Une étude menée par le Cnesco auprès de 16 000 élèves de 3ème et de Terminale vient éclairer le rapport des élèves à l’actualité et à l’information. S’ils consultent plus les nouveaux médias en ligne, les élèves font davantage confiance aux médias traditionnels, surtout s’ils sont de milieu favorisé.
Sources d’information et confiance dans les médias
Dans l’ensemble les élèves montrent un certain intérêt pour l’actualité et l’information, qui croit entre la fin du collège et la fin du lycée : 54% des élèves de 3ème s’intéressent à l’actualité, 68% des élèves de Terminale. L’approche de l’actualité et de l’information est délibérément plurielle : 51% des élèves de 3ème utilisent 4 médias ou plus, 68% des élèves de Terminale. Cependant les collégiens et les lycéens ne s’informent pas tout à fait de la même manière. La télévision est la première source d’information citée par les élèves de 3ème (92%), devant l’entourage (83%) et les réseaux sociaux (71%). Les élèves de Terminale placent l’entourage en première position (90%), à peu près au même niveau que la télévision (89%), devant les réseaux sociaux (84%).
Le plus gros écart entre élèves de 3ème et élèves de Terminale se situe sur les journaux en ligne, consultés par 40% des premiers et 66% des seconds (26 points de plus pour les lycéens), les réseaux sociaux (13 points de plus) et les sites web (12 points de plus).
Lorsqu’il s’agit de s’informer sur l’actualité nationale et internationale au moins une fois par semaine, 30% des élèves de 3ème vont vers un support numérique, 13% vers un support papier, une tendance renforcée en Terminale (46% et 17%).
L’entourage, en plus d’être une des premières sources d’information des élèves, est aussi celle dans laquelle ils ont le plus confiance (82% des élèves de 3ème, 77% des lycéens).
Parmi les médias, si les numériques sont davantage utilisés par les élèves, ce sont les médias traditionnels qui recueillent le plus leur confiance : 71% des élèves déclarent avoir confiance dans les journaux papier, presque autant dans la radio, alors même qu’ils utilisent sensiblement moins ces médias que ceux en ligne. 75% des élèves de 3ème ont confiance dans la télévision (mais 62% des élèves de terminale).
Inversement, les nouveaux médias, très prisés des élèves, ne leur inspire pas beaucoup confiance : un quart des élèves font confiance aux réseaux sociaux (27% en Terminale, 24% en 3ème) alors qu’il s’agit de la troisième source d’information citée, et un tiers fait confiance aux vidéos en ligne alors qu’elles sont citées comme source d’information par plus de la moitié des élèves.
On pourrait penser que cette prime aux médias traditionnels s’explique par une méfiance latente du numérique, mais les journaux en ligne inspirent confiance (51% des 3ème et 62% des lycéens), preuve que les élèves savent distinguer les contenus numériques.
Il faut noter que les élèves français se distinguent des autres élèves européens (étude ICCS, 2016 portant sur des élèves de 4ème), qui sont en moyenne 59% à faire confiance aux médias traditionnels (TV, radio, journaux) et 45% aux réseaux sociaux (écart d’une quinzaine de points contre une quarantaine en France).
La manière de s’informer : un marqueur social
L’étude note que « si les inégalités sociales ont presque disparu en matière d’équipement numérique (95% des 12-17 ans disposent d’une connexion internet à domicile, hors téléphonie mobile), elles peuvent se maintenir dans les usages. Cette dynamique est à rapprocher de celle qui existait avec la télévision à la fin du 20ème siècle ».
De fait, les pratiques varient selon l’environnement familial, plus ou moins favorisé.
En 3ème, 67% des élèves favorisés s’informent sur l’actualité, contre seulement 46% des élèves défavorisés. L’écart est quasiment identique en Terminale : 78% contre 59%. L’influence des parents est ici décisive : les élèves qui déclarent que leurs parents ne s’intéressent pas à l’actualité sont nettement moins nombreux à s’y intéresser (en 3ème, 26% contre 61% quand les parents s’y intéressent ; en Terminale, 42% contre 73%).
Les élèves les moins favorisés plébiscitent davantage la télévision (+7 points par rapport aux élèves favorisés), nettement moins la radio (-11 points). De même ils citent davantage les réseaux sociaux (+12 points en 3ème rapport aux plus favorisés, un écart qui diminue en grandissant, +3 points en Terminale), citent moins l’entourage comme source d’information que les plus favorisés (-11 points d’écart, diminuant en grandissant jusqu’à -2 points en terminale). Cet écart réseaux sociaux / entourage est le plus significatif en 3ème, et il s’équilibre en Terminale.
S’agissant de la confiance accordée aux sources d’information, il y a là aussi des différences en fonction de l’environnement familial. Les élèves issus de milieux favorisés font bien plus confiance aux médias traditionnels (jusqu’à 16 et 18 points d’écart pour les journaux papier et en ligne) et à leur entourage (11 points d’écart en 3ème, 16 en Terminale). Inversement, les élèves issus de familles défavorisées font davantage confiance que les autres aux réseaux sociaux (+9 points d’écart avec les élèves de milieu favorisé en 3ème, encore +6 point en Terminale).
Sans surprise, les élèves scolarisés en éducation prioritaire montrent un plus faible intérêt pour l’actualité, ont une confiance plus faible envers les médias traditionnels et font davantage confiance aux réseaux sociaux, vidéos et sites web que les autres.
L’éducation aux médias, diversement abordée mais efficace
L’éducation aux médias apparait dans les programmes scolaires en 2005, elle figure dans ceux de 2015 et dans ceux révisés de 2018 en Enseignement moral et civique (EMC). Or, seulement la moitié des élèves déclare que le sujet des médias a été abordé durant l’année (52% en 3ème, 56% en terminale). Les supports médiatiques ne sont pourtant pas absents : 65% des élèves de 3ème et 56% des élèves de terminale ont travaillé durant l’année à partir de documentaires ou d’émissions de télévision, 54% et 56% à partir de vidéos ou d’articles sur Internet, 49% et 38% à partir d’articles de journaux. Les médias sont donc présents dans les enseignements, mais davantage comme source que comme sujet d’étude propre.
L’actualité politique est peu souvent débattue : un tiers seulement des élèves (32% en 3ème, 37% en Terminale) déclare que des questions en rapport avec l’actualité politique sont souvent posées en cours.
Néanmoins l’impact de ces cours semble réel : 82% des élèves de 3ème considèrent que les cours d’EMC permettent de mieux comprendre les sujets politiques et sociaux d’actualité (70% en Terminale). Les ¾ estiment que l’école leur a permis de s’intéresser à ce qui se passe dans d’autres pays, 6 élèves sur 10 aux problèmes politiques et sociaux.
Sur le site du Cnesco, la note d'analyse de l'étude.
L’étude, réalisée en ligne auprès de 16 000 élèves de 3ème et de Terminale est le second volet de l’enquête « Ecole et citoyenneté » réalisée par le Cnseco au printemps 2018.
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