La primaire de la droite et du centre ayant accaparé tous les médias, la vente des vins des Hospices de Beaune est totalement passée sous silence.
Cette vente a lieu tous les ans le troisième dimanche de novembre, elle a donc eu lieu le 20 novembre cette année.
A l'origine...
Pour connaître l'origine de cet événement il faut revenir près de six siècles en arrière dans la phase finale de la guerre de Cent Ans. Rappelons que celle-ci prit fin le 17 juillet 1453 avec la victoire française sur les anglais lors de la bataille de Castillon.
La guerre de Cent Ans a apporté misère et famine et les gens démunis ont cherché assistance et réconfort auprès des puissants. La ville fortifiée de Beaune n'apportait pas de structure d'accueil. C'est pourquoi, en 1440, Nicolas Rolin, Chancelier du Duc de Bourgogne Philippe le Bon, et son épouse Guigone de Salins décident la création d'une fondation pieuse. Ils font bâtir un hôpital pour les malades et les déshérités, c'est la naissance de l'Hôtel-Dieu.
Cette œuvre sociale a très vite un large écho mais va être l'objet de convoitises. Nicolas Rolin, soucieux d'en conserver l'indépendance, en avise le Duc qui lui accorde l’exonération de toutes charges fiscales et féodales et d'impôts. La protection de l'Hôtel-Dieu est ensuite remise au Pape Eugène IV qui va placer l’œuvre de charité sous la tutelle épiscopale le 8 novembre 1441, donnant ainsi à l'hôpital une totale liberté.
Le 4 août 1443 la fondation de l'Hôtel-Dieu de Beaune est officiellement proclamée et Nicolas Rolin en précise les missions : tout doit être mis en œuvre pour que gens de peu « y soient reçus, alimentés et soignés aux frais de l'hôpital jusqu'à ce qu'ils soient revenus à la santé ou en convalescence ».
Le 1er janvier 1452 le premier patient est accueilli dans les murs et Nicolas Rolin se voit confier la surintendance de l'administration.
Le 31 août 1459 l'organisation est codifiée par une charte réglementant la gestion complète de l'Hôtel-Dieu et toujours en vigueur de nos jours.
En 1810 un décret napoléonien restaure l'intégralité du statut des religieuses, déchu dans la tourmente anticléricale pendant la Révolution.
Protégé depuis sa fondation, grâce à Nicolas Rolin, des convoitises personnelles et étatiques, l'Hôtel-Dieu a réussi à traverser les siècles et à poursuivre sa mission caritative. Il n'accueille plus de patients et de résidents âgés depuis le début des années 80.
Vente des vins des Hospices
Les Hospices sont propriétaires d'un domaine viticole bourguignon grâce à des dons et héritages de riches Seigneurs du Moyen-Age et cinq siècles de gestion de patrimoine. Le domaine comprend soixante hectares de vignes (cinquante plantés en Pinot Noir et dix en Chardonnay) dont 85% sont situés dans des aires délimitées en 1er Cru et Grand Cru.
La vente se pratique aux enchères depuis 1859 grâce au travail de Joseph Pétasse, économe des Hospices à cette époque. Auparavant la vente se faisait à l'amiable.
Depuis 1959 la vente se déroule sous la Halle de Beaune. Avant 1925 elle avait lieu dans dans la grande salle du Conseil de l'Hôtel-Dieu et de 1925 à 1958 elle avait lieu dans la cuverie même.
Depuis 2005 elle est orchestrée par Christie's.
Les vins sont vendus en pièces bourguignonnes de 228 litres (rappelons que la barrique bordelaise fait 225 litres).
La vente se fait en deux parties :
-
La vente d'une pièce appelée « la pièce de charité ou la pièce des présidents ». Cette vente dont l'argent récolté est destinée à une œuvre caritative veut rappeler l'esprit de charité des fondateurs. Pour diriger la vente, les Hospices font appel chaque année à un ou plusieurs parrains.
-
La vente de toutes les autres pièces de la récolte du domaine.
Voyons les résultats de ces ventes des deux dernières années.
En 2016
Le chiffre total des ventes a été en net recul par rapport à 2015 (-25,6%) et s'est élevé à 8,4 millions d'euros pour 594 pièces vendues ce qui fait un prix moyen de 13.833 euros la pièce ou 48,03 euros la bouteille.
La pièce de charité a atteint l'enchère de 200.000 Euros qui seront reversés à l'ARC et à la fondation Cœur et Recherche. Il s'agissait d'une pièce de Corton Bressandes Grand Cru. Les parrains ont été Claude Lelouch, Valérie Bonneton, Virginie Ledoyen et Katia Buniatishvili. La pièce a été partagée entre deux acquéreurs, Claude Bernard, directeur de l'hôtel du Cep à Beaune, et Madame Yan Hong Cao, riche femme d'affaires chinoise qui possède une mine de jade et une chaîne de magasins. Elle avait déjà acheté la pièce de charité en 2013.
En 2015
L'année de tous les records. 575 pièces ont été vendues pour un montant total de 11,3 millions d'euros, soit 18.880 euros en moyenne la pièce ou 65,55 euros la bouteille.
La pièce de charité, un Corton Renardes Grand Cru, a été vendue 480.000 euros et les parrains ont été Claire Chazal et Christophe Lambert. Cette somme a été reversée à la fondation d'aide aux victimes du terrorisme et à l'Institut Curie contre le cancer et la recherche sur les AVC. La pièce a été acquise par une française qui a préféré garder l'anonymat.
En dehors de la vente des pièces de charité, les fonds récoltés sont destinés à la conservation et l'entretien de l'Hôtel-Dieu ainsi qu'à l'amélioration des équipements de soins des Hospices Civils de Beaune.