Viande de cheval : j'ai mal à mon Picard

(JOEL SAGET / AFP)

Quand le "scandale-à-la-viande-de-cheval" a éclaté, je ne me suis pas sentie particulièrement concernée. C'était en Irlande et au Royaume-Uni, dans des steaks congelés de hamburgers. Quand le "scandale-à-la-viande-de-cheval" s'est importé en France, j'ai doucement rigolé : je n'achète JAMAIS de plats préparés Findus, ma conscience nutritionnelle me l'interdit. Quand le "scandale-à-la-viande-de-cheval" a commencé à concerner des plats Picard, j'ai moins fait la maline. Oui, je l'avoue, je mange des plats préparés de cette marque quand je suis en horaires décalés au boulot. On plaisante même, en disant que Picard sponsorise les repas de toute la rédaction, à coups de hachis parmentier, parmentier de canard, lasagnes au bœuf (enfin c'est ce que nous croyions) ou aux épinards, gratin de thon aux légumes etc... "Il est bon celui-ci ?" "Tu l'as aimé celui-là?" On s'échange nos impressions, on compare les ingrédients...

Parce que Picard, dans nos esprits d'urbains soucieux de manger bien, vite et pas cher, jouit d'une certaine crédibilité. Peut-être parce qu'il utilise peu d'huile de palme, qu'il a mis en place un packaging attractif, qu'il propose plein de légumes surgelés, que ses recettes sont plutôt bonnes, et qu'il s'est doté d'une "charte qualité" : les ingrédients sont bien listés, la provenance est souvent indiquée, les additifs sont limités, même si on trouve, entre autres, de l'amidon de maïs, de la maltodextrine de blé et surtout, à mon grand désarroi, beaucoup de crème et de lait. La liste des ingrédients "des lasagnes formule express", retirées des rayons depuis le "horse gate", n'a pas de quoi faire peur par exemple :

lasagnes picard

Mais force est de constater que si la provenance de l'emmental râpé est spécifiée, celle de "la viande bœuf hachée" ne l'est pas. Le plat de mon collègue, l'autre jour, ne précisait pas non plus la provenance du poulet (élevé en plein air et fermier j'en suis sûre...). En regardant au dos du plat, on apprenait seulement qu'il avait été fabriqué au Luxembourg (par Tavola, filiale de Comigel ?).

Picard est loin d'être le seul à omettre la provenance de la viande dans ses plats préparés, puisque ce n'est pas obligatoire. Le fait qu'ils puissent contenir contiennent de la viande de cheval produite en Roumanie n'est pas ce qui m'écœure le plus, même si le manque de transparence est condamnable et pose question sur toute la filière. Picard assure en outre sur son site que le retrait des lots de lasagnes est "préventif", en attente "des résultats d'analyses ADN" [à 17h30, les résultats sont tombés, il y a bien de la viande de cheval dans ces deux lots analysés]. Non, ce qui me dégoûte, c'est d'apprendre au détour de ce reportage de France 2 que dans mon délicieux hachis parmentier, je mange, à défaut de viande hachée, un mélange de déchets à base de muscles, d’os et de collagène. Une mixture qui répond au doux nom de "minerai de bœuf" (ou "minerai de cheval"?).

 

 

Je me doutais bien, vu le prix (1,99 euros), que je ne mangeais pas un bon filet de vache limousine nourrie à l'herbe. Mais bon... Le fait de le voir en chair et en os, si je puis dire, achève de me convaincre d'arrêter de manger des plats préparés Picard... au moins à la viande... au moins pendant un certain temps... Tant que j'aurais le courage de me préparer moi-même à manger. Il me reste aussi mon charcutier-traiteur, où la part de hachis parmentier n'est finalement pas beaucoup plus chère et tellement meilleure. Mais j'y reviendrai aux plats préparés, je le sais. D'ici là, les autorités auront peut-être obtenu l'affichage de la provenance de TOUS les ingrédients. On pourra alors choisir en conscience...

 

Mise à jour à 15h : pour la mention de l'origine de la viande dans les plats cuisinés, je peux toujours attendre. La Commission européenne a jugé "prématuré" de la rendre obligatoire, le scandale de la viande de cheval ne constituant pas une crise sanitaire...