Faut-il croire que les Françaises sont des super-mamans ?

Une cuillère pour maman © GETTY

Le bébé de ma copine a fait ses nuits avant mon bébé. Oui, mais le mien a marché avant le sien. Oui, mais le sien sait baragouiner plus que trois mots. Oui, mais le mien ne mange pas comme un animal.

C'est un réflexe complètement humain : quand on est voisins, on se compare. C'est ce qui est arrivé à l'Américaine Pamela Druckerman, qui publie Bébé made in France. Quels sont les secrets de notre éducation (version traduite de son best-seller en anglais). Sauf qu'elle n'a pas trouvé grand-chose pour faire peser la balance de son côté. L'Amérique était battue à plates coutures. Alors faut-il vraiment croire que les Françaises ont une leçon à transmettre au monde en matière d'éducation (et sur tous les autres sujets d'ailleurs) ?

Enfiler les perles

Sans surprise, je ne me reconnais pas une seconde dans ce portrait de la Française. Rien de plus normal puisque c'est en réaction à ces mères parfaites qui géraient parfaitement leur progéniture parfaite que j'ai écrit Mauvaises Mères en 2008 avec Nadia Daam et Johana Sabroux. Nous, nous n'y arrivions pas. La grossesse était un calvaire, les enfants ne dormaient pas et nous collaient la honte au restaurant. Comme Pamela Druckerman, je devrais donc penser que la majorité de mes compatriotes possèdent un don qui m'échappe (un gène pourri qui doit traîner quelque part, je suppose).

Le livre version américaine (c) AFP

Mais non. J'ai plutôt l'impression qu'on est dans un monde qui adore enfiler les perles, façon Edith Cresson. "Les Japonais sont des fourmis", "les Anglais sont tous homosexuels", etc. Un an plus tôt, une autre Américaine d'origine chinoise, Amy Chua, assurait que "les mères chinoises étaient supérieures", affichant la réussite insolente de ses enfants après une éducation à la schlague.

La fin de l'enfant roi

En filigrane apparaît alors un point commun. La fin de l'enfant roi à qui l'on cède tout. Oui, bien élever, ce n'est pas faire plaisir à sa merveilleuse tête blonde. C'est lui apprendre à respecter les contraintes, et avant tout la vie des autres, et en premier lieu la liberté de sa mère. Ce sont les parents qui décident, il faut arrêter le pipeau du style "l'enfant sait". L'enfant ne sait rien du tout et c'est moi qui fixe les limites, même si c'est parfois bien plus dur que de laisser couler.

Je soupçonne fortement Pamela Druckerman et Amy Chua du même penchant : forcer le trait. Trouver l'image qui va marquer (les salsifis en hors-d'œuvre, vraiment ? Viens dîner chez moi, Pamela). Parce que c'est sympa, les clichés, les gens comprennent bien, on résume la situation en une phrase du type "les Japonais sont des fourmis". Forcer le trait, coller à une tendance, c'est un peu ce que je me refuse à faire. Même quand c'est pour coller au cliché contraire.