Michel Temer, le président du Brésil et six des ses collaborateurs, sont accusés de participation à une organisation criminelle. Le Chef d’Etat serait le leader de ce réseau depuis mai 2016, lorsqu’il a remplacé Dilma Rousseff, après sa destitution controversée pour maquillage des comptes publics.
C’est un nouveau coup dur pour le président brésilien Michel Temer. Pour la deuxième fois en moins de deux mois, une plainte est déposée contre lui. Après celle pour « corruption passive », c’est une mise en accusation pour « participation à une organisation criminelle » et « obstruction à la justice ». Une mesure prise par Rodrigo Janot, le procureur général de la République, le jeudi 14 septembre.
Dans son accusation, Janot désigne formellement le chef d’Etat comme le leader d’une organisation criminelle qui aurait reçu 158 millions d’euros de pots-de-vin. Dans ce réseau, six autres membres du PMDB, comme Eduardo Cunha, l’ancien président de la chambre des députés, actuellement emprisonné pour 15 ans, suite au méga-scandale de corruption Lava-Jato.
Également accusé, l’ancien député fédéral Rocha Loures, autrement appelé « l’homme à la valise ». Il est suspecté d’avoir récupéré une mallette contenant 135 000 euros de pots-de-vin, reçu du géant de l’agroalimentaire JBS, et destinée à Temer. Depuis juin, il est emprisonné de manière préventive, en attente de son jugement. Autre membre de ce réseau de distribution de pots-de-vin, l’ancien ministre Geddel Viera Lima, arrêté après la découverte de ses empreintes digitales sur un butin de 14 millions d’euros dans un appartement de Salvador de Bahia.Selon l’acte d’accusation, les politiques du PMBD auraient « pratiqué des actes illicites en utilisant de nombreux organismes public », comme la compagnie pétrolière Petrobras.. Les pots-de-vin ont notamment été versés à des politiciens pour intercéder en faveur de grandes entreprises. Le texte évoque aussi un système « monté à l'intérieur du Parlement pour vendre des mesures législatives », en négociant par exemple des amendements à des projets de loi contre des pots-de-vin.
Échapper à la destitution
Une mise en accusation qui pourrait signer la destitution du Président. Mais c’est sans compter sur le soutien dont il bénéficie et qui l’a épargné en août dernier. Alors soupçonné de corruption passive, il avait échappé à un procès grâce au sauvetage du Congrès. Plus de la moitié des députés avaient voté « non » à l’ouverture d’une enquête contre le chef d’Etat par le Tribunal suprême fédéral. Pour rappel, un enregistrement clandestin de Joesley Batista, PDG de JBS - l’une des entreprises mises en cause dans le versements de pots-de-vin dans l’affaire de corruption Lava-Jato -, incriminait Temer. Dans un dialogue avec Joesley, le Président avalisait le versement mensuel d’argent à Eduardo Cunha, pour qu’il garde le silence.
Selon les analystes, la procédure à venir a toutes les chances d’épargner à nouveau Michel Temer. Fin stratège et attaché à son siège de Président, il offre des faveurs à ses soutiens au Congrès, dont les membres sont pour beaucoup soupçonnés ou accusés de corruption. Alors, le chef d’Etat n’hésite pas à blâmer le Procureur Janot, qui « mélangerait les faits », en se basant sur des témoignages « faux et mensongers ». Temer balaye d’un revers de main toutes les accusations et affirme vouloir se « consacrer encore plus à affronter les vrais problèmes du Brésil ».
Le Président espère peut-être aussi compter sur la nouvelle Procureure générale de la République, le mandat de Janot ayant pris fin le 17 septembre. C'est Temer lui-même qui a choisi le remplaçant, comme le veut la loi. Il a nommé le second nom de la liste de trois candidats, proposée par l'association des procureurs de la République. Ce qui a provoqué quelques inquiétudes... Le numéro un, non-élu donc, étant le favori de Janot. Depuis ce lundi 18 septembre, c'est Raquel Dodge qui est aux commandes. Mais, selon les spécialistes, il n'y pas de craintes à avoir. La nouvelle procureur, particulièrement attachée aux droits humains, ne devrait pas freiner pas l'enquête Lava-Jato.
Toujours est-il que l’accusation à l'encontre de Temer, pourtant grave et compromettante, fait peu de bruit. Beaucoup moins qu’en mai dernier, quand le pays s’était figé suite aux révélations de corruption passive du Président. Mais les brésiliens semblent lassés et attendent les élections présidentielles de 2018, dans un pays où les scandales de corruption et les révélations s’enchaînent et font presque chaque jour les titres des journaux.