Dialogue du vent et de la mer

Une tempête a secoué les côtes de la Manche il y a environ une semaine, et un autre coup de vent (de moindre ampleur que Christian) est attendu dans la nuit de dimanche à lundi dans le nord-ouest. Tempête, coup de vent, jusque là rien d'extraordinaire en cette saison automnale (fort douce !!).

Une tempête génère chaque fois une mer déchaînée et un spectacle saisissant. L'occasion pour certains mordus de météo d'immortaliser la scène.

Après le passage de la tempête, les côtes de la Manche - comme ci-dessous à Plougasnou dans le Finistère - ont retrouvé un ciel de traîne actif. Ce temps se caractérise essentiellement par des averses ponctuelles mais parfois fortes; c'est ce que l'on appelle, dans le jargon météorologique, un grain.

Composition(s)

La mer a toujours été une source d'inspiration, quelle que soit la matière première travaillée.

L'écrivain et diplomate François-René de Chateaubriand a passé son enfance en Bretagne, à Saint Malo. C'est donc tout naturellement qu'il fut marqué, dès son plus jeune âge, par la compagnie d'Éole. Il exprime, dans le poème ci-dessous, ses plus fortes impressions.

La mer

Des vastes mers tableau philosophique, 
Tu plais au coeur de chagrins agité : 
Quand de ton sein par les vents tourmenté,
Quand des écueils et des grèves antiques 
Sortent des bruits, des voix mélancoliques, 
L'âme attendrie en ses rêves se perd, 
Et, s'égarant de penser en penser, 
Comme les flots de murmure en murmure, 
Elle se mêle à toute la nature : 
Avec les vents, dans le fond des déserts, 
Elle gémit le long des bois sauvages, 
Sur l'Océan vole avec les orages, 
Gronde en la foudre, et tonne dans les mers.

Mais quand le jour sur les vagues tremblantes 
S'en va mourir ; quand, souriant encor, 
Le vieux soleil glace de pourpre et d'or 
Le vert changeant des mers étincelantes, 
Dans des lointains fuyants et veloutés, 
En enfonçant ma pensée et ma vue, 
J'aime à créer des mondes enchantés 
Baignés des eaux d'une mer inconnue. 
L'ardent désir, des obstacles vainqueur, 
Trouve, embellit des rives bocagères, 
Des lieux de paix, des îles de bonheur, 
Où, transporté par les douces chimères,
Je m'abandonne aux songes de mon coeur.

Pour Claude Debussy, la mer fut aussi la source d'une prodigieuse exaltation. Voici ce qu'il écrit au compositeur français André Messager en 1903:

"Vous ne savez peut-être pas que j’étais promis à la belle carrière de marin, et que seuls les hasards de l’existence m’ont fait bifurquer. Néanmoins j’ai conservé une passion sincère pour Elle. Vous me direz à cela que l’Océan ne baigne pas précisément les coteaux bourguignons… ! […] Mais j’ai d’innombrables souvenirs ; cela vaut mieux en mon sens, qu’une réalité dont le charme pèse généralement trop lourd sur votre pensée"

C'est en effet en Bourgogne, pendant l'été, qu'il a composé ses trois "esquisses symphoniques" dont le thème est la mer: "De l'aube à midi sur la mer", "Le Jeu des vagues", et enfin "Le Dialogue du vent et de la mer". Claude Debussy arrive à mettre en musique la houle, les jeux de lumières sur l'eau, le flux et le reflux des vagues, et, au final, la tempête.

La France lui a longtemps rendu hommage, grâce au billet de 20 francs, avant que l'euro ne remplace nos billets par de froides structures architecturales.

"De l'aube à midi sur la mer"...

puis, "Dialogue du vent et de la mer".