La "Folle journée" de Nantes entre dans la danse mercredi prochain

La 23e "Folle journée" de Nantes aura lieu du mercredi 1er au dimanche 5 février. Elle a pour titre (trop pompeux?) "le rythme des peuples", ce qui veut nous dire que les peuples ont le rythme dans la peau et ainsi... qu'ils dansent. Et c'est donc la danse dans tous ses états qui sera le thème de cette "Folle journée". Revue de détail.

L'APOTHEOSE DE LA DANSE

Le premier concert, mercredi à 17 heures 30 , est tout à fait éclairant: la "7e symphonie" de Beethoven que Wagner surnommait "l'apothéose de la danse". Or il n'y a pas dans cette symphonie de mouvements de danse à proprement parler.

C'est ainsi que René Martin a donc conçu une programmation qui ne va pas se limiter à des partitions où la danse est une évidence. Mais aussi à des oeuvres où les danses sont cachées, où la danse est un état d'esprit.

LES GRANDS BALLETS

Mais commençons par le plus simple: la danse étant liée au ballet, on entendra les plus beaux d'entre eux... sans danseurs. Pour constater que "Casse-Noisette", "West side story", le "Daphnis et Chloé" de Ravel sont des musiques admirables en soi. Admirables, on le savait déjà de l' "Oiseau de feu" ou du "Sacre du printemps" , les chefs-d'oeuvre de Stravinsky. Mais on écoutera avec la même fascination "Le festin de l'araignée", bijou du français Albert Roussel ou "Le tricorne" du grand Manuel de Falla.

LES DANSES D'EUROPE

La danse est dans le titre de bien des partitions, avec souvent une connotation folklorique mais évidemment magnifiée par de très grands compositeurs. De ce point de vue, ce sera un tour d'Europe: les fameuses "Danses hongroises" de Brahms, et leur immédiat contrepoint, les "Danses slaves" de Dvorak. Mais aussi les "Danses allemandes" de Schubert, les superbes "Danses roumaines" de Bartok (un Bartok très accessible!) ou les "Rhapsodies roumaines" d' Enesco. Comme les "Danses de Galanta" du Hongrois Kodaly, merveilleuse partition là aussi. On entendra des "Danses norvégiennes" (Grieg), des "Danses espagnoles" (Granados) et, en-dehors d'Europe, la "Danzon 2" du Mexicain Marquez, morceau-star des orchestres latino-américains.

Les danseurs italiens sous Louis XIII, gravire de Jacques Callot Collection privee. ©Jean Bernard/Leemage

Les danseurs italiens sous Louis XIII, gravure de Jacques Callot Collection privée. ©Jean Bernard/Leemage

VALSES ET AUTRES DANSES

Toutes les danses seront à l'honneur à commencer par la plus fameuse, la valse: avec la dynastie Strauss mais, avant elle (car ce genre existait déjà), avec l' "Invitation à la valse" de Weber, la Valse de la "Symphonie fantastique" de Berlioz ( le choix ayant été fait, comme ici, de ne pas donner l'oeuvre intégrale pour privilégier ce qui s'y rapporte à la danse), les "Valses" pour piano de Brahms, celles de Chopin, la "Valse triste" de Sibelius, la fameuse "Valse" de Chostakovitch ou l'admirable "La Valse" de Ravel, funèbre et somptueuse, une valse pour mettre fin à toutes les valses.

Mais le tango sera là aussi, Richard Galliano se chargeant de rendre hommage au maître Astor Piazzolla... et à ses propres musiques (une Milonga qu'il a composée). Et les "Mazurkas"  ou la (moins connue) "Tarentelle" de Chopin,  la "Pavane" de Ravel, les "Menuets" de Mozart, la "Bourrée fantasque" de Chabrier , la "Polka" de Stravinsky, des Fandangos ou des Sarabandes. Les danses peuvent être moins dansantes (les "Danses des compagnons de David" de Schumann), plus contemporaines ("The Chaiman dances" de l'Américain John Adams), se cacher derrière un titre à succès ("L'amour est enfant de bohème", l'air admirable de "Carmen", est une Habanera)

DU ROI DAVID AUX COURS EUROPENNES

On retournera aux sources. D'abord avec le "Roi David", oratorio si rarement joué d'Arthur Honegger: c'est David dansant quasi nu devant l'Arche, qui a inventé la danse, comme il est relaté dans l'Ancien Testament. Plus près de nous, on aura des programmes de danses du Moyen Age, de la Renaissance (les "Danceries"), des cours européennes aux XVIe ou XVIIe siècle avec des programmes qui étaient spécialement conçues pour elles. L'époque baroque sera très présente: à commencer par Bach, dont on oublie parfois que les "Suites pour violoncelle seul" ou les "Partitas" sont en fait des suites de danses de différents rythmes. Le répertoire de clavecin ou de viole fourmille de danses, chez Rameau (rigaudons), Couperin (Forlane), Marin Marais.

Et la danse peut aussi être "macabre" (Berlioz, Liszt, Saint-Saëns)

Danseurs chinois C) Hu Huhu/ Xinhua

Danseuses chinoises C) Hu Huhu/ Xinhua

DANSES CACHEES, ESPRIT DE LA DANSE

On fera enfin un tour vers d'autres civilisations dont le rapport à la danse est différent du nôtre (Chine ou Japon). Enfin, à la lecture de certaines oeuvres, on se demandera évidemment ce qu'elles font dans un tel programme. Alors les plus intégristes ronchonneront, les autres... se laisseront de toute façon porter par la beauté de la musique, faisant confiance à René Martin pour y avoir trouvé l'esprit de la danse. Sous forme d'un mouvement (le magnifique "Concert" de Chausson), d'un rythme ou d'une manière d'être (la 7e de Beethoven, justement)

Et l'on marchera aussi beaucoup. Les musiciens (la "Marche nuptiale" de Mendelssohn et tant d'autres) et les auditeurs, dans ce dédale de salles, cette ruche humaine que sera la Cité de la Musique de Nantes. Car la marche... est aussi une danse.

(J'ai délibérément choisi dans cet article de ne pas donner des rendez-vous précis: parce que beaucoup de ces oeuvres reviennent à différents jours et différentes heures, parce qu'elles reviennent aussi avec d'autres interprêtes et dans des programmes organisés autrement, quand il s'agit de danses brèves. Le site: www.follejournee.fr pour plus d'informations, y compris sur les programmes)