Je suis allé au cinéma voir « Ce qui nous lie », le dernier film de Cédric Klapisch sorti mercredi 14 juin.
Dans ce nouveau film, le réalisateur parle du temps qui passe, de l'enfance, de la transmission. L'histoire se déroule dans un domaine viticole de Bourgogne (des parcelles sur Meursault et Pommard) et le fil rouge du film est la succession, deux frères et une sœur qui héritent du domaine après le décès des parents.
Je ne relaterai pas les relations humaines du film, thème cher au réalisateur, j'apporte ici mon commentaire sur mon domaine de compétence, à savoir la vigne et le vin qui ont servi de cadre à ce film.
Le film pouvait presque s'apparenter à un documentaire tellement tout ce qui concerne la vigne et le vin y est d'une grande précision et d'une totale justesse.
Commençons par le problème de la succession
Le choix de la Bourgogne n'a sans doute pas été un hasard dans ce domaine. En effet, c'est le vignoble, après la champagne où le prix du hectare de vigne est le plus élevé, d'où des droits de succession exorbitants. C'est là où l'histoire du film rejoint la réalité, à savoir que dans la plupart des cas, dans cette situation, les héritiers n'ont souvent pas d'autre choix que de vendre une partie du domaine pour s'acquitter de ces droits.
Conduite du vignoble et vinification
Même justesse lorsqu'on suit les frères et la sœur dans les vignes à l'époque où il faut décider de la date des vendanges. Ils goûtent les raisins pour apprécier son état de maturité. Dans le film il s'agit des blancs, il ne faut pas attendre la sur-maturité pour conserver au vin toute sa fraîcheur.
On assiste à une partie des vendanges et là aussi le briefing des vendangeurs qui consiste à leur montrer quels raisins il faut cueillir et ceux qu'il faut laisser sur pied correspond à la réalité.
Quelle vinification adopter selon le millésime pour les vins rouges, tout égrapper ou n'égrapper qu'une partie ? Ces questions judicieuses les acteurs du film se les posent.
Un petit retour sur les pratiques d'autrefois en Bourgogne, à savoir la macération des raisins rouges dans des cuves en bois tronconiques et surtout le pigeage qui se fait en marchant pieds nus et en short dans la cuve pour enfoncer le raisin dans le jus.
Pour compléter le cycle de la vigne le film présente une scène sur la taille en hiver et même sur l'arrachage d'une vieille parcelle qui ne produisait presque plus de raisins.
Toute cette précision n'est pas due au hasard. En effet, Cédric Klapisch raconte qu'il s'est immergé pendant huit mois dans la région avec ses acteurs. Il a été conseillé par Jean-Marc Roulot, vigneron à Meursault et également acteur (il a tourné avec Catherine Frot dans « Les saveurs du palais »), il apparaît dans le film. Il a également écouté une vingtaine de vignerons qui lui ont raconté l'histoire de leur famille et leur façon de travailler. Parmi ceux-ci il y a des personnes du domaine Anne-Claude Leflaive, du domaine Comte Sénard à Aloxe Corton, Pierre Morey, ainsi que Bertrand de Vilaine de la Romanée Conti.
Ce film résume parfaitement les propos de Cédric Klapisch : « le vin est un produit qui unit. L'amour du vin rassemble des gens très différents les uns des autres, des personnes qui ont des parcours très distincts ».