La campagne du premier tour de l'élection présidentielle se termine et il a paru judicieux à Vitisphère de connaître les projets des différents candidats concernant la viticulture et le vin en France.
Qu'est-ce-que Vitisphère ?
Créée en 2000, Vitisphère est considéré comme le premier média d'information de la filière vitivinicole.
Ses représentants ont donc rencontré les candidats et leur ont demandé leur avis sur les thèmes suivants : les enjeux économiques, la politique de santé, l'avenir de l'OCM (Organisation Commune des Marchés agricoles) et l'environnement.
Voyons ce qu'ont répondu les quatre candidats auxquels les sondages actuels donnent encore une chance d'être élu.
Emmanuel MACRON
Il pense que nos terroirs viticoles sont un capital naturel à préserver. Concernant l'inquiétude des vignerons sur les produits phytosanitaires, il dit vouloir relever ce défi environnemental en cessant d'opposer les modèles entre le bio et le conventionnel et en sortant d'une démarche d'écologie punitive. Il souhaite mettre en place le PSE (paiement pour services environnementaux) pour rémunérer les efforts ayant un impact positif sur l'environnement. Pour lui la viticulture française doit rester un pilier de notre histoire, de notre culture et de notre économie.
D'après lui il faut cesser l'opposition entre économie et santé publique et faire plus de prévention surtout en matière de lutte contre les consommations excessives d’alcool.
Au niveau européen il veut une PAC (Politique Agricole Commune) protectrice et ambitieuse avec le maintien d'une OCM vitivinicole. Les AOC et les IG (Indication Géographique) doivent être protégées au niveau européen mais aussi au niveau international.
François FILLON
Pour lui les enjeux stratégiques de la vigne et du vin sont considérables. Il est pour la simplification des droits des entreprises agricoles. Il envisage la création d'un compte épargne « aléas climatiques et économiques » alimenté librement pendant les bonnes années et utilisable en cas de pertes. La baisse des charges qu'il prévoit pour les entreprises, il la fera également bénéficier aux viticulteurs qui gagneront ainsi en compétitivité en France et à l'export.
Il ne relâchera pas les efforts de prévention et de sensibilisation pour lutter contre les consommations excessives d'alcool, mais une prévention qui ne soit pas punitive pour l'économie. La France est le pays du vin, nous devons pouvoir en parler dit-il.
Il veut préserver la spécificité vitivinicole dans l'OCM. Il pense que l'Europe doit défendre nos viticulteurs et peser dans les accords internationaux pour leur permettre d'accéder plus facilement aux marchés et pour défendre nos mentions traditionnelles (châteaux et crus) et nos indications géographiques (AOC, IGP, etc.).
Depuis 30 ans la filière a divisé par 2 l'utilisation de produits phytosanitaires. Il souhaite aider les viticulteurs à améliorer les pratiques et à innover. Développer la certification HVE (voir un de mes derniers textes) mise en place lorsqu'il était premier ministre. Développer la recherche pour s'approcher du « juste nécessaire » dans l'utilisation des produits.
Marine LE PEN
Elle pense que la politique européenne a fragilisé les vignerons par la multiplication des normes, incohérentes à son avis, sans protéger le consommateur et l'environnement. Pour elle la France doit rester à la pointe de l'innovation dans le domaine du vin, dans la manière de l'élaborer, mais pour réduire l'impact de la viticulture sur l'environnement.
Elle est très attachée au patrimoine viticole reconnu et envié dans le monde entier et trouve qu'une consommation modérée de vin fait partie des traditions françaises. Il faut lutter contre l'alcoolisation massive des jeunes par un accompagnement et une politique de prévention auprès des populations les plus à risques et non pas par des mesures d'ordre financière.
Selon elle, l'Union Européenne a affaibli nos appellations, fragilisant les viticulteurs dans la défense de leurs marques à l'étranger, et en retrouvant notre souveraineté nous pourrions mener une politique beaucoup plus audacieuse.
La question des pesticides est devenue centrale. Il faut encore encourager le convertissement au bio. Les normes doivent protéger à la fois les viticulteurs et les consommateurs.
Jean-Luc MELANCHON
Pour lui le choix de santé publique ne doit pas être pris en otage par les lobbies et il trouve que le marketing agressif et consumériste vient plus de l'industrie des alcools forts que des producteurs de vin.
Il pense qu'il faut rétablir la spécificité du vin dans la politique européenne. Il est opposé à la libéralisation des autorisations de plantation. Le vin est un produit culturel autant qu'alimentaire. Il veut appliquer des visas sociaux et écologiques aux importations qui ne respectent pas les droits que nous reconnaissons aux travailleurs et à l'écosystème humain.
Son idée est que le bio doit devenir la règle et la chimie l'exception dans la gestion des cultures. Tous les pesticides dangereux doivent être interdits. Il faut en finir avec le désherbage chimique qui est toxique pour l'environnement et aberrant pour la fertilité durable des sols. La liberté des vignerons et donc aussi la créativité de leur travail passe aussi par la réduction de leur dépendance face aux vendeurs de produits.
Pour conclure
Il semblerait donc qu'ils soient tous les quatre attachés à la valeur patrimoniale de notre vignoble et de sa filière. La profession devrait donc être rassurée quant à son avenir, encore faudra-t-il que celle ou celui qui sera élu mette en pratique son programme en la matière.