Les catholiques pratiquants se sentent les mal aimés de Hollande, le laïc

Manifestation du mouvement "La Manif pour Tous", le 23 novembre 2013 à Nantes (Loire Atlantique). (JEAN-SEBASTIEN EVRARD / AFP)

Le jour où les catholiques fêtaient François de Sales (1567-1622), vendredi 24 janvier, François, le président de la République française "indivisible, laïque, démocratique et sociale", au terme de la Constitution, était reçu en audience par François, monarque temporel de l'Etat du Vatican et chef de l'Eglise catholique apostolique romaine.

La rencontre de François Hollande avec le pape François a passé le cap de la demi-heure. Et si l'évêque de Rome a donné l'impression d'être plus crispé que le chef de l'Etat français avant l'entretien, les deux hommes sont apparus beaucoup détendus au terme de celui-ci.

S'ils ont parlé diplomatie sur les affaires du monde, la Syrie en particulier, la Vatican a tenu à faire savoir que d'autres thèmes d'actualité comme "la famille, la bioéthique, le respect des communautés religieuses et la protection des lieux de culte" avaient été abordés.

On ne sait pas si François, le pape, a passé un savon à François, le laïc, au sujet du vote de la loi sur le mariage homosexuel ou sur l'abandon récent de la notion de "détresse" dans la loi Veil sur l'IVG de 1974. Ce texte avait valu à Valery Giscard d'Estaing, le président de l'époque, les foudres du pape Paul VI.

Rester sur les rails de la laïcité de la République

C'est peu dire que le courant passe difficilement entre les catholiques pratiquants et le président de la République qui, comme beaucoup de Français élevés dans la religion, s'est éloigné au fil du temps de la pratique de celle-ci. Alors que plus d'un quart des croyants avait une pratique religieuse au début des années 1950, en France, ils étaient moins de 5% à la fin des années 2000, selon une étude de l'Ifop.

Toutefois, il n'en demeure pas moins que deux-tiers de Français (65%) se déclaraient catholiques en 2009. L'importance de la mobilisation, soutenue par l'Eglise, contre le "mariage pour tous" et sa matérialisation, parfois violente, de la part d'une frange de la droite et de l'extrême droite, ont cristallisé les positions dans les deux camps : celui des catholiques et celui du gouvernement.

Du côté gouvernemental, la volonté de rester sur les rails de la laïcité de la République a conduit le chef de l'Etat et certains de ses ministres - parfois avec une certaine maladresse - à ne pas entrer dans les considérations religieuses où on voulait les entraîner. Cette distance a été considérée par nombre d'opposants comme un manque de considération de leurs convictions.

A sa décharge, le pouvoir peut faire valoir que l'entrée dans la danse d'organisations catholiques intégristes et de groupuscules politiques extrémistes n'a pas facilité la bonne compréhension du mouvement pacifiste d'opposition. Et par voie de conséquence sa gestion politique. D'autant que quelques députés UMP et des personnalités de droite sont venus mettre la main à la pâte, dans un jeu un peu trouble.

Un appel au secours lancé au pape François

De l'autre côté, ou en tout cas ceux qui s'expriment en leur nom, les catholiques concernés ont eu la nette impression qu'ils n'étaient pas écoutés - à défaut d'être entendus. Voire méprisés, quand ce n'était pas, selon eux, dénigrés et attaqués. Cela a fait naître chez eux un sentiment d'incompréhension qui les poussé à dénoncer le "catho bashing".

A l'initiative de quelques "catholiques engagés", selon l'expression de l'Abbé Grosjean, un jeune prêtre du diocèse de Versailles, vigoureux opposant au mariage homo et très actif sur Twitter, une lettre ouverte au pape avait été rédigée pour attirer son attention sur ce "malaise" des catholiques français, dix jours avant son entretien avec François Hollande.

Mise en ligne sur Internet, cette "supplique", en forme d'appel au secours, avait recueilli plus de 120.000 signatures, le jour même de l'audience papale. Les autorités religieuses français ont assuré aux initiateurs de la lettre ouverte qu'elle serait mise dans le courrier destiné  au pape François.

Sans lever toutes les ambiguïtés et surtout les oppositions, cette rencontre au sommet, venant après la condamnation - un peu tardive - de l'activisme des Femen pointé dans la "supplique" au pape, mettra sans doute un peu de baume au coeur des catholiques pratiquants. Rien n'est jamais à négliger dans une année électorale difficile... même si le résultat est marginal !

Publié par Olivier Biffaud / Catégories : Actu