En 2012, Nicolas Sarkozy sentait "monter la vague" en sa faveur. C'était à la fin de la campagne présidentielle. Son retour, le 19 septembre, a donné naissance à une autre vague : celle des sondages. Celui-ci était tellement prévisible et il avait été tellement planifié par son entourage que plusieurs médias étaient dans les starting blocks, prêts à lâcher les chevaux !
Le journal Sud-Ouest a été le premier à dégainer sur Twitter, avant même l'annonce officielle de son retour par Sarkozy sur Facebook, pour faire la promotion d'un sondage Ifop sur "les traits d'image" associés à l'ancien chef de l'Etat, à paraître dans son édition du dimanche. Le moins qu'on puisse dire est que l'item choisi par le quotidien n'était pas particulièrement flatteur pour l'intéressé.
En effet, il apparait que moins d'un Français sur trois (29%) considère que le mot "honnête" s'applique bien à l'ex-président. Ce pourcentage marque une chute considérable puisqu'en avril 2006, soit un an avant son élection, ils étaient 63% à répondre positivement à cette question. Le recul est de 34 points en 8 ans. Il est probable que la combinaison du feuilleton Bettencourt et de l'affaire Bygmalion y est pour beaucoup.
Et si 29% des Français pensent que Sarkozy est "honnête", cela signifie que les 71% restant estiment le contraire ou, à tout le moins, sont dubitatifs. Ce chiffre montre l'ampleur de la tâche pour inverser la tendance de cet indicateur préoccupant. L'opération sera d'autant plus compliquée pour l'intéressé que l'affaire Bygmalion, qui porte sur des soupçons de financement occulte lors de la campagne présidentielle, n'a encore connu aucun développement judiciaire tangible.
Un Français sur trois pense qu'il "tient ses engagements"
Comme le notait francetvinfo à propos de ce sondage, 53% des Français considèrent aussi que Sarkozy a "l'étoffe d'un président de la République". Et une grosse minorité (45%) estime qu'il "veut vraiment changer les choses". Mais ces deux points favorables sont lestés par une série d'autres qui ne donnent pas de lui une image très attractive.
Ainsi, 51% des Français seraient inquiets de son retour en politique, 50% se déclarent en colère contre lui, ils ne sont que 39% à je juger sympathique, 36% pensent qu'il "tient ses engagements" et 33% qu'il "comprend les problèmes des gens". Autant dire que l'ancien locataire de l'Elysée a du pain sur la planche car force lui est de constater que ses deux années de fausse sortie n'ont pas beaucoup amoindri les sentiments négatifs qu'il suscitait dans l'opinion en 2012.
D'autant que sa démarche actuelle ne soulève pas l'enthousiasme, comme le montre un autre sondage de CSA pour BFMTV. L'annonce de sa candidature à la présidence de l'UMP est désapprouvée par 61% des personnes interrogées. Et parmi celles qui l'approuvent (39%), il ne s'en trouve que 17% pour la soutenir "tout à fait". C'est évidemment parmi les sympathisants du parti de droite qu'il remporte ses plus forts scores d'approbation : 60% "tout à fait" et 29% "plutôt", soit 9 sur 10.
Et les données ne sont pas bien meilleures en ce qui concerne une éventuelle candidature future à la présidentielle 2017... qui ne fait de doute pour personne. 63% des Français ne la souhaitent pas contre 37% qui y sont favorables (17% "tout à fait" et 20% "plutôt"). Ce sont les sympathisants UMP, là aussi, qui forment les gros bataillons du soutien (86%) alors que les centristes de l'UDI sont beaucoup plus sur la réserve (46% de favorables).
Le temps médiatique va heurter le temps judiciaire
Si la position négative globale de l'opinion a, somme toute, assez peu d'importance dans la conquête de la tête de l'UMP, puisque ce sont les seuls militants à jour de cotisations qui seront appeler à départager Sarkozy et les deux autres candidats en lice - Bruno Le Maire et Hervé Mariton -, en revanche la défaillance des centristes est un point faible de la marche sarkozienne vers l'Elysée.
C'est du reste pour ça que Sarkozy veut, préalablement à la deuxième étape de la candidature présidentielle de 2017, reformater l'UMP à sa main, en tentant d'y faire cohabiter un maximum de centristes avec l'aile droite la plus radicale conduite par les jeunes Turcs de l'actuel parti d'opposition. Le but de l'opération est de tout faire pour rendre inutile une "primaire ouverte", celle-là même qui est réclamée conjointement par Le Maire et Juppé, principal challenger de l'ancien président.
Reste que l'opération va s'avérer délicate pour plusieurs raisons. Il est clair pour les centristes - et François Fillon les a conforté dans ce jugement - que Sarkozy n'a pas changé et qu'il compte sur la technique du rouleau-compresseur pour tout aplanir sur son passage. D'autres diraient "tout écraser". Il est tout aussi clair qu'une opposition structurée existe actuellement au sein de l'UMP. Ce qui n'était pas le cas lors de l'élection de 2004 qui avait vu le maire de Neuilly de l'époque l'emporter avec 85,09% des voix face à Nicolas Dupont-Aignan (9,10%) et Christine Boutin (5,82%)... qui ont tous les deux quitté l'UMP.
Enfin, il reste le poids des "affaires" dont plusieurs sont en cours d'instruction. Pendant deux ans et demi, la présidence de l'UMP n'offrira aucune immunité au titulaire du poste. Les adversaires de Sarkozy, à l'intérieur et à l'extérieur de l'UMP, doivent certainement penser que deux ans et demi, ça ressemble plus au temps judiciaire qu'au temps médiatique. Ou au temps fugace de la communication !