Je fais suite à mon texte précédent car j'ai assisté, depuis, à l'Assemblée Générale annuelle du C.A.A.P.G. lundi 8 février dernier.
Qu'est-ce-que le C.A.A.P.G. ?
C'est le Centre d'Ampélographie Alpine Pierre Galet. Ce centre a vu le jour en 2007 à l'initiative de trois personnes, Roger Raffin, Pierre Galet qui, malgré ses 95 ans, était encore présent lundi dernier et José Vouillamoz, jeune chercheur suisse à l'Université de Neuchâtel, qui tout en continuant l’œuvre de Pierre Galet travaille sur l'identification des cépages alpins oubliés.
Son siège est à Montmélian, soutenu par la municipalité qui a en plus favorisé l'ouverture d'un Musée Régional de la Vigne et du Vin.
Ses objectifs
- Valoriser les archives de pierre Galet en créant un centre de documentation ouvert à tous.
- Créer un vignoble conservatoire pour sauvegarder et étudier les anciens cépages alpins en partenariat avec les autres régions viticoles alpines (Valais, Val d'Aoste....). Pour retrouver des vieux cépages, les recherches se font au bord des maisons et dans les vieilles vignes.
- Constituer un pôle de formation consacré à la vigne, l’œnologie et le perfectionnement à l'ampélographie.
Pierre Galet (voir mon texte précédent), dans sa prise de parole, nous a cité quelques anecdotes tirées de son grand vécu ; par exemple, il a rappelé qu'il avait il y a 60 ans, avec l'aide des services de la Chambre d'Agriculture de Chambéry, délimité les contours des vignobles de Savoie. Il nous a fait part de son indignation suite à l'arrachage en Crimée, par les russes, d'une des plus grandes collection de cépages au monde après celle de Vassal à Marseillan près de Montpellier.
L'AG du CAAPG, en dehors de la présentation des rapports obligatoires pour toute association, présente deux intérêts, la présence de conférenciers et la dégustation de vins issus de cépages rares ou oubliés,
La conférence
Cette année les responsables de l'association ont invité Madame Anna Schneider reconnue pour être une des meilleures expertes de l'ampélographie italienne. Elle enseigne cette science à la faculté d'Agronomie à l'Université de Turin. Elle est également chercheuse au CNR italien, Institut pour la Protection Durable des Plantes où elle travaille sur la sélection génétique et la caractérisation des cépages.
Son exposé traitait de l'évolution de l'ampélographie. Je rappelle que l'ampélographie est la science, née en 1825, qui permet de reconnaître et de déterminer un cépage pour pouvoir le nommer correctement. Son évolution est caractérisée par l'analyse de l'ADN et on parle ainsi d'ampélographie moléculaire pour la distinguer de l'ampélographie classique.
L'ampélographie classique
Elle est basée sur l'étude des feuilles des rameaux et des grappes. Malgré l'évolution elle garde toute son utilité, c'est un outil pour tout le monde, pas besoin d'équipements spécifiques, elle permet de valider les résultats de l'ADN et de valider des références historiques.
L'ampélographie moléculaire
Elle permet d'étudier la diversité génétique en isolant des marqueurs moléculaires (petites sections d'ADN). Si plusieurs marqueurs entre cépages sont identiques il y a une probable relation de parenté entre eux.
Elle présente plusieurs avantages : l'ADN peut être extrait à partir de tous les organes et tissus de la plante à tous moments de la saison, il peut être envoyé par courrier, il est objectif et fiable et ne coûte pas très cher.
L'ADN d'un cépage permet d'établir un profil génétique, c'est comme une empreinte digitale. Il a permis de corriger quelques erreurs, par exemple : le cépage Müller-Thurgau a toujours été considéré comme le croisement de Riesling et de Sylvaner, on sait aujourd'hui, grâce à l'ADN, qu'il est issu du croisement de Riesling et de Madeleine Royal. L'ADN a également permis d'identifier des synonymies, même cépage portant un nom différent selon la région ou le pays où il est cultivé, par exemple : le Primitivo des Pouilles (Italie) est le même que le Zinfandel en Californie, le Persan de Savoie est le même que le Bécuet en Italie et il y a d'autres exemples comme ceux-ci.
L'ampélographie moléculaire permet aussi la généalogie en retrouvant les géniteurs des cépages lorsque ces derniers n'ont pas disparus. Ainsi on sait que le Merlot a comme parents le Cabernet franc et la Magdeleine Noire des Charentes. La Syrah a comme parents la Mondeuse Blanche et le Dureza.
Enfin l'ADN peut être source d'erreurs car étudié en laboratoire, c'est pourquoi l'ampélographie classique garde toute son utilité et son importance car son étude se pratique sur le terrain.
Toutes ces recherches et tous ces efforts pour retrouver ces vieux cépages ou cépages oubliés représentent un travail « d'archéologie viticole » et on peut se demander à quoi cela peut servir ?
Je pense qu'il est effectué afin de retrouver le potentiel oublié des vieux cépages et permettre ainsi de produire des vins de demain.