Jeudi 22 juin. Cette nuit on a couché sous une tente, camouflés dans les arbres, et bien à l’abri de l’ennemi qui fait jouer son artillerie jusqu’à l’aube. En plus des obus allemands, il y a aussi le danger de la Luftwaffe qui vient bombarder les ponts sur l’Orne. On doit donc rester abrités parce qu’on est sans cesse sous une pluie de schrapnells de la DCA.
Cette nuit-là, bizarrement on n’a pas eu trop d’histoire. Mais au petit matin, il faut bouger rapidement et se terrer dans notre tranchée de combat car on est bombardés par notre propre artillerie navale. Bon c’est vrai qu’on commence à avoir un peu l’habitude car à chaque fois ils tirent trop court pour commencer. Après ça va mieux… Mais quand même, il y a mieux pour commencer une journée !
Du coup on a toujours cette drôle de sensation au fond de nos tranchées : on se retrouve allongé là, comme dans sa propre tombe, ce qui pourrait vraiment le devenir si notre abri était touché par coup direct.
Des tombes justement, des vraies cette fois-ci, on a en a creusé pas mal depuis quinze jours qu’on est là : déjà 12 je crois, pour 12 de nos copains tombés au champ d’honneur, morts pour la France… Si on continue à se battre, c’est pour eux. Si on garde autant le moral c’est parce qu’on pense tout le temps à eux. On ne les oubliera jamais.