Dissoudre pour cohabiter : dernière cartouche pour François Hollande ?

Crédits: francetvinfo

Parfois la stratégie du pire semble -à défaut d’apparaître d’emblée comme la meilleure-, la seule stratégie envisageable. Il n’y aurait pas d’autre "alternative". T.I.N.A, comme disait Mrs Thatcher, "There Is No Alternative".

 

Les Français, dans leur grande majorité, refusent désormais de soutenir l’exécutif, ne faisant –presque- plus de différence entre François Hollande à 13% de satisfaits et son Premier ministre qui, en un mois, perd 14 points à 30% (Sofres). Les Français attendent autre chose. Aujourd’hui, ils l’expriment dans les sondages, mais demain, si rien ne change, que feront-ils ? Le pouvoir doit réagir, prendre des décisions efficaces montrant qu’il a bien reçu ce n-ième message des Français. Le statu quo n’est plus une conduite, le compromis ne suffit plus. Le « ni-ni » ne marche plus, la politique « tango » (un pas en avant, deux pas en arrière) ruine le pays… Il faut agir et agir vite.

Pourquoi la dissolution, en conduisant à la 4° cohabitation de la V° République pourrait être la seule solution pour François Hollande?

 

1. Cohabiter pour gagner ?

Chaque fois qu’un président de la République a laissé l’opposition gouverner, son Premier ministre en a souvent payé les pots cassés lors de l’élection qui a suivi. Jacques Chirac (cohabitation en 1986-1988) comme Lionel Jospin (1997-202) en savent quelque chose, leur camp a perdu la présidentielle qui a suivi, François Mitterrand a gagné contre Jacques Chirac en 1988 et Jacques Chirac a gagné contre Lionel Jospin en 2002. Seul bémol, Balladur a lui aussi perdu, mais cette fois, la droite et Jacques Chirac l’ont emporté.

2. Cohabiter pour laisser l'opposition gérer une crise insoluble pour l'exécutif en place

Rien ne marche, semblent dire les Français qui attendent du concret et ne voient pas se réaliser les annonces de début de mandat. L’inversion de la courbe du chômage, le redressement des comptes, paraissent des chimères. Les tandems Hollande-Ayrault puis Hollande-Valls ne semblent pas avoir prise sur les évènements, ils n’ont pas mobilisé les bons outils pour stopper l’hémorragie, aucun signe encourageant n’est là pour rassurer. Il faut donc changer d’équipe, pour voir si d’autres stratégies ne seraient pas plus efficaces en laissant la droite faire une vraie politique de l’offre (voir notre blog du 28/04/2014 Gouvernement Valls : une politique de l’offre en trompe l’œil ?).

3. Un gouvernement de droite serait -en théorie-plus légitime pour faire une vraie politique de l’offre

Que l’on soit pour ou contre une politique de l’offre n’est pas le problème ici. La question est : si on souhaite la tester, laissons faire ceux dont c’est la spécialité (sur le papier). Si Manuel Valls ne parvient pas à la mettre en place, c’est bien parce qu’une partie de la gauche ne l’accepte pas.

4. François Hollande pourrait « laisser faire » une politique de l’offre sans avoir à la cautionner

A l’image de François Mitterrand en 1986-1988 qui avait placé Jacques Chirac sous surveillance, François Hollande pourrait laisser la droite appliquer un programme économique plutôt favorable à l’offre (les entreprises d’abord), tout en intervenant régulièrement pour défendre une politique keynésienne (la demande et les ménages d’abord) et donner ainsi des gages à la gauche.

5. Obliger la droite à cohabiter est un moyen de l'affaiblir de l'intérieur

Le choix d’un Premier ministre créerait –à n’en pas douter- une certaine zizanie à droite. Les leaders aux ambitions présidentielles pourraient refuser de s’engager, par peur de futures retombées électorales négatives. Certains électeurs pourraient en effet interpréter cela comme une compromission.

6. Obliger la droite à cohabiter est un moyen de l'affaiblir de l'extérieur

En prenant les rennes, la droite serait sous les feux croisés des critiques de la gauche et du Front National. Situation périlleuse si l’on se réfère aux derniers sondages qui accordent 28% à Marine le Pen au premier tour d’une Présidentielle qui se jouerait aujourd’hui.

7. Une stratégie crédible ?

Oui, si François Hollande peut bénéficier du même vent favorable que celui qui a profité à François Mitterrand en 1986-1988 et Jacques Chirac en 1997-2002. Le premier était passé de 39% en mars 1986 à 54% la veille de la présidentielle de 1988 (+15 points). Le second était passé de 31% en avril 1997 (lors de la dissolution) à 47% en avril 2002 (+16 points, sondages Ifop-JDD).

Non, car aujourd’hui la cote de François Hollande est deux à trois fois plus faible que celle de ses prédécesseurs. A 17% de satisfaits (Ifop-JDD août 2014 et même, 13% selon la Sofres 5/09/2014) François Hollande ne semble plus avoir le socle de soutien suffisant dans son propre camp, ce qui pose un réel problème.

8. Un piège qui pourrait se refermer sur celui qui l'a tendu

On ne peut pas exclure l’hypothèse d’une cohabitation de type Mitterrand-Balladur. Le Premier ministre en parvenant à assainir l’économie, était devenu plus populaire que le président de la République et avait ainsi favorisé la victoire de son camp à la présidentielle de 1995.

 

 

En conclusion, François Hollande peut certes rester comme il en a exprimé l’intention récemment. Personne ne peut l’obliger à la démission, pas même une dissolution. Elle peut servir d’arme stratégique à court terme … mais pas pour 2017. Rien ne garantit que François Hollande et la gauche puissent rebondir … gare à l’arroseur arrosé !