieur, trois biarrots font déjà le guet, téléphones portables à la main. Des policiers en tenue arrivent : c'est l'heure du goûter. Je m'assieds. Je commande un café et un "béret basque", une sorte de petit gâteau arrondi au chocolat avec une feuille d'or sur le sommet. Je souris, c'est sûr qu'avec cette couverture, impossible de penser que je suis un agent du Mossad infiltré. Confortablement installée sous le lustre et les boiseries, mon "contre-G7" n'est définitivement pas pour aujourd'hui. Face à nous, la caméra est toujours installée sur sa grue. Au-dessus du palais, les snipers, casquettes et chapeaux vissés sur la tête, nous saluent. Visiblement, nous les amusons. La patronne lance : "Ils viennent ici manger des pâtisseries !". Une voiture bardée de drapeaux français et américain fait son entrée. Trump va-t-il partir ?

L'attente se poursuit encore et encore. Pas un mouvement. Et puis tout à coup, les hommes du RAID en noir, cagoulés avec casques et boucliers surgissent et passent le portail de l'entrée. Un homme près de l'arche montre à un autre le trajet pour aller jusque dans la voiture. Une nuée de journalistes passent sur le côté en sortant du bâtiment.

Quelques minutes plus tard, une fois tout ce petit monde évacué, une femme blonde massive à queue de cheval, costume noir, chemise blanche, aux gestes très assurés, fait signe à la sécurité : "C'est la cheffe du protocole de Trump. Elle est venue ici. Un caractère bien trempé". Au loin, le phare reste imperturbable face à cette chorégraphie millimétrée. Cinq minutes s'écoulent, la première voiture part et dans la suivante, cachée derrière le rideau blanc de l'entrée, Donald Trump que l'on peut apercevoir derrière les vitres teintées de sa voiture. En passant à côté de la foule attroupée, il fera un petit signe de la main aux résidents venus observer le ballet. Et là, stupeur, à peine Trump parti que le chef brésilien Raoni venu pour l'alerter les chefs d'État sur les feux ravageant l'Amazonie, arrive, immanquable avec sa jolie coiffe jaune, à nulle autre pareille.

Bientôt Emmanuel Macron fera une intervention diffusée à la télévision. Je décide de traverser la cité balnéaire pour me rendre à l'Hôtel de Ville où Christophe Castaner et Brigitte Macron sont présents. La femme du président vient d'essuyer les propos abjects du président brésilien. En chemin, les forces de l'ordre sont une nouvelle fois omniprésente. Un homme du service de déminage, demande à une habitante : "C'est par là la Cathédrale ?". Je ris intérieurement. On lui dit ou bien ? Il n'y a évidemment pas de cathédrale à Biarritz. Plutôt amusant d'ailleurs de voir que les policiers déployés n'avaient aucune idée de l'endroit où ils étaient postés. J'arrive à proximité. Près du centre de presse installé au Casino, des portiques de sécurité ont été déployés. Le nombre de caméras au mètre carré s'est accru. Certains journalistes traînent déjà leurs valises. Une petite foule est amassée. À l'intérieur de l'Hôtel de Ville, on entend applaudir. Puis sortiront tout un tas de gradés précédant le Ministre de l'Intérieur, Christophe Castaner. Les applaudissements sont sporadiques. Il salue la foule avant de s'engouffrer dans sa voiture.

Surgit ensuite Brigitte Macron, chemise blanche, veste noire, élégante, la foule l'appelle. Elle semble partir. La foule déçue se met à huer. Souriante, elle reste pour dire quelques mots aux habitants avant de repartir. Il est l'heure, explique-t-elle. Elle est évacuée. Je pars aussi. Dans une petite rue traversière, un camion et les hommes du RAID cagoulés qui s'y engouffrent. D'un seul coup la sécurité s'est relâchée.


On peut traverser plus facilement les rues, les CRS ne bordent plus l'église face aux Halles. Non loin, un tag m'arrache un sourire : "Ni G7, ni jet set". Les biarrots ont un message pour le monde entier. Il n'a pas été effacé depuis hier. Je m'installe au Chistera, connu pour sa cuisine basque. Bientôt rejointe par une nuée de journalistes. Leur travail est terminé. Ils peuvent maintenant décompresser. Les petits bars encerclant les Halles sont bondés et animés. La tente installée pour le passage de la zone bleue à la zone rouge est toujours là, mais les CRS sont désormais absents. C'en est presque bizarre. C'est terminé. Comment vivre désormais sans le RAID ? Je m'étais habituée. Je souris. Le G7 est définitivement achevé. La vie reprend son cours.

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Publié par Anne-Claire Ruel / Catégories : Actu