Les réfugiés et le droit

Depuis plusieurs mois (voire plusieurs années), l’Europe se trouve confrontée à l’arrivée massive de personnes en détresse venant de pays bien souvent en guerre et n’hésitant pas à risquer leurs vies pour effectuer ce voyage. Risque malheureusement concrétisé pour nombre d’entre eux, au vu des centaines de victimes de naufrages en mer Méditerranée ou d’autres modes d’acheminement, le dernier exemple macabre en date étant celui des 71 personnes dont les corps ont été découverts dans un camion sur une route autrichienne.

La position de chaque pays à l’égard de ces arrivants désespérés est différente, de l’assistance affirmée par l’Allemagne à l'édification d’une clôture de barbelés entre la frontière séparant la Hongrie de la Serbie.

Des migrants dorment à même le sol dans le quartier de La Chapelle, à Paris, le 13 juillet 2015.

En France, pas d’action concrète à ce jour face à cette situation, mais de simples (et rares) réactions politiques, certains prônant de régler le problème à la source, c’est-à-dire avant l’entrée en Europe.

S’agissant des réfugiés, plusieurs textes ont consacré l’idée de leur accueil par les pays de destination.

En France, le préambule de la Constitution de 1946, qui a actuellement valeur constitutionnelle, précise que « Tout homme persécuté en raison de son action en faveur de la liberté a droit d'asile sur les territoires de la République. »

Mais c’est surtout la Convention de Genève signée par la France en 1951 qui a permis l’accueil des réfugiés. Cette convention concerne toute personne qui, "craignant avec raison d'être persécutée du fait de sa race, de sa religion, de sa nationalité, de son appartenance à un certain groupe social ou de ses opinions politiques, se trouve hors du pays dont elle a la nationalité et qui ne peut ou, du fait de cette crainte, ne veut se réclamer de la protection de ce pays".

Dans l’hypothèse où une personne répond à ces conditions, elle sera (ou devrait être) admise à séjourner en France, suite à une décision de l’OFPRA ou de la Cour Nationale du droit d’asile.

Enfin le droit français prévoit une protection dite subsidiaire destinée à toute personne qui ne remplirait pas les conditions pour obtenir le statut de réfugié mais qui courrait un risque  de « subir la peine de mort, la torture ou des peines ou traitements inhumains ou dégradants ou, s'agissant d'un civil, une menace grave, directe et individuelle contre sa vie ou sa personne en raison d'une violence généralisée résultant d'une situation de conflit armé interne ou international » (article L. 712-1 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile).

Les normes européennes se sont ajoutées à ces textes, notamment en ce qui concerne les compétences de chaque pays pour statuer sur une demande d’asile.

En application de ces textes, un étranger qui remplira les conditions prévues, telles qu’interprétées par la jurisprudence, pourra bénéficier soit du statut de réfugié, soit de la protection subsidiaire, et obtiendra le droit de résider en France.

Mais la condition première pour la mise en œuvre de ces textes est évidemment l’accès au territoire : on imagine difficilement qu’une personne qui fait l’objet de persécutions en Libye, qu’une victime de la guerre en Syrie reste dans son pays dans l’attente de la décision la concernant (durée pouvant aller jusqu’à plus d’un an) alors que par définition, sa vie et celle de ses proches est a priori en jeu et que les moyens de communication avec elle sont par définition très difficiles.

C’est la raison pour laquelle le droit français prévoit la délivrance d’une autorisation provisoire de séjour à chaque candidat à l’obtention du statut de réfugié.

Ces textes issus de la Constitution ou des engagements internationaux de la France ne sont pas susceptibles de faire l’objet d’une réforme de principe sur l’accueil des réfugiés.

Alors plutôt que de discourir sur des solutions totalement irréalisables sur le plan pratique ou juridique ou de taxer ceux qui fuient les persécutions dans leur pays d'origine de lâcheté (la créativité de Mme Morano en la matière apparaissant sans limites ni vergogne), peut-être serait-il préférable de réfléchir sur les conditions de mise en œuvre de ces textes, en particulier sur les conditions d’accueil des candidats au statut de réfugié.