VIDEO. Venise : les portiques de la discorde

Des Vénitiens ont arraché ce week-end un portique mis en place par la ville pour gérer le flux de touristes. Ils refusent de voir Venise se transformer en "parc d'attractions". 

 

 

"Venise n'est pas Luna Park, ça n'est pas une réserve, et nous ne sommes pas en voie d'extinction" annonce la banderole exposée hier lors d'une manifestation de l'association vénitienne Morion. Une trentaine d'activistes de ce groupe de défense de Venise ont arraché un "point de passage" installé par la mairie à l'entrée d'un pont. "On ne met pas des portiques dans une ville, ce n’est pas possible, on les met à l’entrée d’un parc d’attractions, s'indigne Tommaso Cacciari, membre de l'association. Nous les démonterons autant de fois qu’il le faudra".
Quelques heures après la manifestation, le portique était déjà remis en place par la police municipale. Ces barrières, destinées à réguler les flux de touristes, provoquent la colère de certains habitants. Elles ont été installées de manière temporaire, à l'occasion du week-end prolongé du 1er mai, comme solution d'urgence pour que la ville reste vivable face à la marée humaine des visiteurs. Chaque année, 30 millions de touristes se précipitent dans la Cité des Doges. C'est 600 fois le nombre d'habitants. Les capacités d'accueil de Venise sont largement dépassées. Ne pouvant ni ne souhaitant interdire l'accès à la ville, la municipalité doit recourir à des solutions afin d'organiser le flux humain. Ces portiques sont temporaires, mais ils pourraient être réutilisés s'ils sont jugés efficaces.
 
Venise en danger ?
Les Vénitiens ont le sentiment d'être envahis par les touristes. Le démontage de ces portiques fait suite à une longue série d'actes de résistance des habitants contre les dérives du tourisme de masse. Pour protester contre le passage de paquebots gigantesques le long de la place St Marc, certains d'entre eux se jetaient par exemple à l'eau, pour leur bloquer l'accès aux abords de la place. Le gouvernement et la municipalité ont fini par trouver un accord cet hiver. Il devrait empêcher d'ici 2 ans aux plus gros bateaux de s'approcher du centre de la Cité des Doges. L'affluence touristique est-elle en train de tuer Venise ? La ville comptait 175 000 habitants dans les années 1950, ils sont moins de 50 000 aujourd'hui. C'est "l'assassinat" de leur cité que dénoncent beaucoup d'entre eux : le prix de l'immobilier a explosé, les services nécessaires à la vie quotidienne font défaut, les bâtiments se dégradent à cause du tourisme. Pour certains Vénitiens, Venise est déjà morte : elle est devenue une ville-musée.