Maïva Hamadouche, mi flic mi sportive

C'est un texte un peu particulier que je vous présente aujourd'hui. Celui d'une championne. De boxe. C'est une voix singulière. Elle s'appelle Maïva Hamadouche, elle a 29 ans, est 5 fois Championne du Monde de Boxe Anglaise Professionnelle.  Et, cet été, elle fera l'actualité sportive, puisque, le 18 juillet prochain, à 18h30, au Cannet, elle participera à son 7ème championnat du monde.

Mais, à coté de cela, Maïva a cette particularité d'être aussi... policière.

Je lui cède donc le clavier

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J'ai toujours voulu intégrer La Police Nationale. Petite, j'admirais les voitures de Police et rêvais de l'intégrer un jour.
J'ai passé le concours de Gardien de La Paix à 18 ans. Ayant réussi les épreuves écrites et physiques avec succès, je me souviens tout particulièrement de l'entretient oral. En Effet, j'étais dans une période assez difficile. Lorsque la psychologue m'a questionnée sur mes motivations réelles, je lui ai parlé sincèrement, en disant que même si je ressentais une attirance très forte pour ce métier, je n'aurais guère le temps de passer le concours pour une deuxième fois, en rapport avec ma situation compliquée. La motivation était forte et réelle, mais j'avais également un besoin réel d'intégrer la Police Nationale. La Psychologue, très touchée par mon discours, a décidé elle aussi, de m'aider. Elle m'a octroyé une note de 18/20 afin de m'assurer la réussite au concours. Je lui en suis, encore aujourd'hui, reconnaissante.

J'ai alors été intégrée à l'Ecole de Police de Rouen-Oissel. Je m'entraînais tous les soirs. Les weekend, je partais sur Clichy la garenne, prenais une chambre d'hôtel pour rester m'entraîner.

Je suis sortie d'école en 2010, pour être affectée au Commissariat d'Asnieres sur Seine. En sécurité publique. Étant au club de Clichy la Garenne, mon choix a été fait dans le but de me rapprocher du club de boxe. N'étant toujours pas en équipe de France, je m'entraînais le matin à 4h30 avant la vacation de 6h30- puis l’après-midi en sortant du travail. Les jours de repos, je les gardais pour les stages, et ce jusqu'à mon intégration en Équipe de France en 2011. Depuis ce jour j'ai été détachée en tiers temps par la DRCPN (la direction qui s'occupe des carrières, mutations et avancements), en tant que sportive de haut niveau "Police Nationale". Le temps passé au Service, j'étais alors affectée en "SAIP" (Service d'Accueil et d'Investigation de Proximité), aux plaintes.

J'ai continué durant trois ans environ avant de décider de passer en boxe professionnelle. Mais j'y ai perdu mon tiers temps.

En 2013, j'ai décidé de passer les tests CSI75. La première crainte était due au fait que je sortais d'un régime tiers temps, avec donc, peut-être, moins d'expérience professionnelle de terrain. Mais j'étais physiquement bien préparée.
Mon premier choix s'est porté sur la CSI92, mais il fallait laisser la boxe de côté. Le Commandant de la CSI75, est venu lui-même à ma rencontre, afin de me recruter pour Paris. L'entretien s'étant bien passé avec lui, j'ai intégré la CSI75 en Septembre 2014.

Depuis quelques mois je suis à nouveau détachée en tiers temps au sein de la DRCFPN. L'objectif est de retourner en équipe de France de boxe olympique, en parallèle de mon parcours professionnel, pour tenter d'aller aux JO 2020, à Tokyo, et y représenter mon pays. Une médaille aux JO de Tokyo serait pour moi une consécration. Nous avons la chance d'avoir, au sein de la Police Nationale, ce système de détachement. On gagnerait donc cette médaille ensemble. Je compte bien porter haut les couleurs de la Police Nationale, de cette institution, à l'occasion de ces Jeux Olympiques et lors de mes prochains championnats du monde.

Je suis reconnaissante envers la Police Nationale. C'est pour cela que le port de l'écusson "CSI75" lors de mes combats de boxe me tient autant à cœur. Je souhaite valoriser au mieux l'image de la Police Nationale. Le port de l'écusson en tatouage éphémère, est une idée du Commandant de Police à la CSI75, et du Commissaire de Police, qui assistent à tous mes combats.Ils avaient notamment fait le déplacement pour venir me voir boxer en Belgique lors de mon premier Championnat du Monde. J'ai un soutien sans faille de ma hiérarchie, et c'est très important pour moi.

Bien sûr mon métier et mon sport sont liés et complémentaires. La boxe, a ce niveau là, me permet d'avoir un certain sang froid, tout en étant sûre de moi, en ayant une certaine assurance que l'on peut ressentir de l'extérieur. Les collègues peuvent notamment compter sur moi à chaque instant.

Il arrive aussi, en service, que les gens me reconnaissent dans la rue, ce n'est pas toujours évident pour les collègues de travailler avec moi, à ce niveau là. Cela donne parfois des situations un peu cocasses, même si ça se passe bien.

Comme tout policier, il y a bien évidemment des interventions qui marquent plus que d'autres. J'ai souvenir de ce migrant sauvé lors d'un accident de la route. La presse avait d'ailleurs, à l'époque, repris cette intervention. Une voiture venait de percuter un abris bus. Un passant est alors sorti de l'abris bus, la jambe en sang, partiellement arrachée.Un secouriste avait tenté de lui mettre une ceinture de pantalon dans le but de faire un garrot. Sans succès. Il se trouve que j'avais un garrot dans la poche de mon pantalon.
Je l'ai posé pendant que mes collègues appelaient du soutien et s'occupait de retrouver les auteurs qui avaient pris la fuite.
Nous avons pu le maintenir en vie en attendant l'arrivée du samu. Le blessé a été amputé mais sa vie sauvée.

Je compte boxer encore trois ou quatre ans, ça dépendra de mes titres, des opportunités et des blessures. Certaines boxeuses restent jusqu'à 36-38 ans..je ne pense pas continuer jusque là. Je veux marquer l'histoire de la boxe, en France et dans le Monde. enchaîner les championnats du monde. J'en suis à 6..j'aimerais en faire encore une dizaine.. j'ai une boxe très offensive, très physique, donc on verra en fonction des combats.

Lors des combats, il m'arrive de voir des collègues, qui viennent me voir. C'est un encouragement supplémentaire. Je suis fiere de mon métier, et j'éspère les voir toujours plus nombreux.

Pour ce qui est de la suite de ma carrière, j'aimerais intégrer le RAID en groupe d'Intervention. Qui sait...

Mais avant tout, place au Cannet, je vais combattre contre contre la mexicaine Janeth Perez (en direct sur RMCSport 1). J'ai eu le plaisir de recevoir des messages de soutien de collègues du commissariat de Nice qui viendront assister au combat. Celui-ci s'annonce sensationnel. La mexicaine est expérimentée et solide.