Remanier le gouvernement pour retrouver la confiance perdue. C’est la réponse de François Hollande à la sanction infligée par les électeurs aux sortants de gauche lors de ces dernières municipales. Quel impact aura ce changement de gouvernement ? Que peut espérer l’exécutif? A regarder l’évolution de la popularité des Présidents de la République, pré et post remaniements, et/ ou changements de gouvernement sous la V° République, il semblerait qu’il y ait peu à en attendre.
Aucun changement de gouvernement n’a rapporté de gains de popularité aux Présidents qui ont remercié leurs Premiers ministres. A l’exception de Gaulle qui gagna 6 points de satisfaits passant de 52% à 58% (source IFOP) entre juillet et septembre, à l’issue du remplacement de Georges Pompidou par Maurice Couve de Murville en 1968.
Lorsque François Mitterrand nommera Pierre Bérégovoy pour remplacer Edith Cresson à Matignon, sa popularité restera figée à 26 % de satisfaits.
Un état de grâce très très court?
Certes Manuel Valls bénéficie d’une popularité plus que confortable. Mais cela concerne le ministre de l’intérieur. Premier ministre, sera-t-il encore populaire ? Il part avec 47% de satisfaits dans notre indice Electionscope de la crédibilité politique calculé sur la moyenne des instituts (http://www.electionscope.fr ). En mars il a déjà perdu plus de 10 points depuis l’installation de François Hollande à l’Elysée (il était à 58,25% en juin 2012). Selon le baromètre CSA pour Les Echos et Radio Classique, premier sondage après sa nomination, seulement 41% des Français lui "font confiance" pour "résoudre les problèmes".
De l’état de grâce à l’état de choc
Jean-Marc Ayrault a bénéficié pour sa part d’un très court « état de grâce ». Cette période est propice aux réformes difficiles, car elles passent mieux lorsque l’on vient d’être élu. On peut espérer transformer le soutien électoral en soutien "tout court". En juin 2012, le Premier ministre est à 59,38% de satisfaits, il est même plus populaire que le Président lui-même à 58,25%. Mais, très vite, la crédibilité se réduit, puis s’étiole avec à peine plus de 24% pour les deux têtes de l’exécutif.
Le risque pour Manuel Valls serait de finir "hors d’état" ... de nuire aux ambitions présidentielles de François Hollande
On n’a jamais vu un Premier ministre sortant gagner une présidentielle. La cause en est, qu’il est rare de sortir de Matignon avec une popularité majoritaire à quelques exceptions près (Lionel Jospin pour la période 1997-2002 ou François Fillon). Les mauvaises langues diront que François Hollande a nommé Manuel Valls pour "le rocardiser ". Ce n’est peut-être pas faux, car après tout, c’est même un des aspects de la fonction : faire écran et protéger la crédibilité du Président. Aujourd'hui, la difficulté est que le Président, lui-même, ne dispose que d’un stock très limité de crédibilité.
S’agissant du « gouvernement de combat » annoncé dès lundi par François Hollande, il semblerait qu’il soit assez conforme aux vœux du Président. Des arbitrages ont été faits et comment ne pas imaginer que l’Elysée ait eu le dernier mot.
Alors, dans le casting d’un gouvernement resserré –pour l’heure-, quels sont les ministres sur lesquels asseoir une popularité ? La plus forte popularité (indice synthétique calculé par Electionscope en décembre 2013) c’est pour Christiane Taubira avec 39% de satisfaits, suivie par Laurent Fabius (37,67%), et Arnaud Montebourg (35,67%). En manque de crédibilité, il y a Stéphane Le Foll à 23,6%, ce qui est peu surprenant étant donné la crise du secteur agricole. Mais il lui faudra très vite corriger le tir, sa position de porte parole pourrait le desservir ou au contraire, bien maîtrisée, elle pourrait l’aider à asseoir une indispensable crédibilité.
Enfin, ce gouvernement annoncé comme un gouvernement de combat, ressemble plus à un gouvernement de combat "électoral". Bien avant 2017, de nombreux scrutins s’annoncent : les européennes, les sénatoriales qui risquent d’être très disputées, voire d’être perdues pour la gauche, si l’on en juge par les derniers résultats des municipales ; puis viendront les régionales et les cantonales.
Confiance et vote de confiance : quelle crédibilité révélée ?
Enfin, il reste un élément incontournable : la confiance. Confiance qu’il va falloir rétablir auprès des français, mais aussi et avant tout dès demain. Il semblerait que ce gouvernement ait été construit en faisant une place à tous les courants et alliés –qui ont bien voulu se rallier, à la différence des verts-. C’est un objectif de très court terme qui est visé ici, autrement dit le vote de confiance qui interviendra à l’issue du discours de politique générale de Manuel Valls. La confiance sera votée mais combien vont s’abstenir ou voter contre ? Ce vote sera le premier et véritable indicateur de la crédibilité du gouvernement Valls, il donnera aussi une indication quant à sa véritable marge de manœuvre.