Mme Marine Le Pen a dernièrement fait l’objet de poursuites exercées du chef de « provocation à la discrimination, à la violence ou à la haine envers un groupe de personnes à raison de leur appartenance à une religion » pour avoir comparé les « prières de rue » musulmanes à l’Occupation nazie. Le 15 décembre 2015, le Tribunal correctionnel de Lyon a rendu à son égard une décision de relaxe qui semble n’avoir causé à Mme Le Pen qu’une sérénité très passagère, au vu des débordements qu’elle a laissé à voir sur Twitter dès ce matin.
Ne goûtant visiblement pas les propos de M. Jean-Jacques BOURDIN et de son invité, M. Gilles Kepel, selon lesquels le jihadisme français et la poussée du Front National étaient des « phénomènes congruents », Mme Le Pen a réagi en publiant sur Twitter plusieurs messages successifs, précisant tout d’abord que « Le parallèle fait ce matin entre #Daech et le #FN est un dérapage inacceptable. Il doit retirer ses propos immondes ! » avant de publier trois photographies d’atrocités commises par Daech assorties du commentaire « Daesh c’est ça ».
Les photographies en question montraient deux hommes exécutés l’un par le feu, l’autre au moyen d’un char d’assaut ainsi qu’un corps décapité sur le sol, la tête posé sur le torse.
Madame Le Pen, l’avocate que vous avez été ne peut ignorer qu’une telle publication tombe sous le coup de la loi pénale, l’article 227-24 du code pénal sanctionnant d’une peine de trois années d’emprisonnement et de 75 000 € d’amende « le fait soit de fabriquer, de transporter, de diffuser par quelque moyen que ce soit et quel qu'en soit le support un message à caractère violent, incitant au terrorisme, pornographique ou de nature à porter gravement atteinte à la dignité humaine ou à inciter des mineurs à se livrer à des jeux les mettant physiquement en danger, soit de faire commerce d'un tel message ».
La même remarque peut au demeurant être adressée à M. Gilbert Collard, qui partage avec Mme Le Pen sa profession initiale et une certaine couleur d’idées, et lui a emboîté le pas en publiant à son tour la photo d’un homme exécuté par Daech.
Le délit en question a pour objectif essentiel de protéger les mineurs et se trouve d’ailleurs placé dans le chapitre du code pénal intitulé « De la mise en péril des mineurs ».
S’agissant d’une diffusion sur Twitter, il n’est pas sérieusement contestable que les messages qui y sont publiés soient mis à portée d’yeux de nombreux mineurs, en particulier lorsque, comme Mme Le Pen, l’on dispose plus de 830000 abonnés.
La diffusion de ces tweets a d’ores et déjà donné lieu à l’ouverture d’une enquête préliminaire à l’initiative du Parquet de Nanterre. Si des poursuites sont engagées, ce ne sera pas, contrairement à ce qu’a pu lancer Mme Le Pen, « pour diffamation à l'encontre de Daech », mais bien sur la base du texte cité ci-dessus, destiné à préserver la moralité des mineurs – un objectif auquel la présidente du Front National ne peut que souscrire, dans l’absolu.