Le père Noël n'existe pas

Il y a bien un moment où il allait s'en rendre compte. Dans mon souvenir, à Noël, toute ma classe de CP avait passé le cap, sauf un garçon qui répétait en boucle qu'il ne voyait pas comment ses parents pourraient passer par la cheminée. Maintenant qu'il est en CP, il allait bien s'en rendre compte.

Bref, en octobre j'ai révélé à mon fils que le père Noël n'existait pas. "Comme ça ? Alors que ce n'était même pas dans l'actu ?" s'est étonné mon chef. "On aurait dû en parler d'abord", m'a reproché mon mec. "Et alors, il t'a mordue?" m'a demandé mon frère. Oui, quand mon frère m'a dévoilé le pot aux roses, je l'ai croqué en pleine poitrine, par vengeance et par dépit.

Heureusement pour moi, mon fils n'a pas eu la même réaction. Ce jour-là, Ulysse était inquiet que ses dents ne tombent pas et nous parlions de la petite souris. Comme je ne prends pas mon fils pour un débile et que j'ai une peur bleue des rongeurs, je lui ai dit : "Mais tu sais qui c'est la petite souris?" "Les parents ?" "Oui, mon cœur. Et derrière quel autre personnage imaginaire se cachent les parents, à ton avis ?" "..." "Un qui fait des cadeaux. Tu ne vois pas ?"

Oui, c'est un peu vache, mais déjà, à Noël dernier, il arrêtait pas de répéter : "Aslemhassan, il dit que le père Noël il existe pas que c'est les parents, c'est vrai maman ?" Et moi je chuchotais "chut", "chuuuut", parce qu'il était à côté de sa petite sœur. Je me suis dit qu'il était mûr pour la vérité. En fait non. Pendant trois jours, il s'arrêterait au milieu du repas, ou en pleine conversation, pour nous confier : "Quand même je suis triste." Et mon mec me répétait que j'aurais "dû lui en parler d'abord quand même, c'est le genre de décision qu'on prend à deux."

Depuis, il a fallu persuader Ulysse que sa petite sœur avait encore le droit de croire au père Noël jusqu'à à ses six ans (je lui ai raconté qu'une petite fille en colère peut faire des choses terribles, surtout s'il a le buste à proximité de ses dents).

Mais le point positif, c'est qu'il a cessé de dire, à chaque fois que je soulignais que ses envies de cadeaux étaient coûteuses : "Je le demanderai à Noël, comme ça c'est le père Noël qui paiera."

 

Les courses de Noël

Le plastique s'étire jusqu'à devenir transparent. De l'autre côté, quelque chose tente de sortir. Lentement une pointe traverse la fine épaisseur blanche et je vois apparaître les crocs acérés d'un spinosaure en colère.

Il ne manquait plus que ça, l'attaque du spinosaure ! Je suis à pieds, sous la pluie, dans une côte qui pourrait figurer dans les étapes de montagne du tour de France, et l'un des immenses sacs plastique de mes courses de Noël et en train de me lâcher. Mentalement, je fais la liste de mes erreurs.

1Vouloir être fashion

Mais pourquoi, pourquoi, ai-je mis des bottes à talons pour aller chez Oxybul ? Je me suis dit qu'il n'y avait pas raison de ne pas se faire belle, même quand on va acheter des jouets.

2Se surestimer

A quel moment exactement ai-je continué à acheter alors que je n'avais définitivement pas la force de porter tous ces colis ? Et pourquoi, pourquoi, ai-je choisi une maison de poupée en bois ? C'est mon mec qui trouvait ça plus charmant que le château Playmobil. Mais putain, ce que c'est lourd le bois.

3Accepter les commandes des autres

Comment je n'ai pas vu l'arnaque quand trois grands-parents sur quatre m'ont dit de m'occuper des cadeaux et qu'ils me rembourseraient ?

4Oublier mes amis les livreurs

Et quelle est la raison pour laquelle je n'ai pas fait les courses sur internet cette année ?

5Etre moins débile

Et comment je peux être assez conne pour oublier les cadeaux d'un enfant après deux heures d'enfer chez Toys'R Us ?

Je suis plutôt du genre égalité des sexes, mais à cette minute, je rêve que le mec qui me dépasse en parlant au téléphone s'arrête et me propose de porter mes paquets comme dans les années 50. Mais visiblement, il est pour l'égalité des sexes aussi.

J'ai mis 24 heures à m'en remettre. J'ai encore des courbatures.

L'année prochaine, je leur offre des plumes.