L’ex-conseiller éducation de Sarkozy démolit la politique éducative du Président

Voilà qui devrait porter un coup certain à la candidature Sarkozy, au moins auprès des enseignants, peut-être au-delà. Dans sa tribune publiée dans le Monde du 21 février, Dominique Antoine, conseiller sur les questions d’éducation auprès du Président de 2007 à 2009, a en quelques lignes décrédibilisé durablement la politique éducative de Sarkozy et donné du poids à celle du rival Hollande.

Disons-le tout de suite, on ne peut être dupe de la part de calcul dans ce retournement de veste. Ce n’est probablement pas le dernier, et c’est un signe supplémentaire du tangage du navire Sarko. En proposant la semaine dernière ses services à Vincent Peillon, chargé des questions d’éducation pour le candidat socialiste, Antoine n’a fait qu’anticiper la mise en garde de Hollande déclarant sur BFM le 19 février que les hauts fonctionnaires liés au système Sarkozy « devraient forcément laisser la place à d’autres ». Il a aussi manifestement réglé quelques comptes avec la Présidence, comme Luc Ferry avant lui, qui avait déjà dit tout le bien qu’il pensait du programme éducatif hollandais.

N’empêche. Ce qui est intéressant dans la tribune d’Antoine, c’est la description qu’il fait de la politique éducative menée durant le quinquennat, et notamment des cercles d’influence gravitant autour du Président.

« Les conservateurs manifestaient une haute ambition : ils voulaient rétablir l’autorité des savoirs et des professeurs. Prisonniers d’une imagerie surannée et d’une obsession mémorielle, ils se référaient à une éducation nationale de cocagne […]. Les libéraux, en quête d’efficience managériale, voulaient appliquer la logique du marché en offrant aux parents le libre choix de leur établissement. Enfin les budgétaires, pour complaire à la finance internationale, voulaient soutirer des dizaines de milliers d’emplois à un ministère jugé par principe dispendieux ».

De fait, voilà tracées les grandes lignes éducatives du quinquennat : annonces mémorielles déconnectées, suppression de la carte scolaire, autonomie des établissements, suppression de 80 000 postes… C’eut pu simplement être une cohérente politique de droite, mais Antoine nous apprend qu’autre chose présidait à cette politique : la méconnaissance du sujet.

« La vérité est que tous méconnaissaient la réalité concrète du métier de professeur, les conditions d’exercices dans les quartiers sensibles, les impasses de l’orientation pour les élèves peu doués ou défavorisés socialement. Au fond, ils idéalisaient l’éducation nationale mais ne l’aimaient pas, car elle votait mal et leur faisait peur ». De toute façon, « les priorités étaient ailleurs, dans l’économique et le social, dans l’international, la défense, la sécurité intérieure ». On comprend mieux le sentiment d’avoir été considéré comme la dernière roue du carrosse par des personnes ne connaissant rien à l’éducation.

Antoine croyait pourtant aux promesses du Sarkozy de 2007 sur l’éducation, il croyait à « l’énergie de cet homme hors norme », à « sa volonté de rupture ». Comme beaucoup de français, il a déchanté et ne peut plus croire aujourd’hui aux mêmes mots, aux mêmes promesses. Séduction, déception, répulsion, triptyque sarkozien classique.

 

Ce que dit Dominique Antoine de Hollande et de son équipe doit être également pris avec des pincettes, s’agissant d’un si spectaculaire retournement. L’ex-conseiller du Président se dit frappé « par [la] préoccupation constante de la jeunesse » d’un candidat qui rappelle régulièrement que « l’histoire de la République se confond avec l’histoire de l’école ». Rappelant que Hollande fut prof d’économie à Sciences Po (il fut son élève), il crédibilise le candidat socialiste sur le sujet épineux des 60 000 créations de postes, sûr que « ces moyens seraient utiles à l’école et ne seraient pas gaspillés », et y voit le signe que « l’éducation nationale sera bien, si François Hollande est élu, une priorité nationale ».

Quant à l’équipe éducation de Hollande, autour d’un Vincent Peillon « qui connaît bien l’éducation nationale et pas seulement les lycées des centres-villes et les classes préparatoires », elle est composée d’experts que connaît Antoine et qui « sont les mieux informés, les plus intelligents, les plus clairvoyants du moment. C’est à eux qu’il faut faire confiance si l’on veut que l’école progresse ».

Du côté du Président-candidat, on fulmine en silence. Il serait malvenu de dénoncer une méthode, le transfuge bavard et fracassant , qu’a inventée Nicolas Sarkozy.

 

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