Ce fut un échec majeur du quinquennat précédent. Elle avait contre elle, une bonne partie de la droite attachée au modèle productiviste, le patronat qui y décelait une atteinte à la compétitivité, les transporteurs-routiers qui se disaient au centre de la cible... et l'opinion publique qui y voyait une nouvelle taxe.
Après avoir été présentée par Sarkozy comme une avancée aussi décisive que la décolonisation, l'élection du président de la République au suffrage universel et l'abolition de la peine de mort, la taxe carbone avait disparu dans les oubliettes des réformes avortées.
Et voilà qu'elle refait surface avec Hollande, à la faveur des Journées d'été d'Europe écologie-Les Verts qui promettaient de légèrement grincer aux oreilles des socialistes. A 7 mois de municipales qui s'annoncent compliquées pour la gauche, les écolos envisageaient de dire son fait - en clair, leur mécontentement - au chef de l'État.
S'estimant marginalisés, voire dédaignés, considérant que leurs propositions sont négligées et que la transition écologique tarde à se manifester, les amis de Cécile Duflot mettaient en garde le gouvernement depuis plusieurs semaines. Le ministre socialiste de l'écologie, Philippe Martin, a coupé net cet élan guerrier.
En retour, des listes communes aux municipales ?
Au-delà de sa dimension écologique, la taxe carbone rebaptisée "contribution climat énergie", que le ministre est venu annoncer, à Marseille, aux partenaires verts, est un missile à têtes multiples expédié depuis l'Élysée sur le champ de bataille politique pré-électoral.
C'est évidemment, d'abord, un signal fort envoyé aux intéressés eux-même car la contribution en question fait partie d'un package qui ne peut qu'amadouer les écolos. Comme dirait José Bové, "Philippe Martin a rempli le contrat".
Hollande attend probablement en retour que les velléités d'indépendance d'EELV au premier tour des municipales - comportement des écologistes largement répandu - soient mises en sourdines. L'espoir du président de la République étant de voir émerger des listes communes dès ce premier tour.
Indirectement, c'est aussi une réponse aux récents appels du pied de Mélenchon en direction des écolos. Le co-chef de file du Partit de gauche se cherche, en effet, des partenaires au-delà des frontières du Front de gauche pour les mêmes municipales. Il comptait bien exploiter leur mauvaise humeur... pré-contribution.
Des risques de victimes collatérales à droite ?
Le missile carboné ne vas pas manquer d'embarrasser la gauche - le patron des sénateurs socialistes, Rebsamen, s'est déjà prononcé contre la dite contribution -, mais aussi la droite. Soutenue par Nathalie Koscuisko-Morizet - NKM -, la ministre de l'écologie du gouvernement Fillon, Chantal Jouanno, s'était déclarée "désespérée" après l'abandon de la taxe carbone par Sarkozy.
NKM, justement, peut devenir une victime collatérale de cette contribution dans sa tentative de ravir la Mairie de Paris face à Anne Hidalgo (PS). En mars 2010, elle avait dit sur RTL sa certitude de voir revenir la taxe carbone avant la fin du quinquennat Sarkozy. Son retour, mais avec Hollande, ne manquera pas d'être souligné par son adversaire.
Présentée comme un impôt supplémentaire par la droite, la taxe carbone avait été victime d'une plan de communication désastreux de la part du gouvernement Fillon avant d'être retoquée par le Conseil constitutionnel pour cause de rupture d'égalité entre les citoyens face à la loi.
Forts du fiasco précédent, il serait préférable que les initiateurs du projet prennent toutes les précautions nécessaires pour que le missile de la "contribution climat énergie" qui vient d'être lancé ne soit pas lui-même la victime d'une des têtes qu'il transporte.