Attentats de Paris : Des Héros !

Lassana Bathily, employé du supermarché casher de la Porte de Vincennes (Paris), témoigne après la prise d'otage, le 9 janvier 2014. (BFMTV / FRANCE 2)

Avec acuité et pertinence, le groupe Expérience décrit les travers de notre époque. C'était déjà le cas avec Diabologum, précédent groupe de son leader, Michel Cloup, et devenu une référence hexagonale du rock indé, intelligent et lettré.
Dans cette critique permanente des médias, le groupe se réfère à Guy Debord. Mais avec des guitares...ce qui passe mieux pour un plus large public et spécifiquement auprès de la jeunesse.

Dans des Héros (2008), Expérience parle justement de la jeunesse dans une radiographie lucide et désespérée. De l'exclusion, de la perte des idéaux (le seul espoir révolutionnaire est de réussir une carrière), de la tentation du "c'était mieux avant" et de la société du spectacle. Et Expérience clame haut et fort : ils nous vendent des idoles, nous voulons des héros.

Le morceau peut être la bande-son de notre époque, de sa vacuité, ses chocs sociétaux et de son vaste miroir aux alouettes. Mais il est a contrario aussi le morceau du moment car la France s'est finalement trouvée des héros. Ce ne sont pas même pas les 4 millions de personnes qui ont défilé dimanche partout en France - l'union fait la force mais a tendance à diluer le courage. Mais ces quatre héros qui ont trouvé ont résisté, à leur manière, pendant les prises d'otage de l'imprimerie de Dammartin-en-Goële et du supermarché casher de la Porte de Vincennes. Un - Yoav Hattab - en est mort, abattu, en essayant de désarmer Amédy Coulibaly. Les trois autres sont heureusement vivants : Lassana Bathily, Lilian Lepère et Michel Catalano.

Des héros modestes et ordinaires. Vous ou moi. Ce ne sont pas des hommes politiques ou des intellectuels qui pourraient durablement influer sur le pays (on espère toujours) mais le symbole est d'autant plus fort. Et sans tomber dans l'angélisme un peu béât de Jacques Attali (son récent Devenir soi) : on peut aussi se prendre un peu en main et agir.  Des symboles, notre République en a rudement besoin. Préférons donc Lassana à Nabilla, Lepère à Lepers. Car si la France a été unie dans ses victimes (des juifs, des musulmans, des chrétiens, des athées), elle l'a été aussi dans ses héros. Quand la France s'entre-déchirera sur ses politiques sécuritaires ou migratoires, sur les remèdes qu'il faudra prodiguer, on pourra aussi se référer à ses quatre-là et trouver un début de consensus et de vision commune. A minima.