La semaine dernière, les résultats de la loterie de la carte verte sont tombés. Ils pourraient cependant être les derniers. Donald Trump veut mettre un terme à ce jeu de hasard qui, depuis 1995, a permis à un million de personnes d'obtenir la résidence permanente. Dans l'hexagone, les candidats hésitent entre inquiétude et espoir.
C'est une porte d'entrée vers le rêve américain. Chaque année, en octobre, les Etats-Unis organisent une loterie. Elle permet à 50 000 étrangers d'obtenir une carte verte, ou greencard, et donc la résidence permanente. Cette initiative a été lancée par le Congrès américain en 1995 afin de maintenir une diversité d'immigrants. Pour tenter sa chance, il suffit d'être né dans un pays éligible, d'avoir au moins de 18 ans, de posséder le baccalauréat ou de justifier d'une expérience professionnelle de deux ans.
En 2013, selon le gouvernement américain, les Français avaient 1,25 % de chance d'être sélectionnés. Si certains jouent inlassablement, cette année pourrait bien être la dernière. Depuis l'attentat de New-York, en octobre 2017, perpétré par un Ouzbek qui avait gagné à la loterie, Donald Trump réclame la fin de ce système. Sa suppression pourrait être soumise au vote, à la Chambre des représentants, dès le mois de juin.
Dans le Loiret, Elise Cantiran, 32 ans, ne cache pas son inquiétude. L'enseignante, qui rêve de travailler aux Etats-Unis, s'est rendue deux fois à l'université de Berkeley pour y faire des recherches. « J'aimerais que Trump ne supprime pas la loterie. C'est déjà assez compliqué... », raconte la jeune femme qui a tenté sa chance pour la première fois l'an dernier.
Amaury Suchon, 29 ans, est lui aussi professeur. « J'ai déjà passé cinq ans dans ce pays sous différents visas. Ils ne permettent pas de s'installer confortablement et par conséquent de se projeter à long terme », regrette-t-il. En attendant de pouvoir vivre aux Etats-Unis, le Français s'est établi à Toronto, au Canada. Depuis 2012, il joue à la loterie de la carte verte. Toutefois, son éventuelle suppression ne le préoccupe pas : « Ce serait dommage mais ça ne changerait pas ma vie. C'est comme au Loto... Vous ne pouvez pas compter dessus. »
Pour ceux qui sont tirés au sort, la partie est loin d'être gagnée. « Vous pouvez être sélectionné et ne jamais obtenir la carte verte. Il faut suivre la procédure en temps et en heure pour maximiser ses chances », indique Me Maud Poudat, avocate spécialisée en droit de l'immigration. « Certains sont éliminés car ils ne respectent pas les critères ou ont coché des informations fausses», confirme Me Vanessa Elmaleh. Le temps moyen d'obtention de la carte verte est généralement de six à douze mois après les résultats.
Quand mérite rime avec élite
La loterie reste un système unique, à la portée de tous : « Il y a plusieurs procédés pour obtenir une carte verte mais gagner à la loterie, c'est comme un court-circuit», explique Me Vanessa Elmaleh. Me Maud Poudat confirme : « Cette catégorie est beaucoup plus flexible .» Donald Trump, pourtant, envisage de la remplacer par une sélection au mérite. Les candidats seraient notés selon leur âge, leurs études, leur volonté d'investir ou encore leur maîtrise de l'anglais. « Les Français auraient peut-être plus de chance d'obtenir une carte de résident permanent au niveau de l'éducation moyenne et du niveau des diplômes, mais aussi de l'expérience professionnelle », analyse Me Maud Poudat.
Ce système n'a rien d'inédit. Le Canada a été le premier à instaurer un système à points. Pour être admissible à la résidence permanente, le candidat doit obtenir au minimum 67 points. Le pays accueille aussi les personnes travaillant dans des domaines nécessitant de la main-d'oeuvre. Là-bas, mérite ne rime pas avec élite. Car c'est bien là la crainte majeure chez les démocrates. Selon eux, ce projet de loi tournerait le dos à l'Histoire de l'Amérique, terre d'accueil d'immigrants.
C.L