Pour François Fillon et Bruno Le Maire, ça commence à urger ! Force est de constater qu'il leur reste moins de trois mois pour faire bouger les lignes. Sinon ça va certainement se jouer entre Alain Juppé et Nicolas Sarkozy. Depuis des mois, tous les sondages placent ces deux là en tête des intentions de vote des sympathisants pour la primaire de la droite. Tous les autres candidats qui resteront en lice - trois ou quatre au maximum - ne feront que de la figuration.
Malheureusement pour Fillon et Le Maire, la polarisation des médias sur les deux têtes d'affiche ne leur laisse que peut d'espace pour exister. Il faut dire que les deux outsiders souffrent de handicaps qui nuisent à leur envolée dans les enquêtes d'opinion. Le premier ne parvient pas à donner la mesure de son charisme alors que le second n'a guère que le concept de "modernité" à vendre à l'électorat pour se différencier.
Bien qu'il se soit lancé le premier dans la bataille armé d'un programme sérieux et tout entier tourné vers le libéralisme économique, l'ancien "collaborateur" de Sarkozy n'a pas réussi, jusqu'ici, à décoller dans les sondages. Rigide et "droit dans ses bottes" par choix - "je ne suis pas là pour faire rêver", a-t-il déclaré à Sablé (Sarthe), le 28 août - Fillon a réussi à faire passer Juppé pour un candidat chaleureux et souple, ce qui est une forme d'exploit !
Il retente "l'effet bulldozer" de la présidence de l'UMP...
Pire encore, il s'est fait devancer, dans les sondages, par Le Maire qui mise sur la jeunesse, la sienne, et sur le fait qu'il a beaucoup moins "d'heures de vol" en politique que ses trois principaux concurrents. Ce diptyque lui avait réussi lors de l'élection à la présidence de l'UMP où il avait su résister à la vague sarkozyste, en novembre 2014. Il avait frôlé la barre des 30% face à l'ancien chef de l'Etat qui avait été élu au premier tour avec 64,5% des voix des militants.
Le score du premier tour de la primaire de la droite, le 20 novembre, est, du reste, un enjeu crucial pour Sarkozy. Une majorité de sondages, depuis le mois de janvier, le donnent distancé au premier tour de la primaire par Juppé. Non seulement parmi l'ensemble des Français (échantillon le moins directement concerné par cette consultation) mais aussi chez les seuls sympathisants du parti "Les Républicains" dont il vient de céder la présidence à l'un de ses partisans radicaux, Laurent Wauquiez.
Mais l'ancien président de la République espère que l'annonce de sa candidature accompagnée d'un tir de barrage médiatique dont il est coutumier va provoquer le "blast" qu'il appelle de ses voeux. Persuadé que l'actualité de l'été lui a été plus favorable qu'à Juppé - il était très présent alors que le maire de Bordeaux avait pris du champ -, il considère que son entrée en campagne va couronner cette séquence. Il rejoue donc "l'effet bulldozer" de la présidence de l'UMP... qui n'avait pourtant pas été très probant.
Le report des voix ne lui est pas favorable au second tour
Ses soutiens - politiques et médiatiques - n'ont, du reste, pas manqué de souligner que le dernier sondage TNS Sofres pour Le Figaro le donnait au coude à coude avec Juppé à 34%, tous les deux, au premier tour de la primaire. Par rapport à juin, il a ainsi gagné 4 points alors que dans le même temps son concurrent en a perdu 3. Il faut tout de même préciser que la base de calcul de ce résultat dans un mouchoir est de... 332 personnes "certaines d'aller voter" !
Dans le détail, le baromètre de cet institut montre que plus le nombre de votants à la primaire est restreint, plus le score est favorable à l'ancien locataire de l'Elysée. Inversement, plus les électeurs sont nombreux, plus Juppé le distance au premier tour. D'où l'intérêt pour Sarkozy de confiner le débat de cette campagne dans un triangle identité-sécurité-islamisme pour être sûr d'attirer le coeur de l'électorat de droite chauffé à blanc, voire celui du Front national, et de faire fuir du monde. Notamment les centristes.
La stratégie sarkozyste est de tout faire pour "coiffer" son principal adversaire au poteau, le 20 novembre. Dans l'espoir de créer une dynamique - "faire monter la vague", disait le président sortant en mai 2012 - pour le second tour. La réalisation de cette hypothèse est d'autant plus impérative pour lui que, dans l'état actuel des positions, les désistements des autres principaux candidats entre les deux tours ne lui sont pas favorables. Le report des voix de Le Maire et de Fillon se fait majoritairement sur Juppé et... dans l'abstention. Aujourd'hui, le maire de Bordeaux est encore donné vainqueur au final.