Mars 2018…
La France est désormais un État de non droit dans lequel les pauvres ont pris le pouvoir. Certains parlent de guerre civile, d’autres d’anarchie. La réalité, c’est qu’il n’y a plus aucun contrôle politique sur les comportements humains, ceux-ci se régulant selon les seules loi de la biologie : chaque individu n’agit plus que pour assurer sa propre survie. Nous sommes entrés dans une nouvelle ère consistant à tenir tête aux structures en place, à faire plier les puissants.
Personnellement, je préférais le système précédent qui était encore en vigueur en 2017 et que l’on appelait démocratie ; la vie y était tout de même beaucoup moins anxiogène.
Comment tout à basculé ?
C’est « l'affaire Fillon » qui a été l’évènement précipitant. Mais la population française bouillonnait déjà depuis quelques années en réaction aux immoralités de Cahuzac, Sarkozy, Balkany, Lagarde, pour ne citer que les plus célèbres.
Les gens n’étaient pas naïfs, ils savaient bien qu’il existait une vie sociale à deux vitesses, que les richesses n’étaient pas partagées équitablement, que certains étaient les Héritiers corrompus d’une élite possédant un nombre de crédits de pouvoir bien supérieur au leur.
Donc bien avant mars 2018, les gens savaient. Pourtant, ils continuaient à vivre comme d’habitude, à payer leurs impôts, à être honnête, à respecter les règles. Même si quelques-uns se plaignaient, manifestaient parfois, ils ne passaient pas à l’acte au point de faire basculer le système. Alors comment expliquer cette mise en action d’une révolte nationale similaire à celle que la France a connu en 1789 ? Qu’est-ce qui fait qu’une population tombe au point d’abandonner ses routines pour préférer l’anarchie ?
Un peu de science du comportement pourra nous aider à mieux comprendre cette levée des foules…
Les déterminants environnementaux des comportements antisociaux
Jusqu’à récemment, les gouvernements successifs ont donc été suffisamment malins pour maintenir la population dans un cadre social relativement calme et sous contrôle. Comment s’y prenaient-ils ? Tout simplement en nous donnant l’illusion que nous aussi, les modestes, avions accès à certains privilèges. Car les débordements de foule, les révoltes, tous les comportements déviants apparaissent quand l’être humain commence à s’ennuyer. Pour distraire une population, les dirigeants de ce pays ont donc compris depuis longtemps que, pour avoir la paix, il suffisait de lui mettre à disposition quelques sources de motivation conséquentes, de remplir son planning de vie avec des attractions sélectionnées avec soin. Un Castorama par-ci, un Mac Do par-là. Vive Ikéa, la Fnac, Edouard Leclerc. Sans oublier quelques dates et évènements clés saupoudrés dans l’année : une actualité sportive d’envergure internationale, le jeudi de l’Ascension, la coupe d’Europe des vainqueurs de coupe de football. Ramadan, Yom Kippour, Noël.
Le problème, c’est que toutes ces sources de distraction, aussi alléchantes soient-elles, finissent par devenir insuffisantes si les contraintes qu’elles sont sensées compenser dépassent un certain seuil. Ce seuil a été atteint en 2017 : l’augmentation exponentielle du mal-logement, la baisse du pouvoir d’achat, les attentats terroristes et le cynisme des personnalités politiques ont fini par faire pencher la balance en faveur de la rébellion. Avec « l’affaire Fillon », nous avons dépassé le nombre critique de citoyens ayant plus à perdre qu’à gagner à vivre en respectant les lois.
En science du comportement, c’est ce que l’on appelle la « loi du matching ». Cette loi permet de conceptualiser de façon mathématique la manière dont sont distribués les coûts et les bénéfices de nos choix ; cette loi nous aide à mieux comprendre pourquoi nous nous engageons dans un comportement plutôt qu’un autre, pourquoi nous préférons telle alternative plutôt qu’une autre. Pour résumer, cette loi permet en quelque sorte de modéliser le déterminisme humain : si nous nous sommes engagés dans le chaos, c’est parce que la balance coût / bénéfice a basculé en défaveur de l’obéissance sociale.
Aujourd’hui, en mars 2018, il n’est donc plus question d’égalité, ni de fraternité, ni de libre arbitre.