Pour représenter les Français installés à l'étranger, l'Assemblée nationale compte 11 députés sur les 577 qui siègent dans l'hémicycle. Contrairement aux électeurs de métropole et d'outre-mer, ceux qui vivent plus ou moins loin de la "mère patrie" commenceront à voter dimanche 4 juin, date pour eux du premier tour des élections législatives, soit une semaine avant les autres.
Est-ce l'éloignement géographique, un intérêt moindre pour la chose publique ou encore un autre motif, toujours est-il que nos compatriotes de l'étranger participent moins que ceux de métropole, en général, aux consultations électorales. Cela s'est encore vérifié lors de l'élection présidentielle. Au premier tour, la participation a oscillé entre 23,74% dans la 8e circonscription (Italie, Europe du sud, Turquie, Israël) et 55,46% dans la 4e (Belgique, Pays-Bas, Luxembourg). Loin des yeux, loin des urnes !
Actuellement, les Français établis hors de France sont représentés par quatre députés "Les Républicains" (Frédéric Lefebvre, Claudine Schmid, Alain Marsaud et Thierry Mariani), quatre socialistes (Axelle Lemaire, Philip Cordery, Arnaud Leroy et Pierre-Yves Le Borgn'), deux non-inscrits qui ont changé d'étiquette en cours de mandat (Sergio Coronado et Pouria Amirshahi, l'un des deux sortants à ne pas se représenter avec Leroy) et enfin un député centriste UDI (Meyer Habib).
Macron est arrivé en tête dans 9 des 11 circonscriptions
A l'occasion du renouvellement post-présidentiel, 184 candidat-e-s se présentent aux suffrages des électeurs, dont 83 femmes et 101 hommes. La circonscription la plus disputée est la 9e (Maghreb et une partie de l'Afrique subsaharienne) avec... 27 candidats, la seule de cette série où La République en marche, parti qui soutient le président de la République, n'en présente pas. La moins convoitée est la 10e (Afrique noire, Proche et Moyen-Orient) avec 11 candidats... seulement.
A l'aune des résultats du premier tour de la présidentielle, cette consultation pourrait apporter de profonds changements dans la représentation des Français de l'étranger. Emmanuel Macron est arrivé largement en tête dans 9 des 11 circonscriptions devant François Fillon (Les Républicains, LR), Jean-Luc Mélenchon (La France insoumise, FI), loin derrière, prenant partout la 3e place devant Marine Le Pen (Front national, FN). Pour sa part, Benoît Hamon (Parti socialiste, PS) n'a pas fait mieux qu'en métropole.
Dans deux circonscriptions, Macron a même franchi la barre des 50% dès le premier tour. Dans la 3e (Europe du Nord) où l'ancienne ministre Axelle Lemaire est sortante, il a obtenu 50,27% des suffrages. Très loin derrière lui, Fillon en a recueilli 22,04% et Mélenchon, 13,41%. Dans la 7e circonscription (Allemagne, Europe de l'Est), l'alors futur chef de l'Etat a même eu 53% des voix, soit 35 points devant Fillon (17,83%) et 40 de plus que Mélenchon (12,41%).
Vers une majorité cohérente ou vers un "contre-pouvoir"
Face à la candidate d'extrême droite, Macron n'a laissé que des miettes au second tour, réalisant des scores compris entre 81,29% - le plus mauvais ! - dans la 10e circonscription, celle de Marsaud (LR), et 94,73% dans la 3e, celle de Lemaire (PS). Un simple décalque aux législatives se traduirait par une razzia pour les "macronistes de l'étranger". Les choses sont, cependant, plus compliquées. Quasiment tous inconnus, ils vont devoir affronter des députés sortants qui cultivent leur notoriété. Soit les électeurs confirmeront leur vote des 23 avril et 7 mai, en souhaitant, de façon cohérente, donner une majorité au nouveau président, soit ils joueront la continuité, en préférant installer un "contre-pouvoir" parlementaire.
On trouvera ici le détail de la situation dans chacune des 11 circonscriptions législatives de l'étranger.
1er circonscription : Etats-Unis et Canada. Il y a 19 candidats dont 8 femmes. Frédéric Lefebvre, député sortant (LR) très actif dans la circonscription et sur Twitter, est en position délicate. Il devra compter sur sa notoriété. En effet, Roland Lescure (LREM) peut s'appuyer sur les 45,17% obtenu par Macron au premier tour présidentiel devant Fillon (21,25%).
2e circonscription : Amérique centrale et Amérique du Sud. 14 candidats et 5 candidates (la proportion la plus faible de toutes ces circonscriptions) sont en lice. Le député sortant, Sergio Coronado, soutenu par EELV et la FI, est lui aussi en position difficile. Mélenchon a fait 19,38% au premier tour, à quelques points de Fillon (26,28%) mais loin derrière Macron (37,97%) dont les couleur sont défendues par Paula Forteza (LREM).
3e circonscription : Europe du Nord. Il y a 16 candidats dont 10 femmes, soit la plus forte proportion. La situation de l'ex-ministre Axelle Lemaire, députée sortante (PS) est compromise. Comme indiqué plus haut, Macron a dépassé 50% dès le premier tour alors que Hamon faisait moins de 8%. Et il a laissé Fillon à 28 points derrière lui. Son représentant, Alexandre Holroyd (LREM) part donc avec une confortable avance.
4e circonscription : Benelux. Ce sont 9 femmes et 9 hommes qui sont sur la ligne de départ. Philip Cordery, député sortant (PS), doit remonter un lourd handicap : Hamon a obtenu 8,87%, le 23 avril, soit 30 points de moins que Macron (38,77%) qui avait lui-même 15 points d'avance sur Fillon (23,77%). Le candidat LREM, Pierre-Alexandre Anglade peut ainsi raisonnablement penser figurer au second tour.
5e circonscription : Andorre, Espagne, Monaco et Portugal. 14 candidats dont 8 femmes au départ. Challenge difficile pour Gabrielle Siry, remplaçante de Arnaud Leroy, député sortant (PS) passé à "En Marche!" qui ne se représente pas : Macron a fait 35,01% devant Fillon (26,02%) et Mélenchon (17,83%), Hamon réalisant 6,95%. Là encore, la représentante LREM, Samantha Cazebonne, part avec un avantage appréciable.
6e circonscription : Liechtenstein et Suisse. Parité parfaite : 7 candidates et 7 candidats. La députée sortante, Claudine Schmid (LR), n'est pas en mauvaise posture face au candidat LREM, Joachim Son Forget. Si Macron est arrivé en tête au premier tour présidentielle, il n'a devancé Fillon que de 4 points (34,71% contre 30,75%). La bataille risque donc d'être très serrée entre ces deux là.
7e circonscription : Allemagne et Europe de l'Est. Il y a 15 candidats dont 6 femmes. Situation très délicate pour Pierre-Yves Le Borgn', député sortant (PS), car Macron a recueilli 53% des voix au premier tour de la présidentielle. Il avait 35 points d'avance sur Fillon (17,83%), 40 sur Mélenchon (12,41%) et 44 sur Hamon (8,84%). Sans vendre la peau de l'ours avant de l'avoir tué, le candidat de La République en marche, Frédéric Petit, doit penser que son sort pourrait être moins enviable.
8e circonscription : Italie, Europe du Sud, Turquie et Israël. 8 femmes et 9 hommes dans les starting-blocks. L'état des lieux n'est pas défavorable au député sortant, Meyer Habib (UDI-LR). Macron et Fillon étaient dans un mouchoir de poche au premier tour présidentiel : 36,42% et 36,41%... quatre voix d'écart entre les deux sur près de 29.000 votants et avec une abstention record (76,26%). Florence Drory (LREM) aura fort à faire pour déloger Habib de son siège.
9e circonscription : Maghreb et une partie de l'Afrique subsaharienne. Il s'agit de la "circo" la plus insolite : elle compte 27 candidats dont 13 femmes et c'est la seule où La République en marche n'en a pas... sauf à soutenir un candidat en sous-main ! C'est aussi la seconde circonscription dont le député sortant, Amirshahi (non inscrit, ex-PS), ne se représente pas. Les jeux sont ouverts, l'inconnu est total.
10e circonscription : Afrique noire, Proche et Moyen-Orient. Il y a 4 candidates et 7 candidats. Le député sortant, Alain Marsaud (LR), est, a priori, en situation favorable pour conserver son siège. C'est la seule "circo" de l'étranger où Macron (30,95% au premier tour) a été devancé par Fillon (38,10%). Peut-être un des "bienfaits électoraux" de la "Françafrique" ? Le défi sera donc difficile à relever pour Amal Amelia Lakrafi, la candidate LREM.
11e circonscription : ex-URSS, Sous-continent indien, Asie et Océanie. 14 candidats dont 5 femmes. Thierry Mariani, député sortant (LR), va devoir compter sur sa notoriété pour rempiler. Au premier tour présidentiel, Fillon (29,64%) a été devancé de 10 points par Macron (39,20%). Ce différentiel serait-il suffisant pour permettre à Anne Genetet de l'emporter au second tour ? Comme dans d'autres circonscriptions, ce sont les reports de voix entre les deux tours qui seront déterminants.