Arbres abattus : les sanglots longs des violons

Depuis fin octobre, ils font feu de tout bois pour donner une seconde vie aux épicéas rouges. En Vénétie et dans le Trentin, les habitants et les gardes-forestiers digèrent avec amertume l'hécatombe de centaines de milliers d'arbres précieux sur les versants des montagnes des Dolomites.

Car le bémol est là : cette forêt décimée sert depuis plus de 500 ans à la construction d'instruments de musique de grande valeur. Les plus grands maitres luthiers - Stradivarius, Guarneri et Amati - ont trouvé dans cette espèce d'arbres résineux le secret de leurs plus beaux violons : le bois est particulièrement léger et la fibre d'une régularité rare, que l'on trouve moins sur les épicéas français ou suisses.

Pour éviter une pénurie de bois aux luthiers du monde entier, les artisans du nord-est italien ont orchestré un recyclage urgent des épicéas effondrés. Fabio Ognibeni donne la cadence : en 8 mois, il devra récupérer trois fois la quantité de troncs qu'il stocke normalement en un an. Reportage d'Alban Mikoczy, Anne Donadini, Manuel Chiarello, Florence Crimon et Laura Tositti.

L'info en + : Depuis la mort de leur créateur en 1737, il reste environ 600 violons Stradivarius dispersés dans le monde, le plus cher de tous restant le Lady Blunt, vendu à 11 millions d'euros il y a sept ans.

Anne Donadini.