En presque 20 ans, la Corée du Sud est devenue l’une des plus grande puissance économique mondiale. Une croissance si rapide se « mérite ». Dans ce pays, on peut en effet croiser :
- De nombreux élèves très brillants, qui étudient jusqu’à 15h par jour, et qui par conséquent ont peu de temps à consacrer aux loisirs, au sport et même à leur sommeil. Dès leur entrée dans le système scolaire, ils connaissent une pression sociale intense car le milieu est très compétitif. Pour eux, l’échec est vécu comme un événement très aversif.
- De nombreux salariés dévoués à leurs entreprises, travaillant en moyenne 50 heures par semaine. La réussite et l’argent sont les principales motivations de ces salariés surmenés.
En Corée du Sud, on recense en moyenne 50 suicides par jour. C’est un des plus haut taux de suicide au monde, et la première cause de mortalité chez les 10-30 ans. On a rien sans rien.
La prévention du suicide en Corée du Sud
Pour tenter de faire face à ce qu’on pourrait nommer un phénomène de société, des agences proposent aux personnes de vivre une expérience tout à fait originale : mettre en scène, de leur vivant, leurs propres funérailles. La méthode est simple, il s’agit pour la personne de simuler ses obsèques à travers un rituel constitué de plusieurs étapes : écrire son testament, rédiger une lettre d’adieu pour ses proches, se faire prendre en photo une dernière fois pour la postérité, s’allonger dans son cercueil que l’on referme pendant quelques minutes. Bref, se mettre dans la peau d’un défunt.
Cette pratique existe depuis plusieurs années et près de 50 000 coréens auraient déjà tenté l’expérience. Ce sont des agences spécialisées qui organisent ces fausses obsèques. Certaines de ces agences appartiennent d’ailleurs à des entreprises de pompes funèbres coréennes et proposent ce service gratuitement, dans le but d’améliorer leur image. Ces cérémonies sont également proposées à des salariés par leur entreprise pour les dissuader de se suicider.
Une technique de prévention efficace ?
L’idée de base des promoteurs de cet avant-goût de la mort est que celui-ci pourrait redonner goût à la vie (« en faisant l’expérience de la mort, ils prennent conscience de la beauté de la vie »). Vu le nombre important d’adeptes, on pourrait presque penser qu’il s’agit d’une solution comme une autre pour renoncer à l’envie de se tuer.
En réalité, il est difficile d’évaluer l’efficacité d’une telle pratique sur la prévention des suicides. Les seules données actuellement disponibles, à ma connaissance, sont les recueils de témoignages des personnes ayant fait cette expérience. Il semblerait que certains individus en soient satisfaits, qu’ils retrouveraient espoir… À plus ou moins court terme, on peut en effet supposer qu’un « regain de bien-être » puisse être éprouvé provisoirement, du fait de la croyance de la personne, de sa confiance en la méthode, mais surtout de l’attention rapprochée qui lui ai portée pendant toute la cérémonie et du cadre rassurant proposé par l’agence et ses croque-morts qui ont l’argument d’autorité. Mais il apparaît peu probable que la mise en scène de sa propre mort en tant que telle puisse avoir un quelconque effet thérapeutique.
Heureusement, la Corée du Sud propose d’autres formes de prise en charge pour les personnes suicidaires. Par exemple, la ville de Séoul a installé des bornes téléphoniques d’urgence mettant en contact des professionnels avec les personnes en détresse sur les principaux ponts de la capitale, lieux de suicides fréquents. Une solution de prévention provisoire, en attendant que le pays modifie son mode de fonctionnement socioprofessionnel.
Cet article est l’occasion de rappeler que le 10 septembre dernier a eu lieu en France, la Journée Mondiale de prévention du suicide.
Source vidéo : http://www.rts.ch/video/emissions/mise-au-point/5752392-suicides-en-coree-du-sud.html