Le soufflé est retombé. Lundi 28 mai, tout portait à croire que les efforts du président Michel Temer n’avaient pas suffi. Les camionneurs poursuivaient la grève, débutée il y a une semaine. L’essence et les produits frais manquaient dans la capitale. Mais la situation s'améliore déjà.
Ils ne bougeront pas. Au pied de la raffinerie de Rio, quelque trois cents routiers bloquent l’autoroute ce lundi 28 mai. Peinture verte et jaune sur les joues, drapeaux du Brésil à la main, ils occupent la voie dans le calme. Pas un camion-citerne rempli d’essence ne passe. Malgré les concessions politiques, les camionneurs refusent de lever les barrages. Sans carburant, c’est toute l’économie Brésil qui est bloquée. On craint la paralysie. Mais dès mardi, le retour à la normale s'amorce.
Nouvelle méthode, nouvel échec
Dimanche soir, il avait annoncé la fin de la grève. Michel Temer s’est trompé. Ou plutôt, le président a un peu trop anticipé le retour à la normale, qui commence ce mardi. Il a promis une baisse du prix de l’essence pendant deux mois, cédant aux revendications des routiers. Mais certains grévistes ont d'abord refusé de cesser la mobilisation, qui dure depuis une semaine.
Négociations avec les syndicats, envoi de l’armée, les précédentes tentatives du gouvernement pour lever les blocages ont échoué. Ici, les hommes en treillis s’alignent devant le grillage de la raffinerie, face aux manifestants. Les derniers grévistes, espérant élargir le mouvement, les interpellent. Ils demandent une intervention militaire... pour renverser Temer et mettre fin à un système politique qu’ils jugent rongé par la corruption.
Comme les moteurs, l’économie ne tourne plus
Sans diesel, l’économie est à l’arrêt. Les Cariocas ne peuvent compter sur le réseau de bus et de métro, qui ne dessert pas l’intégralité de la ville. C’est bien au volant de leur voiture qu’ils se rendent au travail. Aussi, quelques kilomètres plus loin, des dizaines de véhicules s’alignent devant la station essence. Il est 16h. Motards et conducteurs attendent depuis le lundi matin pour faire leur plein. Mais ceux arrivés devant la pompe déchantent vite : la station est à sec.
Après l’essence, les produits frais viennent à manquer. 60% de la marchandise transitent par la route au Brésil. Faute de livraison, les magasins de Rio sont touchés par la pénurie. Fruits et légumes désertent les rayons des supermarchés. Les marchés de la ville, où d'ordinaire vendeurs et clients négocient autour d'étals débordants d’épices et de fruits exotiques, offrent un tout autre visage. Lundi, quelques acheteurs déambulent, le cabas vide, entre des étals peu garnis. Les denrées restantes s'arrachent à prix d'or.
Pourtant, les Cariocas soutiennent le mouvement. Avec moins d’entrain qu’il y a une semaine. La hausse des prix agace. Les difficultés des hôpitaux inquiètent. Certains centres de santé ont prévenu qu’ils ne pourraient garantir leurs soins si la paralysie se poursuit. Les universités ferment, les aéroports annulent des vols... Après l'affolement, la situation s'améliore ce mardi, les esprits s'apaisent. A temps : les touristes eux-mêmes n'étaient plus à l'abri de la pénurie. Sur la plage mythique de Copacabana ce week-end, impossible de se procurer la coco verde, la noix de coco fraîche, boisson incontournable sous les tropiques...
Auriane Loizeau pour Fanny Lothaire