Les éditions Stock, dont il était le patron, l'ont annoncé lundi : Jean-Marc Roberts vient de mourir, à 61 ans, d'un cancer.
L'éditeur de récits- tranches de vies
Editeur, Jean-Marc Roberts s'était fait une spécialité de récits autobiographiques à l'estomac, tranches de vie servies saignantes et couronnées par le succès. Parmi tant d'autres, le best-seller et prix Femina 2008, Où on va papa ?
Jean-Louis Fournier y racontait, de façon désopilante, sa difficile paternité, avec deux fils handicapés. "Grâce à eux, j’ai eu des avantages sur les parents d’enfants normaux. Je n’ai pas eu de soucis avec leurs études ni leur orientation professionnelle. Nous n’avons pas eu à hésiter entre filière scientifique et filière littéraire. Pas eu à nous inquiéter de savoir ce qu’ils feraient plus tard, on a su rapidement que ce serait : rien." Le rire cachait la tendresse.
De Nina Bouraoui à Colombe Schneck, d'Aurélie Filippetti, aujourd'hui ministre de la Culture, à Philippe Claudel (Goncourt des lycéens en 2007 pour Le rapport Brodeck, prix Renaudot 2003 pour Les Ames grises), la liste est longue des auteurs que Jean-Marc Roberts a poussés, soutenus ou lancés, les encourageant dans une littérature presque toujours débordant d'émotions, qu'elle soit intimiste ou fantastique.
"Fier d'avoir publié" Marcela Iacub
Dans le filon "autobiographie scandaleuse", son dernier coup aura été la publication du Belle et Bête de Marcela Iacub. Il se disait "fier", avait-il confié à l'Obs, de l'avoir publié "pour des raisons littéraires. Marcela Iacub voulait être romancière, elle pensait que la théorie l'étouffait, et son livre m'a estomaqué comme, autrefois, "le Boucher", d'Alina Reyes."
Non, rien de rien, il ne "regrettait rien", et surtout pas une polémique qui ne pouvait que doper les ventes. Cette empoignade du microcosme parisien a probablement fait rire cet homme malade qui voulait "tout prendre à la blague". Sauf l'amitié, qu'il prenait assez au sérieux pour consacrer un de ses derniers livres à François-Marie (Banier), photographe devenu sulfureux depuis l'affaire Bettencourt.
Dans un hommage publié mardi 26 mars dans Libération, Marcela Iacub tient d'ailleurs à "remercier" ceux qui "auraient aimé" que son roman "soit interdit"car "en prenant les allures de la pauvre fille possédée par le démon du film L'Exorciste vous l'avez amusé, vous lui avez montré à quel point ce qu'il avait fait avec moi compte, vous lui avez permis de comprendre à quel point il était le plus grand des éditeurs".
"Deux vies valent mieux qu'une"
La polémique Iacub venait à peine de se calmer quand la nouvelle a filtré : le dernier livre de Jean-Marc Roberts allait paraître chez Flammarion début mars.
"Deux vies valent mieux qu'une est très court,", explique France Inter, "à peine une centaine de pages et dégorge de vie et de soleil alors que c'est le livre d'un homme qui est à l'hôpital et qui affronte une terrible maladie." Et d'ajouter : "C'est superbe, drôle, émouvant, sacrément vivant." Même si ce père de cinq enfants y notait aussi, selon L'Express : "Je ne veux rien sinon guérir".