Adèle Exarchopoulos, l'actrice du film primé à Cannes, n'aime pas Christine Boutin. Elle l'a dit à sa façon au Grand Journal de Canal Plus, en lui lançant un "sale frustrée de la fouf" assortie d'un signe universel d'enculade.
Moi non plus, je n'aime pas Christine Boutin. Pas du tout, même. Mais je n'aime pas non plus que comme Adèle Exarchopoulos, on ait besoin, quand on critique une femme, la plus odieuse soit-elle, de la renvoyer à l'image, misogyne s'il en est, de la "frustrée".
Pour s'en prendre à Christine Boutin, il y a de quoi faire : réactionnaire, sexiste, homophobe, indécente quand elle convoque l'étoile jaune pour se faire passer pour une victime, écoeurante quand elle évoque avec une ironie transphobe d'un goût nauséabond la mastectomie d'Angelina Jolie, ridicule encore quand elle simule des évanouissements et des sanglots à tire-larigot, agressante quand elle brandit sa bible, révulsante quand elle fait usage du réseau Twitter comme d'une bouche d'égout où déverser sa méchanceté ordurière... Presque chaque jour, chaque fois qu'elle prend la parole, Christine Boutin s'infâme elle-même.
Dénoncer sa bêtise et sa perversité suffit à l'insulter. Et c'est la seule façon pertinente de le faire. Lui tendre un doigt d'honneur et la traiter de "frustrée de la fouf", c'est certes lui retourner son agressivité (ce qui est tentant et même, admettons-le légitime) mais c'est le faire avec les plus mauvais arguments qui soient. Le doigt d'honneur, la "frustrée", "l'hystérique", "la salope", la "pute" (et son fils de) ou "l'enculé-e" sont bien des insultes machistes et/ou homophobes... C'est dommage (et désespérément contre-productif) d'en faire usage quand c'est précisément cela que l'on dit combattre en s'attaquant à Boutin et à d'autres...