L’arrestation violente de deux hommes noirs dans un café Starbucks de Philadelphie la semaine dernière suscite l’indignation et remet en lumière les problèmes de racisme aux États-Unis.
Dans une vidéo devenue virale aux États-Unis ce week-end sur Twitter, des officiers de police sont filmés en train de menotter deux hommes noirs dans un Starbucks de Philadelphie.
@Starbucks The police were called because these men hadn’t ordered anything. They were waiting for a friend to show up, who did as they were taken out in handcuffs for doing nothing. All the other white ppl are wondering why it’s never happened to us when we do the same thing. pic.twitter.com/0U4Pzs55Ci
— Melissa DePino (@missydepino) 12 avril 2018
L’un des hommes avait demandé à utiliser les toilettes du café sans rien avoir acheté. L’employé a répondu que Starbucks refusait l’accès aux toilettes aux non-clients en leur demandant de partir. Devant leur refus, l’employé a décidé d’appeler la police. Les deux hommes ont finalement été menottés, arrêtés puis détenus pendant près de neuf heures avant d'être libérés.
"Beaucoup de racisme, beaucoup de merde, le café Starbucks est anti-noir", scandaient des manifestants rassemblés, le jour suivant, devant le café pour dénoncer l’incident.
Le biais implicite aux États-Unis
Pour le maire de Philadelphie, l’incident du Starbucks reflète les préjugés inconscients qui persistent dans sa ville et dans la société américaine : "Ce n'est pas seulement un problème Starbucks. C'est un problème sociétal. Les gens peuvent réagir différemment aux autres en fonction de la couleur de la peau, et c'est mal. Nous avons du travail à faire et nous devons le faire de manière productive."
"Quand les gens appellent avec une plainte, c'est influencé par leur préjugé racial - le stéréotype qui les amène à considérer une personne noire avec plus de suspicion", ajoute quant à lui Jack Glaser, professeur de politique publique à l'Université de Berkeley.
Aux Etats-Unis, l’expression la plus tragique de ces préjugés inconscients est sans doute les centaines de cas où des policiers blancs ont tirés sur des américains noirs non armés. En 2016, une étude de la Drexel University de Philadelphie a affirmé qu’aux États-Unis, les hommes noirs avaient presque trois fois plus de risques d’être tués par une intervention des forces de l’ordre que les hommes blancs.
Le mois dernier, à Sacramento, en Californie, Stephen Clark, afro-américain de 22 ans, a été tué de huit balles dans le dos dans le jardin de sa grand-mère par des policiers qui ont cru que le jeune homme avait une arme à la main alors qu’il s’agissait de son téléphone portable.
Les entreprises cherchent des solutions
Le PDG de Starbucks, Kevin Johnson, s'est excusé lors d'une réunion privée avec les deux hommes lundi, en plus d’annoncer une nouvelle formation pour les directeurs de magasins sur les préjugés inconscients. Comme Starbucks, de nombreuses entreprises tentent de lutter contre le phenomène.
En effet, depuis les manifestations de Ferguson, dans le Missouri, en 2014, après qu'un policier blanc a tiré sur Michael Brown, un afro-américain de 18 ans, les formations de lutte contre les préjugés inconscients n’ont cessé de se multiplier.
La société Pope Consulting, basée à Cincinnati, gère des programmes de formation aux préjugés implicites pour les entreprises. La formation mise sur des exercices de découverte de soi, des questionnaires et des mises en situation.
Même si les données ne sont pas claires sur l'efficacité de ces formations, Michelle Duguid, de la Cornell University considère que l’essentiel du programme était de s'assurer que les gens apprennent que "tout le monde est partial" en offrant des moyens concrets pour atténuer ces stéréotypes.
"Cet après-midi de formation est un geste qui aidera certaines personnes à comprendre le concept des biais implicites", a déclaré Georgina Dodge, de l'Université Bucknell en Pennsylvanie, à propos du plan de Starbucks "Mais beaucoup, beaucoup plus doit être fait."
Jules Béraud