La bataille politique fait rage. Elle a lieu dans l'hémicycle de l'Assemblée nationale et dans celui du Sénat. Elle se déroule aussi sur les chaînes de radio et les canaux de télévision. Elle se déchaîne sur les réseaux sociaux, notamment Twitter. Que de chemin parcouru depuis cet article du Parisien de juillet 2011 ! Twitter entre en Bourse, à New York, le 7 novembre.
Le quinquennat de Hollande restera-t-il dans l'histoire comme celui d'un rendez-vous raté entre un président de la République de gauche, d'un côté, et les utilisateurs du dernier moyen de communication en vogue, de l'autre. Il est vrai que le chef de l'Etat montre une appétence modérée pour le réseautage social.
Jamais les réseaux sociaux - pas même sous Sarkozy - n'avaient occupé une place aussi importante dans l'information et la désinformation de l'opinion publique. Aujourd'hui, le réseau de microblogage Twitter tient un rôle central dans cette bataille qui se livre à coups de messages de 140 caractères, espaces compris.
Cette bataille médiatique - Twitter est devenu, qu'on s'en félicite ou qu'on le regrette, un média en soi, un nouveau média à part entière - s'est développée, pendant la dernière campagne présidentielle, comme jamais auparavant. Qui pouvait même se douter qu'elle atteindrait la puissance qu'elle a aujourd'hui ?
Les fans de Sarkozy s'en donnent à coeur joie
Alimenté par des milliers d'informateurs et de commentateurs amateurs, Twitter est systématiquement en avance sur les médias traditionnels écrits, parlés ou télévisuels. L'information et la désinformation y sont disséquées, décortiquées, commentées, chroniquées et répercutées à la vitesse de la lumière, dans tout l'Hexagone, sans contrôle et sans modération.
Média mondial sans ligne éditoriale, autogéré de façon anarchique par ses utilisateurs, ce réseau social est devenu, sans le savoir peut-être, le lieu d'une âpre bataille politique à ciel ouvert. Le phénomène est certainement observable dans d'autres pays. En France, elle oppose clairement la droite et ses extrêmes aux défenseurs du pouvoir socialiste en place et plus précisément à son chef : Hollande.
Alors que Twitter avait la réputation, voilà quelques années, d'avoir été investi par un public de gauche - il est vrai qu'il était alors utilisé pour "basher" Sarkozy -, la configuration de l'annuaire des abonnés (environ 5,5 millions de Twittos) semble avoir considérablement évoluée. En une année, le nombre de twets a augmenté de 350%, selon une enquête de France Info.
Retour de manivelle, les fans de Sarkozy - l'ancienne ministre Nadine Morano en tête - s'en donnent à coeur joie pour pilonner en permanence Hollande, Ayrault, le gouvernement et le PS. A gauche de la gauche, Mélenchon, ses lieutenants et ses partisans ne sont pas en reste pour tirer à vue sur ceux que le co-président du Parti de gauche a baptisé "les Solfériniens".
Les ministres ne tentent pas de contrer les assauts
Dans cette course à la "baston médiatique", le Front national ne se fait pas prier pour surfer sur la parole ou le silence élyséen, sur les couacs gouvernementaux, sur les frondes multiformes ou les mouvements sociaux. Tout est bon pour une volée de tweets assassins. L'utra-droite, elle, laisse déborder son antisémitisme congénital.
En face, l'Elysée, Matignon et les ministres se contentent d'une information purement institutionnelle qui se réduit pour certains d'entre eux aux annonces d'une présence sur une station de radio ou une chaîne de télévision pour une interview matinale ou une émission en soirée. Le SIG, service d'information du gouvernement, lui, est totalement transparent sur les réseaux sociaux.
S'il est compréhensible que les représentants des pouvoirs publics ne sautent pas sur chaque polémique lancée à jet continu par l'opposition sur Twitter, au risque de s'engager dans une bagarre de chiffonniers, il est tout de même étrange qu'ils se laissent enfoncer sans même manifester une présence pour tenter de contrer les assauts dont ils sont l'objet.
Hollande ayant laissé lui-même transparaitre une certaine méfiance - voire une hostilité - à l'égard de cette forme d'information et de communication, il est possible que les ministres, à l'exception de l'écologiste Cécile Duflot peut-être, restent sur la réserve pour ne pas fâcher le "Château". Pourtant, c'est aussi là que se gagnera, ou se perdra, la bataille politique !