Commémorations du D-Day : de la dimension internationale de François Hollande

Château de Benouville Francetvinfo

 

 

Les célébrations du 70eme anniversaire du débarquement en Normandie ne sont pas achevées que l’on peut déjà avancer que ce fut un bel évènement. La France et son Président ont su faire de cet anniversaire un évènement mondial, attendu depuis la célébration du cinquantième anniversaire lorsque François Mitterrand invita 13 chefs d’Etat et de gouvernement.

Poser la question de l’impact de l’évènement sur la popularité du Président de la République serait déplacé et irrespectueux.

La cérémonie a été organisée pour rendre hommage aux vétérans et à tous ceux qui furent les acteurs courageux de ce moment historique. Et il ne vient à l’idée de personne de penser différemment.

Cependant, on pourrait laisser un peu de côté une démarche « normative », qui cherche à dire « ce qu’il faut faire », et lui préférer une approche qui regarde « ce que l’on fait » et qui en envisage les conséquences. Cette approche est qualifiée en jargon politico-économique de démarche positive  (ou normative as positive). Il s’agit là de souligner  que l’on s’attache à ce qui est, et que l’on emprunte nécessairement une démarche critique mais la plus objective possible.

Nous pouvons ainsi nous autoriser, dans cette perspective d’analyse dite positive, à envisager les conséquences pour l’image présidentielle 

Des observateurs ont déjà posé la question de savoir si la popularité de François Hollande pourrait en être favorablement affectée. Ils ont plutôt répondu par la négative, disant que si effet bénéfique il y avait, il ne pourrait être que de très courte durée, quelques jours tout au plus.

Nous n’ajouterons pas un commentaire à ces commentaires. Nous préférons faire reposer notre réflexion sur des faits passés avérés et tenter d’en tirer des enseignements pour l’avenir.

Mise en perspective des popularités présidentielles passées

La France n’a que progressivement marqué l’évènement. Il y a eu une « montée en puissance » dans la commémoration : attitude de De Gaulle vexé et en froid avec les alliés, préférant se rendre en Provence en juin 1964 ; proximité avec l’évènement faisant que les blessures étaient encore ouvertes et que les populations n’étaient pas encore passées au stade du souvenir.

En 1974, la dimension historique s’affirme avec des reconstitutions historiques en témoignage. La France vient de perdre Georges Pompidou (le 2 avril) son nouveau Président, Valéry Giscard d’Estaing, tout juste élu depuis le 19 mai n’ira pas au-delà dans le souvenir.

1984 va marquer un tournant, François Mitterrand invite 7 chefs d’Etat dont Ronald Reagan et la Reine d’Angleterre. Le faste des cérémonies du 40 ème anniversaire est souligné par tous les observateurs. La popularité (IFOP) du Président de la République n’en sera pas affectée, à 31,5% en mai elle restera stable en juin.

 

En 1994, François Mitterrand invite cette fois 13 chefs d’Etat dans un esprit de réconciliation européenne. Réconciliation qui sera « achevée » dix ans plus tard lorsque Jacques Chirac invitera le Chancelier Gerhard Schröder, ce qui sera l’occasion d’une accolade historique. Et, pour la première fois, Vladimir Poutine comptera parmi les invités.

Depuis ces dates, on note que les popularités comparées de juin et mai ont toutes marqué un saut positif. D’un point seulement pour François Mitterrand en 1994 (de 45% à 46%), de deux points pour Jacques Chirac (43% à 45% de satisfaits). On pourrait aussi faire observer qu’en 2004, à l’occasion du 65ème anniversaire, Nicolas Sarkozy gagnera 3 points. Si l’évènement avait été fastueux, il y avait eu aussi un couac retentissant, l’Elysée ayant « oublié » d’inviter la Reine d’Angleterre.

Mise au point utile

Il serait illusoire et risqué de tirer de ces observations que ces commémorations sont à elles seules responsables de l’évolution de la popularité des Présidents. Tout au plus peut on affirmer que cela à participé avec d’autres éléments -dont la situation économique – à conforter le plus souvent une cote qui s’établissait entre environ 30% et 40% de satisfaits (Ifop). En 1984 la croissance n’était que de 1,5%, contre 2,1% dix ans plus tard et 2,3% en 2004. En 2009, crise internationale oblige, la croissance du PIB fut négative à -3,1%.

Ces évolutions économiques contrariées laissent à penser qu’il reste une place pour d’autres éléments- dont les commémorations-  afin de justifier des popularités globalement moins erratiques.

On sait pour l'avoir mesuré sur séries longues, qu'en moyenne l'économie pèse pour 60% dans la popularité du chef de l'Etat contre 25% pour les affaires intérieures et 15% pour l'international.

 Que peut-on « laisser espérer » au Président?

Un rebond de popularité ? rebond bien mérité par son engagement sans compter lors de cet évènement et son initiative diplomatique favorisant le dialogue Poutine-Porochenko et –de façon plus anecdotique – un bref échange Poutine-Obama, ce qui fut un progrès comparé à l’attitude d’ignorance polie du début de journée.

Ou doit-on malheureusement envisager que sans embellie économique la diplomatie et la dimension internationale seront sans effet durable sur la popularité du chef de l’Etat ?

A tout le moins, il aura eu l’occasion de soigner son image, de prouver que dans certains domaines, il peut être un véritable chef, seul aux commandes. On a peu vu les membres du gouvernement, et c’est en parfaite logique avec les statuts. Le 6 juin aura au moins eu cet avantage de rappeler quelques uns des principes de la V°, le Président préside en arbitre, la diplomatie est son « domaine réservé »,  quand le Premier ministre conduit les affaires intérieures.

Capitaliser sur la dimension internationale de l’image

 Si François Hollande parvient à « capitaliser » sur cette image internationale et accepte de rester en retrait des affaires courantes en exposant un peu plus son Premier ministre encore protégé –pour l‘heure- par une popularité confortable dépassant les 50% , alors il a peu être une chance d’inverser légèrement la courbe …de sa popularité.

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